Vu la procédure suivante :
Le conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes a porté plainte contre M. A... B...devant la chambre disciplinaire de première instance de Provence-Alpes-Côte d'Azur et Corse de l'ordre des chirurgiens-dentistes. Par une décision du 2 septembre 2013, la chambre disciplinaire a prononcé, à l'encontre de M. B..., la sanction d'interdiction d'exercer sa profession pendant deux mois, dont un mois avec sursis.
Par une décision n° 2222 du 13 avril 2015, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes a rejeté l'appel formé par M. B... contre cette décision et décidé que la partie ferme de la sanction serait exécutée du 1er au 30 septembre 2015.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 juin 2015, 22 juillet 2015 et 15 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette décision ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge du conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Pauline Pannier, auditeur-rapporteur ,
- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de M. B...et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat du conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 4127-215 du code de la santé publique : " La profession dentaire ne doit pas être pratiquée comme un commerce. / Sont notamment interdits :/ (...) 3° Tous procédés directs ou indirects de publicité ; (...) " ; que ces dispositions, qui fixent l'obligation déontologique de ne pas pratiquer l'art dentaire comme un commerce et interdisent, à ce titre, le recours aux procédés publicitaires, ont pour objet de prohiber toute information qui viserait à promouvoir, auprès de patients éventuels, l'activité de ce praticien ; qu'en revanche, elles ne font obstacle ni à la mise à disposition du public par ce praticien, au-delà des indications expressément mentionnées dans le code de la santé publique telles que celles pouvant figurer dans les annuaires à destination du public ou sur les plaques présentes sur les lieux d'exercice, d'informations à caractère objectif et à finalité scientifique, préventive ou pédagogique, ni à la délivrance d'informations à caractère objectif sur les modalités d'exercice, destinées à faciliter l'accès aux soins dentaires, ou exclusivement destinées à d'autres professionnels de santé ;
2. Considérant qu'il résulte des termes de sa décision du 13 avril 2015 que, pour rejeter l'appel de M.B..., chirurgien-dentiste, contre la décision de la chambre disciplinaire de première instance de Provence-Alpes-Côte d'Azur et Corse ayant prononcé à son encontre la sanction d'interdiction d'exercer sa profession pendant deux mois, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes s'est notamment fondée sur ce que, ayant fait conduire une campagne de démarchage téléphonique au profit d'une association qu'il préside et qui exploite à Nice un centre de soins dentaires, destiné notamment à un public en difficulté, il avait méconnu les obligations résultant des dispositions citées ci-dessus de l'article R. 4127-215 du code de la santé publique ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 1 que, dès lors qu'il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis que cette campagne téléphonique, dont il n'était pas soutenu qu'elle consistait en la délivrance d'informations dépourvues de caractère objectif, ne s'adressait qu'à des professionnels de santé, la chambre disciplinaire nationale a inexactement qualifié les faits de l'espèce ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. B...est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque ;
4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre à la charge de M.B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes la somme de 3 500 euros à verser à M. B...au titre des mêmes dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du 13 avril 2015 de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes.
Article 3 : Le conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes versera à M. B...la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par le conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A... B...et au conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes.