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28/12/2016 | FRANCE | N°395135

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 28 décembre 2016, 395135


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 décembre 2015 et 8 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national de la presse agricole et rurale, la SA Réussir, la SAS Editions du Boisbaudry, la SAS Groupe France Agricole, la SARL Comedpro et la SA ATC demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-647 du 10 juin 2015 relatif à la publicité des médicaments vétérinaires ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros a

u titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièc...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 décembre 2015 et 8 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national de la presse agricole et rurale, la SA Réussir, la SAS Editions du Boisbaudry, la SAS Groupe France Agricole, la SARL Comedpro et la SA ATC demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-647 du 10 juin 2015 relatif à la publicité des médicaments vétérinaires ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le décret n° 2004-802 du 29 juillet 2004 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Pacoud, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Richard, avocat du Syndicat national de la presse agricole et rurale, de la SA Réussir, de la SAS Editions du Boisbaudry, de la SAS Groupe France Agricole, de la SARL Comedpro et de la SA ATC.

Considérant ce qui suit :

1. Eu égard aux termes de leur recours gracieux et aux moyens qu'ils soulèvent, les requérants doivent être regardés comme demandant l'annulation pour excès de pouvoir des seules dispositions des 3° et 4° de l'article 2 et du I de l'article 6 du décret du 10 juin 2015 relatif à la publicité des médicaments vétérinaires. Ils reprochent au décret attaqué d'avoir, par les 3° et 4° de son article 2, interdit auprès des propriétaires d'animaux producteurs d'aliments la publicité pour les médicaments vétérinaires qui ne peuvent être délivrés que sur ordonnance et estiment, à titre subsidiaire, que le décret aurait dû prévoir une période transitoire plus longue que celle que prévoit le I de son article 6.

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 5141-83 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure au décret attaqué, issue du décret du 29 juillet 2004 publié au Journal officiel de la République française du 8 août suivant : " La publicité en faveur des médicaments vétérinaires n'est autorisée auprès des personnes physiques ou morales habilitées à distribuer les médicaments vétérinaires par les articles L. 5143-2 et L. 5143-6 que pour les médicaments vétérinaires qu'elles sont autorisées à prescrire ou à délivrer ". Le 3° de l'article 2 du décret attaqué reprend ces dispositions en se bornant, dans un souci de précision terminologique, à remplacer le terme de distribution par celui de délivrance, qui n'en modifie ni le sens ni la portée. Ces dispositions, dont la portée ne se trouve pas non plus modifiée par les autres dispositions du décret attaqué et qui en sont divisibles, sont ainsi purement confirmatives de dispositions devenues définitives. L'interprétation donnée par l'administration de la notion de publicité auprès du public, à supposer même qu'elle ait été modifiée à la suite de la publication du décret attaqué, alors que ni les dispositions du droit européen dont le code de la santé publique assure la transposition ni la portée des dispositions réglementaires critiquées n'ont été modifiées, est sans incidence sur ce caractère confirmatif. Par suite, les conclusions dirigées contre les dispositions du 3° de l'article 2 du décret attaqué sont tardives. Au demeurant, la Cour de justice de l'Union européenne ayant jugé, au point 58 de l'arrêt rendu le 27 octobre 2016 dans l'affaire C-114/15, qu'un " éleveur, qui est l'utilisateur final du médicament vétérinaire, doit, à cet égard, être considéré comme faisant partie du " public " auquel un médicament vétérinaire est délivré, au sens de l'article 67, premier alinéa, de ladite directive " 2001/82/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments vétérinaires, relatif à la délivrance au public des médicaments vétérinaires, l'administration n'a pas méconnu le sens et la portée des dispositions qu'elle interprétait en estimant que les dispositions interdisant la publicité pour certains médicaments vétérinaires auprès du public, prises pour la transposition de l'article 85 de la même directive, visaient également la publicité auprès des éleveurs.

3. En deuxième lieu, le 4° du même article 2 supprime le second alinéa de l'article R. 5141-84 du même code, selon lequel la publicité en faveur des médicaments qui ne sont pas prescrits sur ordonnance, autorisée auprès du public, " ne doit jamais faire apparaître la consultation vétérinaire comme superflue, ni être assortie de promesses ou d'avantages de quelque nature que ce soit, ni utiliser des attestations ou des expertises ". Ces dispositions sont toutefois reprises au nouvel article R. 5141-84-1 du même code créé par le 5° du même article 2. Par suite, le décret attaqué ne fait pas grief aux requérants sur ce point.

4. En dernier lieu, le I de l'article 6 du décret attaqué, qui fixe la date d'entrée en vigueur de ce texte, est dépourvu de portée à l'égard des dispositions des 3° et 4° de l'article 2 de ce décret, qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, n'apportent pas de modification à l'état du droit existant.

5. Il résulte de ce qui précède que les requérants, dont le recours gracieux auprès des ministres chargés de la santé, de la justice et de l'agriculture ne peut être regardé comme tendant à l'abrogation du décret attaqué, ne sont pas recevables à demander l'annulation des dispositions du décret du 10 juin 2015 qu'ils critiquent.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête du Syndicat national de la presse agricole et rurale, de la SA Réussir, de la SAS Editions du Boisbaudry, de la SAS Groupe France Agricole, de la SARL Comedpro et de la SA ATC est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au Syndicat national de la presse agricole et rurale, premier requérant dénommé, au Premier ministre, à la ministre des affaires sociales et de la santé et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Les autres requérants seront informés de la présente décision par la SCP Richard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.

Copie en sera adressée au Garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 395135
Date de la décision : 28/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 2016, n° 395135
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric Pacoud
Rapporteur public ?: M. Rémi Decout-Paolini
Avocat(s) : SCP RICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 10/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:395135.20161228
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