Vu la procédure suivante :
La commune de La Calmette (Gard) et la société d'aménagement des territoires (SAT) ont demandé au tribunal administratif de Nîmes :
- à titre principal, de condamner solidairement la SCI La Carbonnière et la SCI La Carbonnière II à verser à la SAT, en premier lieu, la somme de 267 972,17 euros TTC correspondant à la première fraction de la participation due au titre de la convention d'aménagement conclue en application des dispositions de l'article L. 311-4 du code de l'urbanisme, assortie des intérêts au taux légal majoré de 5 points à compter du 9 janvier 2007, en second lieu, la somme de 300 054,87 euros au titre de la seconde fraction de cette participation, assortie des intérêts au taux légal majoré de 5 points à compter du 6 novembre 2008, en accordant dans les deux cas la capitalisation des intérêts ;
- à titre subsidiaire, sur le fondement de l'enrichissement sans cause, de condamner solidairement la SCI La Carbonnière et la SCI La Carbonnière II à verser à la SAT la somme de 568 027,04 euros avec les intérêts capitalisés, à compter de l'enregistrement de leur demande.
Par un jugement n° 1002903 du 7 décembre 2012, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.
Par un arrêt n° 13MA00689 du 20 mars 2015, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de la commune de La Calmette et de la SAT, annulé ce jugement et condamné solidairement la SCI La Carbonnière et la SCI La Carbonnière II à verser à la SAT d'une part, une somme de 82 559,65 euros portant intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 13 janvier 2007 et, d'autre part, une somme de 92 421,68 euros HT, portant intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 6 novembre 2008, les intérêts échus le 26 novembre 2010 étant capitalisés à compter de cette date puis à chaque échéance annuelle ultérieure à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 12 mai 2015, 7 août 2015 et 4 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les SCI La Carbonnière et La Carbonnière II demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la commune de La Calmette et de la SAT ;
3°) de mettre à la charge de la commune de La Calmette et de la SAT la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code général des impôts ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la SCI La Carbonnière et de la SCI La Carbonnière II et à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de la commune de La Calmette et de la société d'aménagement des territoires (SAT) ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le conseil municipal de La Calmette ayant décidé, par une délibération du 3 octobre 2003, de créer la zone d'aménagement concerté (ZAC) du " petit verger ", il a autorisé le maire, par une délibération du 1er octobre 2004, à conclure avec les constructeurs, en application de l'article L. 311-4 du code de l'urbanisme, des conventions de participation au coût de réalisation des équipements publics destinés à satisfaire les besoins des futurs habitants ou des usagers des constructions à édifier dans la zone. La SCI La Carbonnière a obtenu, par un arrêté du maire de La Calmette du 11 juillet 2006, un permis de construire pour la reconstruction à l'identique, dans cette zone, d'un local commercial sinistré pour une SHON de 2 468 m2, puis, par un arrêté du 13 juillet 2006, un permis modificatif en vue de l'extension du bâtiment à construire pour une SHON supplémentaire de 1 434 m2. Une première puis une seconde convention ont été conclues, le 8 août 2005 puis le 13 juillet 2006, entre la commune de La Calmette, la société SENIM, qui a été chargée des études et de la réalisation de la ZAC, et la SCI La Carbonnière fixant le montant de la participation due pour la réalisation de l'extension ainsi autorisée. Par un arrêté du 8 décembre 2006, l'autorisation de construire une SHON totale de 3 902 m2 a été transférée à la SCI La Carbonnière II. La SCI La Carbonnière et la SCI La Carbonnière II se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 20 mars 2015 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit à l'appel de la commune de La Calmette et de la société d'aménagement des territoires (SAT), venue aux droits de la SENIM, contre le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 7 décembre 2012, les a condamnées solidairement au paiement des sommes de 82 559,65 euros et de 92 421,68 euros, outre les intérêts, au titre de cette participation.
2. Aux termes de l'article 1585 C du code général des impôts, dans sa version applicable au présent litige : " Sont exclues du champ d'application de la taxe locale d'équipement : / (...) 2° Les constructions édifiées dans les zones d'aménagement concerté au sens de l'article L. 311-1, premier alinéa, du code de l'urbanisme lorsque le coût des équipements, dont la liste est fixée par un décret en Conseil d'Etat, a été mis à la charge des constructeurs. (...) ". Aux termes de l'article 317 quater de l'annexe II au même code, dans sa version applicable au litige : " Dans les zones d'aménagement concerté, l'exclusion de la taxe locale d'équipement prévue au 2° du I de l'article 1585 C du code général des impôts est subordonnée à la condition que soit pris en charge par les constructeurs au moins le coût des équipements ci-après : / 1° Dans le cas des zones d'aménagement concerté autres que de rénovation urbaine : / a) Les voies intérieures à la zone qui n'assurent pas la circulation de secteur à secteur ainsi que les réseaux non concédés qui leur sont rattachés ; / b) Les espaces verts, aires de jeux et promenades correspondant aux seuls besoins des habitants ou des usagers de chaque secteur ; / c) Les aires de stationnement correspondant aux seuls besoins des habitants ou des usagers de chaque secteur (...) ". Aux termes de l'article L. 311-4 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au litige : " Il ne peut être mis à la charge des constructeurs que le coût des équipements publics à réaliser pour répondre aux besoins des futurs habitants ou usagers des constructions à édifier dans la zone (...)/Lorsqu'une construction est édifiée sur un terrain n'ayant pas fait l'objet d'une cession, location ou concession d'usage consentie par l'aménageur de la zone, une convention conclue entre la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale et le constructeur précise les conditions dans lesquelles celui-ci participe au coût d'équipement de la zone. La convention constitue une pièce obligatoire du dossier de permis de construire ou de lotir ".
3. Il résulte de ces dispositions que si les coûts qui ne se rattachent pas à la réalisation des équipements publics destinés à satisfaire les besoins des futurs habitants ou des usagers des constructions à édifier dans la zone ne peuvent être mis à la charge des constructeurs, c'est sans erreur de droit que la cour administrative d'appel de Marseille, qui a relevé qu'ils avaient été inclus dans l'assiette des coûts mis à la charge des constructeurs par une délibération du 1er octobre 2014, a jugé que les frais d'études et les frais financiers pouvaient être mis à la charge du constructeur, en application de l'article L. 311-4 du code de l'urbanisme précité. En jugeant qu'il ne résultait pas de l'instruction que ces frais n'auraient pas été engagés spécifiquement pour la réalisation des équipements de la ZAC, elle n'a commis aucune erreur de droit dans la dévolution de la charge de la preuve. Elle n'a pas davantage entaché son arrêt, qui est suffisamment motivé sur ce point, d'une inexacte qualification juridique des faits.
4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'article 5 de la convention du 13 juillet 2006 mentionnée au point 1 stipule qu'en cas de transfert de permis de construire, les obligations résultant de la convention seront transférées de plein droit au bénéficiaire de ce transfert. Il prévoit également que le " constructeur ", signataire de la convention, sera tenu solidairement avec ses successeurs au paiement des fractions de participation non encore effectué à la date de l'acte de transfert du permis de construire. Contrairement à ce qui est soutenu, c'est sans erreur de droit, ni insuffisance de motivation que la cour administrative d'appel a, en application des stipulations de la convention du 13 juillet 2006, condamné solidairement la SCI La Carbonnière et la SCI La Carbonnière II à verser à la commune de La Calmette et à la SAT les sommes dues au titre de la participation prévue par cette convention, alors même que, ainsi qu'elle l'a relevé, les permis de construire délivrés à la SCI La Carbonnière ont été transférés à la SCI La Carbonnière II.
5. Aux termes de l'article L. 332-30 du code de l'urbanisme : " Les taxes et contributions de toute nature qui sont obtenues ou imposées en violation des dispositions des articles L. 311-4 et L. 332-6 sont réputées sans cause ". Contrairement à ce qui est soutenu, c'est sans dénaturer les faits qui lui étaient soumis ni commettre d'erreur de droit ou d'erreur de qualification juridique que la cour administrative d'appel a jugé que la circonstance que le permis de construire transféré à la SCI La Carbonnière II portait, pour partie, sur la reconstruction d'un bâtiment à usage commercial déjà raccordé aux réseaux et détruit à l'occasion d'un sinistre ne conduisait pas à regarder la convention du 13 juillet 2006 comme dépourvue de cause. Par ailleurs, le moyen tiré de ce que l'extension des droits à construire opérée par le permis modificatif du 13 juillet 2006 ne pouvait justifier une augmentation de la participation, qui est soulevé pour la première fois en cassation, ne peut, en tout état de cause, être accueilli.
6. Il résulte des dispositions précitées de l'article 1585 C du code général des impôts et 317 quater de l'annexe II au même code que les constructions soumises à la participation prévue par l'article L. 311-4 du code de l'urbanisme sont exclues du champ d'application de la taxe locale d'équipement. Ce non-cumul n'a pas pour effet qu'un constructeur qui se trouverait, à tort, assujetti à la taxe locale d'équipement est exonéré de la participation prévue par l'article L. 311-4 du code de l'urbanisme. La cour administrative d'appel n'a donc entaché son arrêt ni d'erreur de droit, ni d'insuffisance de motivation en jugeant que la circonstance que le bénéficiaire du permis de construire aurait été assujetti à la taxe locale d'équipement était sans incidence sur l'exigibilité de la participation prévue par l'article L. 311-4 du code de l'urbanisme.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI La Carbonnière et à la SCI La Carbonnière II ne sont pas fondées à demander l'annulation de l'arrêt qu'elles attaquent. Leur pourvoi doit donc être rejeté y compris leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à leur charge conjointe la somme globale de 3 000 euros que la commune de La Calmette et la SAT demandent au titre de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la SCI La Carbonnière et à la SCI La Carbonnière II est rejeté.
Article 2 : La SCI La Carbonnière et la SCI La Carbonnière II verseront conjointement la somme globale de 3 000 euros à la commune de La Calmette et à la société d'aménagement des territoires au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCI La Carbonnière, à la SCI La Carbonnière II, à la commune de La Calmette et à la société d'aménagement des territoires.