Vu la procédure suivante :
La société en nom collectif Morgagni-Zeimett a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 et 2011 dans les rôles de la commune de Matignicourt-Goncourt (Marne). Par un jugement n° 1301487 du 16 décembre 2014, le tribunal, après avoir jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer à hauteur de 14 709 euros au titre de l'année 2010 et de 15 748 euros au titre de l'année 2011 en raison des dégrèvements accordés en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de cette demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 février et 15 mai 2015 et le 25 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Morgagni-Zeimett demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Marc Anton, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat de la SNC Morgagni-Zeimett.
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2008 et 2009, l'administration fiscale a, le 30 octobre 2009, informé la société Morgagni-Zeimett, propriétaire de carrières à ciel ouvert, de son intention d'établir à son encontre des rôles supplémentaires de taxe foncière sur les propriétés bâties pour omission ou insuffisance d'évaluation, à raison de terrains affectés à l'exploitation des carrières et de l'application aux bâtiments et à leurs annexes, situés dans l'enceinte des carrières, de la méthode comptable prévue à l'article 1499 du code général des impôts ; qu'elle n'a pas procédé à la mise en recouvrement d'impositions supplémentaires au titre de 2008 et 2009, mais a pris en compte la modification de la valeur locative au titre des années 2010 et 2011 ;
2. Considérant que le respect du principe général des droits de la défense exige, lorsqu'une imposition est, comme la taxe foncière sur les propriétés bâties, assise sur la base d'éléments qui doivent être déclarés par le redevable, que l'administration n'établisse, à la charge de celui-ci, des droits excédant le montant de ceux qui résulteraient des éléments qu'il a déclarés qu'après l'avoir mis à même de présenter ses observations ; que, si l'administration fiscale doit, notamment, s'acquitter de cette obligation lorsqu'elle procède, en application des dispositions de l'article 1508 du code général des impôts, au redressement des bases de la taxe foncière sur les propriétés bâties d'un contribuable pour une insuffisance d'évaluation résultant du défaut ou de l'inexactitude des déclarations des propriétés bâties prévues aux articles 1406 et 1502 de ce code, avant d'établir la première cotisation de taxe affectée par ce redressement, elle n'y est, en revanche, pas tenue lorsque, sans remettre en cause aucun élément qu'il aurait incombé au redevable de déclarer, elle prend en compte les bases retenues au titre de l'année précédente, qu'elle reconduit sans changement ;
3. Considérant que le tribunal administratif de Châlons-en Champagne a relevé que la société requérante avait été mise à même de faire valoir ses observations sur le rehaussement de la valeur locative de ses biens envisagé par l'administration fiscale au titre des années 2008 et 2009 et qu'elle avait d'ailleurs présenté des observations ; qu'en jugeant, au vu des circonstances de fait dont il était saisi, qu'était sans incidence sur la régularité des impositions en litige, relatives aux années 2010 et 2011, la circonstance qu'aucune imposition supplémentaire n'avait été établie au titre des années 2008 et 2009, il n'a pas méconnu les principes mentionnés au point 2 ci-dessus ni commis d'erreur de droit ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la société Morgagni-Zeimett doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société Morgagni-Zeimett est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société en nom collectif Morgagni-Zeimett et au ministre de l'économie et des finances.