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23/02/2017 | FRANCE | N°400440

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 23 février 2017, 400440


Vu la procédure suivante :

La SARL Francimo a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du 19 janvier 2016 par lequel le maire d'Antibes a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de la modification des toitures, façades, balcons ainsi que des accès et emplacements de stationnement pour un immeuble situé 17 chemin des Iles sur le territoire de la commune.

Par une ordonnance n° 1601234 du 29 avril 2016, le ju

ge des référés a rejeté cette demande de suspension.

Par un pourvoi somm...

Vu la procédure suivante :

La SARL Francimo a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du 19 janvier 2016 par lequel le maire d'Antibes a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de la modification des toitures, façades, balcons ainsi que des accès et emplacements de stationnement pour un immeuble situé 17 chemin des Iles sur le territoire de la commune.

Par une ordonnance n° 1601234 du 29 avril 2016, le juge des référés a rejeté cette demande de suspension.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 et 22 juin 2016 et le 12 janvier 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SARL Francimo demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande de suspension et d'ordonner, dans un délai de trente jours et sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard, à la commune de réexaminer la demande de permis de construire ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Antibes la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Weil, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gaschignard, avocat de la société Francimo, et à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la commune d'Antibes ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par décision du 19 janvier 2016, rectifiée le 21 suivant, le maire d'Antibes a refusé de délivrer à la SARL Francimo un permis de construire modificatif pour un immeuble situé au 17, Chemin des Iles, portant sur la suppression des combles aménagés, la réalisation d'une toiture terrasse, l'aménagement de places de stationnement supplémentaires en sous-sol et l'aménagement d'un nouvel accès au sous-sol par une servitude de passage ; que ce refus a été motivé par le fait que la largeur prévue pour ce dernier accès était, au plus étroit, de 2,60 mètres, alors que l'article UD3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Antibes prévoit que les voies publiques ou en servitude privée assurant la desserte du terrain doivent avoir des caractéristiques adaptées, avec un minimum de 4,50 mètres de largeur utile et praticable ; que la société Francimo se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 29 avril 2016 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de ce refus de permis de construire ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la demande de permis de construire : " Le règlement peut comprendre tout ou partie des règles suivantes : (...) 3° Les conditions de desserte des terrains par les voies publiques ou privées et d'accès aux voies ouvertes au public " ; qu'aux termes de l'article UD3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Antibes : " Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée. / Les caractéristiques des accès et des voies privées doivent être adaptées à l'opération et satisfaire aux exigences de sécurité, de défense contre l'incendie, de ramassage des ordures ménagères. / Lorsque le terrain est riverain de deux ou plusieurs voies publiques, l'accès sur celles de ces voies qui présenteraient une gêne ou un risque pour la circulation ou les usagers est interdit. / Les voies publiques ou en servitude privée assurant la desserte du terrain devront avoir des caractéristiques adaptées avec un minimum de 4,50 mètres de largeur utile et praticable. (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que, pour être constructible, un terrain doit disposer d'un accès à une voie publique adapté à l'opération et satisfaisant aux exigences de sécurité, de défense contre l'incendie, de ramassage des ordures ménagères ; que ni ces dispositions ni aucune autre disposition de ce règlement n'imposent que, lorsqu'un terrain est doté de plusieurs accès à une voie publique ou privée ouverte à la circulation automobile, les caractéristiques de chacun de ces accès soient conformes aux règles fixées par l'article UD3, dès lors que l'un d'entre eux, au moins, est adapté aux exigences résultant de cet article ;

4. Considérant que, pour rejeter la demande de suspension dont il était saisi, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a retenu, en l'état de l'instruction, compte tenu notamment de la rédaction de l'article UD3 du règlement du plan local d'urbanisme exigeant que les " dessertes privées " présentent une largeur minimale de 4,50 mètres, que le moyen tiré de la méconnaissance de cet article n'était pas de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la construction objet du permis de construire modificatif dispose depuis sa façade principale d'un accès au chemin des Iles, voie publique dont les caractéristiques sont conformes aux exigences de l'article UD3, le juge des référés du tribunal administratif a commis une erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son ordonnance doit être annulée ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Sur les conclusions aux fins de suspension :

6. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;

7. Considérant qu'en application de ces dispositions, l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte dès lors que l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés, saisi de conclusions à fin de suspension d'une décision de refus de délivrance d'un permis de construire, d'apprécier et de motiver l'urgence à la date à laquelle il se prononce, compte tenu des conséquences d'un tel refus sur la situation concrète de l'intéressé ;

8. Considérant que le refus de délivrer le permis de construire sollicité entraîne pour la société Francimo l'impossibilité d'établir la déclaration attestant l'achèvement de l'immeuble et la conformité des travaux au permis initial et, par suite, de procéder à la commercialisation des appartements ; que la condition d'urgence doit, dans les circonstances de l'espèce, être regardée comme remplie ;

9. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point 4 de la présente décision, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UD 3 du règlement du plan local d'urbanisme est, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; qu'en revanche, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée n'est pas de nature, en l'état de l'instruction, à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de cette décision ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Francimo est fondée à demander que soit ordonnée la suspension de l'exécution de l'arrêté du 19 janvier 2016 par lequel le maire d'Antibes a refusé de lui délivrer un permis de construire ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre au maire d'Antibes de réexaminer la demande présentée par la société requérante, dans un délai de trente jours à compter de la notification de la présente décision, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société Francimo, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Antibes le versement d'une somme de 3 000 euros à la SARL Francimo au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 29 avril 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nice est annulée.

Article 2 : L'exécution de l'arrêté du 19 janvier 2016 est suspendue.

Article 3 : Il est enjoint au maire d'Antibes de réexaminer la demande présentée par la société Francimo dans un délai de trente jours à compter de la notification de la présente décision, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

Article 4 : La commune d'Antibes versera à la société Francimo la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées par la commune d'Antibes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la SARL Francimo et à la commune d'Antibes.


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 400440
Date de la décision : 23/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 fév. 2017, n° 400440
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François Weil
Rapporteur public ?: M. Xavier Domino
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD ; SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 07/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:400440.20170223
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