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30/01/2017 | FRANCE | N°396605

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 30 janvier 2017, 396605


Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 juillet 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination. Par un jugement n° 1412856 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15PA00232 du 31 décembre 2015, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par Mme B...contre ce

jugement.

Par un pourvoi sommaire, un nouveau mémoire et un mémoire complémen...

Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 juillet 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination. Par un jugement n° 1412856 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15PA00232 du 31 décembre 2015, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par Mme B...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un nouveau mémoire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er février, 12 février et 2 mai 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, Mme B...demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Weil, conseiller d'État,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de Mme B...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MmeB..., ressortissante tunisienne née le 24 décembre 1957, est entrée en France le 26 juin 2011 ; qu'elle a sollicité, le 18 décembre 2013, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations du b) du 1 de l'article 10 de l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ; que, par un arrêté du 7 juillet 2014, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité ainsi qu'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que Mme B...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 31 décembre 2015 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé contre le jugement du 18 décembre 2014 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande d'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 10 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 : " 1. Un titre de séjour d'une durée de dix ans, ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle, est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français :/ (...) b) à l'enfant tunisien d'un ressortissant français (...) ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B...est entrée en France sur le fondement d'un visa de court séjour portant la mention " ascendant non à charge " qui expirait le 22 novembre 2011 ; qu'en estimant qu'à la date de l'arrêté du 7 juillet 2014, elle se trouvait ainsi en situation irrégulière, sans que puisse y faire obstacle la circonstance qu'elle aurait tenté de déposer une demande de titre de séjour entre juillet et septembre 2011, la cour administrative d'appel de Paris, par un arrêt suffisamment motivé sur ce point, s'est livrée à une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis, sans l'entacher de dénaturation ; qu'elle n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que le préfet de police avait pu légalement se fonder sur l'irrégularité du séjour pour refuser de délivrer à l'intéressée un titre de séjour d'une durée de dix ans en tant qu'ascendant à charge de Français sur le fondement des stipulations du b) du 1 de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...)/ 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit :/ (...) 7° A l'étranger (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

5. Considérant que s'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MmeB..., qui est divorcée, vit au domicile de sa fille, de nationalité française, du compagnon de cette dernière et de leurs deux enfants, que sa deuxième fille est née en France, que l'un de ses fils est de nationalité française et réside en France, que ses enfants lui versent des pensions alimentaires et que plusieurs membres de sa famille vivent également en France, il en ressort également, comme l'a relevé la cour dans l'arrêt attaqué, qu'elle ne séjourne en France que depuis le mois de juin 2011 et a conservé des attaches dans son pays d'origine, où elle a vécu, pour l'essentiel, jusqu'à l'âge de 53 ans, où trois de ses enfants sont nés et où résident sa soeur ainsi que l'un de ses frères ; qu'en déduisant de l'ensemble de ces circonstances que le refus de délivrance du titre de séjour litigieux ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit de Mme B...au respect de sa vie privée et familiale, la cour administrative d'appel de Paris n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ; que l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 n'a pas entendu écarter l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour ; qu'au nombre de ces dispositions figurent notamment les dispositions des articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls ressortissants tunisiens qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 ou par les stipulations équivalentes de l'accord franco-tunisien et non de tous ceux qui se prévalent de ces dispositions ;

7. Considérant qu'en jugeant que le préfet de police n'était pas tenu de soumettre le cas de Mme B...à la commission du titre de séjour, cette dernière ne pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des stipulations du b) du 1 de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

8. Considérant que la cour a répondu au moyen tiré de ce que la décision d'obligation de quitter le territoire français serait illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour opposé à Mme B...;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de Mme B...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 396605
Date de la décision : 30/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jan. 2017, n° 396605
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François Weil
Rapporteur public ?: M. Xavier Domino
Avocat(s) : SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:396605.20170130
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