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18/01/2017 | FRANCE | N°389004

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 18 janvier 2017, 389004


Vu la procédure suivante :

La société Stago International a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la réduction, à hauteur de la somme de 320 467 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1003497 du 23 mai 2012, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 12VE02802 du 22 janvier 2015, la cour admini

strative d'appel de Versailles a fait droit à l'appel formé par la société Sta...

Vu la procédure suivante :

La société Stago International a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la réduction, à hauteur de la somme de 320 467 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1003497 du 23 mai 2012, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 12VE02802 du 22 janvier 2015, la cour administrative d'appel de Versailles a fait droit à l'appel formé par la société Stago International contre ce jugement.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 26 mars 2015 et 29 juin 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des finances et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt et, réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société Stago International.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bastien Lignereux, auditeur,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de la société Stago international ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 210 A du code général des impôts : " 1. Les plus-values nettes et les profits dégagés sur l'ensemble des éléments d'actif apportés du fait d'une fusion ne sont pas soumis à l'impôt sur les sociétés. / Il en est de même de la plus-value éventuellement dégagée par la société absorbante lors de l'annulation des actions ou parts de son propre capital qu'elle reçoit ou qui correspondent à ses droits dans la société absorbée. / L'inscription à l'actif de la société absorbante du mali technique de fusion consécutif à l'annulation des titres de la société absorbée ne peut donner lieu à aucune déduction ultérieure. / (...) 3. L'application de ces dispositions est subordonnée à la condition que la société absorbante s'engage, dans l'acte de fusion, à respecter les prescriptions suivantes : / (...) e) Elle doit inscrire à son bilan les éléments autres que les immobilisations pour la valeur qu'ils avaient, du point de vue fiscal, dans les écritures de la société absorbée. A défaut, elle doit comprendre dans ses résultats de l'exercice au cours duquel intervient l'opération le profit correspondant à la différence entre la nouvelle valeur de ces éléments et la valeur qu'ils avaient, du point de vue fiscal, dans les écritures de la société absorbée. / (...) ". Aux termes du II de l'article 209 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " En cas de fusion ou opération assimilée placée sous le régime de l'article 210 A, les déficits antérieurs (...) non encore déduits par la société absorbée ou apporteuse sont transférés, sous réserve d'un agrément délivré dans les conditions prévues à l'article 1649 nonies, à la ou aux sociétés bénéficiaires des apports, et imputables sur ses ou leurs bénéfices ultérieurs dans les conditions prévues (...) au troisième alinéa du I (...). / (...) L'agrément est délivré lorsque : / a. L'opération est justifiée du point de vue économique et obéit à des motivations principales autres que fiscales ; / b. L'activité à l'origine des déficits ou des intérêts dont le transfert est demandé est poursuivie par la ou les sociétés bénéficiaires des apports pendant un délai minimum de trois ans. "

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision de l'assemblée générale extraordinaire du 30 avril 2007, la société Diagnostica Stago a absorbé, avec effet rétroactif au 1er janvier 2007, la société Stago Instruments, dont elle détenait 17,6 % du capital, ces deux sociétés étant alors placées sous le contrôle de la société Stago International, société tête d'un groupe fiscalement intégré au sens des articles 223 A et suivants du code général des impôts. Cette opération de fusion a été placée sous le régime spécial prévu par l'article 210 A de ce code cité au point 1 ci-dessus. Par un agrément délivré le 29 octobre 2007 en application des dispositions du II de l'article 209 du code général des impôts citées au point 1, l'administration fiscale a autorisé la société Diagnostica Stago à imputer sur ses résultats à venir le déficit que la société absorbée avait constaté à la date d'effet de la fusion. A l'issue d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos de 2005 à 2007, l'administration fiscale a notamment estimé que la société absorbante aurait dû prendre en compte, dans le calcul du " mali " de fusion qu'elle a déduit de son résultat imposable, l'économie d'impôt sur les sociétés résultant du transfert de ce déficit. Le ministre des finances et des comptes publics se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 22 janvier 2015 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a fait droit à l'appel présenté par la société Stago International contre un jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 23 mai 2012 rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007 à raison de ce chef de redressement, ainsi que des intérêts de retard correspondants.

Sur les conclusions du pourvoi dirigées contre l'arrêt en tant que la cour aurait statué au-delà des conclusions dont elle était saisie :

3. Il ressort des écritures de la société Stago International devant les juges du fond que ses conclusions tendaient à la décharge des impositions supplémentaires et pénalités mises à sa charge à raison de la seule remise en cause du montant du " mali " de fusion déduit du résultat imposable de la société Diagnostica Stago, soit un montant de 320 467 euros en droits et pénalités, les autres chefs de redressement n'ayant pas été contestés devant le juge de l'impôt. Par suite, en prononçant, à l'article 2 de son arrêt, la décharge de l'ensemble des impositions supplémentaires et pénalités auxquelles la société Stago International a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007, la cour a statué au-delà des conclusions dont elle était saisie. Cet article de son arrêt doit dès lors être annulé en tant qu'il a prononcé la décharge des impositions supplémentaires et pénalités excédant celles dont la requérante demandait à être déchargée.

Sur les conclusions du pourvoi dirigées contre l'arrêt en tant que la cour a statué sur les conclusions dont elle était saisie :

4. Pour la détermination des bénéfices imposables de la société absorbante dans le cas d'une fusion de deux sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés, les conséquences de la fusion doivent être prises en compte dans le bilan de clôture de l'exercice au cours duquel la convention de fusion a été définitivement conclue. Si les deux sociétés sont convenues, comme elles y sont d'ailleurs généralement contraintes par les délais nécessaires notamment à l'évaluation des apports et à la réunion des organes délibérants des deux personnes morales, de donner effet à la fusion à une date déterminée, antérieure à celle à laquelle la convention est définitivement conclue, celles-ci sont tenues de prendre en compte toutes les conséquences de la date ainsi stipulée, à laquelle les effets de la fusion remontent.

5. Le transfert des déficits de la société absorbée, auquel la société absorbante a droit lorsqu'elle remplit les conditions énoncées au II de l'article 209 du code général des impôts, constitue, en application de ces dispositions, l'un des effets de la fusion placée sous le régime de l'article 210 A de ce code. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que ce transfert de déficit doit être regardé comme remontant à la date d'effet de la fusion. Dès lors, la société absorbante doit tenir compte de l'économie d'impôt sur les sociétés en résultant dans le calcul de la valeur de l'actif apporté et de l'éventuel " mali " de fusion déductible de son résultat imposable au titre de l'exercice de fusion, alors même que l'agrément prévu au II de l'article 209 ne lui a pas encore été octroyé à la date d'effet de la fusion.

6. Il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que l'économie d'impôt correspondant au transfert des déficits de la société absorbée par la société Diagnostica Stago n'avait pas à être prise en compte dans le calcul du " mali " de fusion au motif que ce transfert avait été autorisé par un agrément délivré postérieurement à la date d'effet de la fusion, la cour a commis une erreur de droit. Par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés au soutien de ces conclusions, le ministre est fondé à demander l'annulation de son arrêt en tant qu'il a prononcé la décharge des impositions supplémentaires et pénalités mises à la charge de la société Stago International à raison de ce chef de redressement.

Sur les conclusions présentées par la société Stago International au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 22 janvier 2015 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles en tant qu'elle porte sur les conclusions de la société Stago International tendant à la réduction, à hauteur de la somme de 320 467 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Stago International au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances et à la société Stago International.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 389004
Date de la décision : 18/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 18 jan. 2017, n° 389004
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bastien Lignereux
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN, STOCLET

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:389004.20170118
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