Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 octobre 2015 et 19 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association des entreprises de biologie médicale (AEBM) demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 15-DCC-93 de l'Autorité de la concurrence du 13 juillet 2015 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Bio-Access par la société Eurofins.
Elle soutient que :
- la décision de l'Autorité de la concurrence méconnaît l'article L. 6223-5 du code de la santé publique ;
- que l'Autorité de la concurrence a commis une erreur d'appréciation dans la définition du marché pertinent pour l'analyse des effets concurrentiels.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pierre Lombard, auditeur,
- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de l'Association des entreprises de biologie médicale et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la société Eurofins ;
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision n° 15-DCC-93 du 13 juillet 2015, l'Autorité de la concurrence a autorisé la prise de contrôle exclusif de la société Bio-Access par la société Eurofins. L'association des entreprises de biologie médicale (AEBM) demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision.
Sur la fin de non recevoir soulevée par l'Autorité de la concurrence et les sociétés Eurofins et Bio-Access :
2. L'AEBM est une association dont l'objet est notamment de défendre les laboratoires de biologie médicale exploités sous forme d'entreprises individuelles ou de sociétés dont le capital est détenu de façon majoritaire par des biologistes personnes physiques, en exercice ou retraités depuis moins de dix ans. Elle a ainsi pour objet la défense des intérêts collectifs d'une partie des laboratoires concurrents de ceux des sociétés Eurofins et Bio-Access. Dès lors, contrairement à ce que soutiennent l'Autorité de la concurrence et ces sociétés, l'AEBM justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de la décision attaquée.
Sur la légalité de la décision attaquée :
3. Il appartient à l'Autorité de la concurrence, saisie d'une opération de concentration, à partir d'une analyse prospective tenant compte de l'ensemble des données pertinentes et se fondant sur un scénario économique plausible, de caractériser les effets anticoncurrentiels de l'opération et d'apprécier si ces effets sont de nature à porter atteinte au maintien d'une concurrence suffisante sur les marchés qu'elle affecte.
4. D'une part, il n'appartenait pas à l'Autorité de la concurrence de prendre en compte, pour prendre sa décision du 13 juillet 2015, les dispositions de l'article L. 6223-5 du code de la santé publique, qui n'ont pas d'autre objet que d'interdire la participation de certaines catégories d'opérateurs au capital social de sociétés exploitant des laboratoires de biologie médicale privés. D'autre part, l'autorisation délivrée par l'Autorité de la concurrence ne saurait être regardée, contrairement à ce que soutient l'AEBM, comme ayant nécessairement et par elle-même pour effet de conduire à une méconnaissance de l'article L. 6223-5 du code de la santé publique. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'Autorité de la concurrence aurait commis une erreur de droit en méconnaissant les dispositions de l'article L. 6223-5 du code de la santé publique doit être écarté.
5. Par ailleurs, l'Autorité de la concurrence a limité le marché pertinent, pour l'analyse des effets concurrentiels de l'opération de concentration entre Eurofins et Bio-Access, au marché de l'approvisionnement en équipements, réactifs et consommables de biologie sur lequel les parties à l'opération sont simultanément actives en tant qu'acheteurs. Dès lors que la société Eurofins n'intervenait ni sur le marché des examens de biologie médicale spécialisée, ni sur celui des examens de biologie médicale de routine et qu'elle s'est seulement substituée à la société Bio-Access sur le marché des examens de biologie médicale de routine, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que l'Autorité de la concurrence a ainsi délimité le marché pertinent.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 1 000 euros à la charge de l'AEBM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de l'association des entreprises de biologie médicale est rejetée.
Article 2 : L'AEBM versera, à parts égales, aux sociétés Eurofins et Bio-Access la somme globale de 1 000 euros.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association des entreprises de biologie médicale, à la société Eurofins, à la société Bio-Access et à l'Autorité de la concurrence.