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11/07/2016 | FRANCE | N°375748

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 11 juillet 2016, 375748


Vu la procédure suivante :

M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2005 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 090480 du 7 juin 2011, le tribunal a rejeté leur demande.

Faisant droit à l'appel formé par M. et Mme A...contre ce jugement, la cour administrative d'appel de Paris, par un arrêt n° 11PA033256 du 20 décembre 2013, a annulé ce jugement et décharg

M. et Mme A...de l'ensemble des impositions en litige.

Par un pourvoi et un ...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2005 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 090480 du 7 juin 2011, le tribunal a rejeté leur demande.

Faisant droit à l'appel formé par M. et Mme A...contre ce jugement, la cour administrative d'appel de Paris, par un arrêt n° 11PA033256 du 20 décembre 2013, a annulé ce jugement et déchargé M. et Mme A...de l'ensemble des impositions en litige.

Par un pourvoi et un nouveau mémoire, enregistrés les 24 février et 24 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Timothée Paris, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de M. et Mme B...A...;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SARL Dara, dont M. et Mme A... détiennent chacun 50 % du capital social, a, le 28 décembre 1993, souscrit un emprunt d'un montant de 657 817 euros aux fins d'acquérir un bien immobilier. L'établissement bancaire auprès duquel cet emprunt a été contracté a, le 12 mars 2001, cédé la créance qu'il détenait sur la SARL Dara à une société de droit américain, pour un prix de 304 898 euros. M. et Mme A...ont alors acquis cette créance, le 9 septembre 2005, d'une valeur nominale qui s'élevait désormais à 806 760 euros, pour un prix de 305 000 euros. Le 1er octobre 2005, ont, en conséquence, été enregistrées dans la comptabilité de la SARL Dara, d'une part, une écriture de débit du compte ouvert au nom de la société de droit américain et, d'autre part, une écriture de crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. et Mme A..., pour un montant correspondant à la valeur nominale de la créance. Lors d'une assemblée générale extraordinaire des associés de la SARL, qui s'est tenue le 21 octobre 2005, M. et Mme A... ont décidé d'augmenter le capital social de la SARL Dara, pour un montant de 763 902,55 euros, par compensation avec leur compte courant, puis de réduire le capital de la société, à concurrence de la somme de 756 525 euros, pour apurer ses dettes, par diminution de la valeur nominale des titres, ramenant ainsi le montant du capital social à la somme de 15 000 euros. A l'issue de la vérification de la comptabilité sociale de la SARL Dara, l'administration fiscale a estimé que l'inscription, au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. et MmeA..., de la créance qu'ils avaient acquise, avait pour contrepartie la disparition de la créance née du prêt bancaire initialement contracté par la société. Elle en a déduit que la différence entre la valeur nominale et la valeur d'acquisition de la créance revêtait la nature d'une prime de remboursement, au sens du II de l'article 238 septies A du code général des impôts, et, par conséquent, d'un revenu imposable en application de l'article 124 du même code. Les impositions litigieuses procèdent, en droits et majorations, de cette rectification.

2. Aux termes de l'article 124 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus au sens du présent article, lorsqu'ils ne figurent pas dans les recettes provenant de l'exercice d'une profession industrielle, commerciale, artisanale ou agricole, ou d'une exploitation minière, les intérêts, arrérages, primes de remboursement et tous autres produits : / 1° Des créances hypothécaires, privilégiées et chirographaires, à l'exclusion de celles représentées par des obligations, effets publics et autres titres d'emprunts négociables entrant dans les prévisions des articles 118 à 123 (...) ". Aux termes de l'article 238 septies A du même code : " (...) II. Constitue une prime de remboursement : / 1. Pour les emprunts négociables visés à l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, et les titres de créances négociables visés à l'article 124 B émis à compter du 1er janvier 1992, la différence entre les sommes ou valeurs à recevoir et celles versées lors de l'acquisition ; toutefois, n'entrent pas dans la définition de la prime les intérêts versés chaque année et restant à recevoir après l'acquisition ; / 2. Pour les emprunts ou titres de même nature démembrés à compter du 1er juin 1991, la différence entre les sommes ou valeurs à recevoir et le prix d'acquisition du droit au paiement du principal, d'intérêts ou de toute autre rémunération de l'emprunt, ou du titre représentatif de l'un de ces droits. / Les dispositions du présent II sont applicables à un emprunt qui fait l'objet d'émissions successives et d'une cotation en bourse unique si une partie de cet emprunt a été émise après le 1er janvier 1992. / III. (...) Les dispositions du II sont applicables à tous les contrats mentionnés à l'article 124 qui sont conclus ou démembrés à compter du 1er janvier 1993 (...) ".

3. Pour prononcer la décharge des impositions qui étaient en litige devant elle, la cour administrative d'appel de Paris s'est fondée sur ce que l'inscription de la somme de 806 760 euros au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. et Mme A...dans la SARL Dara avait seulement eu pour effet de conduire à substituer les intéressés, en qualité de créanciers de cette SARL, à la société de droit américain auprès de laquelle ils avaient initialement acquis la créance. Elle en a déduit que cette inscription n'avait pas donné lieu au dénouement d'une opération de prêt qui aurait été susceptible de faire apparaître une prime de remboursement et qu'il n'existait par suite aucun revenu imposable. Toutefois, dès lors que M. et Mme A...ont utilisé la créance inscrite au crédit de leur compte courant d'associé pour procéder à une augmentation du capital de la société, ils doivent être regardés comme ayant eu, à la date de cette augmentation, la disposition effective des sommes correspondantes. Cette circonstance a conduit au dénouement de l'opération de prêt, faisant apparaître une prime de remboursement. Il suit de là que la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit et que le ministre est fondé à en demander l'annulation.

4. Il y a lieu de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Ainsi qu'il a été dit au point 3, dès lors que la créance inscrite au crédit du compte courant d'associé de M. et Mme A...dans la SARL Dara a été utilisée par les intéressés pour procéder à une augmentation de capital, ils doivent être regardés comme ayant eu la libre disposition de la somme correspondante. Cette circonstance a conduit au dénouement de l'opération de prêt. Il s'ensuit que l'administration fiscale a pu à bon droit estimer que la différence entre le montant de la créance utilisé et la valeur initiale d'achat de celle-ci constituait une prime de remboursement imposable.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 7 juin 2011, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent par conséquent être rejetées.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 20 décembre 2013 est annulé.

Article 2 : L'appel de M. et Mme A...devant la cour administrative d'appel de Paris ainsi que leurs conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre des finances et des comptes publics et à M. et Mme B...A....


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 375748
Date de la décision : 11/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 2016, n° 375748
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Timothée Paris
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:375748.20160711
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