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19/08/2016 | FRANCE | N°394534

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 19 août 2016, 394534


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le numéro n° 394534, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 novembre 2015, 27 janvier et 22 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...dit Panayotis demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 27 août 2015 prononçant, à son encontre, une peine disciplinaire de suspension temporaire pour une durée de dix ans de l'exercice des droits et prérogatives attachés à sa qualité de membre de la Légion d'honneur et une privation du droit de porter l

es insignes de toute décoration française ou étrangère ressortissant à la ...

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le numéro n° 394534, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 novembre 2015, 27 janvier et 22 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...dit Panayotis demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 27 août 2015 prononçant, à son encontre, une peine disciplinaire de suspension temporaire pour une durée de dix ans de l'exercice des droits et prérogatives attachés à sa qualité de membre de la Légion d'honneur et une privation du droit de porter les insignes de toute décoration française ou étrangère ressortissant à la grande chancellerie.

2° Sous le numéro n° 394535, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 novembre 2015, 27 janvier et 22 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...dit Panayotis demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 27 août 2015 prononçant, à son encontre, une peine disciplinaire de suspension temporaire pour une durée de dix ans de l'exercice des droits et prérogatives attachés à sa qualité de membre de l'ordre national du Mérite.

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de la Légion d'honneur et de la médaille militaire ;

- le décret n° 63-1196 du 3 décembre 1963 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Lelièvre, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de M. B...;

1. Considérant que les requêtes de M. B...présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a été nommé chevalier de l'ordre national du Mérite par décret du 10 novembre 1998, puis chevalier de la Légion d'honneur par décret du 11 avril 2001 ; que par les décrets attaqués du 27 août 2015, le président de la République a décidé de le suspendre pendant une durée de dix ans des droits et prérogatives attachés à sa qualité de membre de ces deux ordres et de le priver du droit de porter les insignes de toute décoration française ou étrangère ressortissant à la grande chancellerie ;

3. Considérant, en premier lieu, d'une part, que le conseil de l'ordre national du Mérite et le conseil de l'ordre de la Légion d'honneur, compétents pour rendre un avis sur les sanctions disciplinaires à prendre à l'encontre des membres de chacun de ces deux ordres, ne sont pas des juridictions au sens des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la procédure suivie en l'espèce aurait méconnu le droit garanti par ces stipulations est inopérant ; que, d'autre part, aucun texte ni aucun principe général du droit n'enferme dans un délai déterminé l'exercice de l'action disciplinaire en matière de décorations ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que les sanctions en litige n'auraient pas été prononcées dans un délai raisonnable ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 103 du code de la Légion d'honneur et de la médaille militaire : " L'intéressé est averti par le grand chancelier de l'ouverture d'une action disciplinaire à son encontre. Il lui est donné connaissance des pièces de son dossier. / Il est invité, à cette occasion, à produire, dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois, ses explications et sa défense au moyen d'un mémoire établi par lui ou par son avocat (...) " ; qu'aux termes de l'article 34 du décret du 3 décembre 1963 portant création de l'ordre national du Mérite : " (...) les sanctions et la procédure disciplinaires prévues pour la Légion d'honneur sont applicables aux membres de l'ordre national du Mérite " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le dossier sur lequel ont été fondées les sanctions contestées était composé du jugement du tribunal de grande instance de Paris du 21 décembre 2007 ayant condamné M. B...à une peine de vingt-quatre mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 350 000 euros pour abus de biens ou de crédit d'une société par actions par un dirigeant à des fins personnelles ; que le requérant ne conteste pas avoir eu communication de cette pièce ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la procédure disciplinaire serait irrégulière, faute pour le requérant d'avoir eu communication d'un dossier complet, manque en fait ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 89 du code de la Légion d'honneur et de la médaille militaire : " Les peines disciplinaires sont : 1° La censure ; 2° La suspension totale ou partielle de l'exercice des droits et prérogatives ainsi que du droit au traitement attachés à la qualité de membre de l'ordre de la Légion d'honneur ; 3° L'exclusion de l'ordre " ; qu'aux termes de l'article R. 95 du même code : " L'exercice des droits et prérogatives ainsi que le traitement attachés à la qualité de membre de l'ordre peuvent être suspendus en totalité ou en partie soit en cas de condamnation à une peine correctionnelle, soit en cas de faillite " ; qu'aux termes de l'article R. 96 du même code : " Les peines disciplinaires prévues au présent chapitre peuvent être prises contre tout membre de l'ordre qui aura commis un acte contraire à l'honneur " ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 4, les sanctions prévues pour la Légion d'honneur sont applicables aux membres de l'ordre national du Mérite ; que la suspension de dix ans prononcée en l'espèce à l'encontre de M. B...n'est pas disproportionnée à la gravité des faits reprochés à l'intéressé ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation des décrets attaqués ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes de M. B...sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...dit Panayotis, au grand chancelier de la Légion d'honneur et au Président de la République.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 394534
Date de la décision : 19/08/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 aoû. 2016, n° 394534
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François Lelièvre
Rapporteur public ?: M. Olivier Henrard
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:394534.20160819
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