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27/06/2016 | FRANCE | N°393672

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 27 juin 2016, 393672


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association Choeurs de fondeurs a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 23 décembre 2009 par laquelle le ministre chargé du travail a rejeté sa demande tendant à l'inscription de l'établissement de la société Metaleurop puis Metaleurop Nord situé à Noyelles-Godault (Pas-de-Calais) sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Par un jugement n° 1001259 du 4 juillet 20

12, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association Choeurs de fondeurs a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 23 décembre 2009 par laquelle le ministre chargé du travail a rejeté sa demande tendant à l'inscription de l'établissement de la société Metaleurop puis Metaleurop Nord situé à Noyelles-Godault (Pas-de-Calais) sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Par un jugement n° 1001259 du 4 juillet 2012, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12DA01348 du 13 mai 2013, la cour administrative d'appel de Douai, à la demande de l'association Choeurs de fondeurs, a annulé ce jugement et la décision attaquée et a enjoint au ministre chargé du travail de procéder à l'inscription de l'établissement de la société Metaleurop puis Metaleurop Nord situé à Noyelles-Godault sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour la période allant du 1er janvier 1962 au 31 décembre 1996.

Par un arrêt n° 13DA01318 du 21 juillet 2015, la cour administrative d'appel de Douai a :

- admis la tierce opposition formée par la société anonyme Recylex contre l'arrêt du 13 mai 2013 ;

- déclaré cet arrêt non avenu en tant qu'il a fixé la date du 31 décembre 1996 comme terme de la période d'inscription de l'établissement de Noyelles-Godault sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;

- enjoint au ministre chargé du travail de procéder dans le délai de deux mois à la modification de l'arrêté du 5 novembre 2013 ayant inscrit l'établissement de Noyelles-Godault sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour fixer le terme de la période d'inscription au 31 décembre 1989 ;

- rejeté le surplus des conclusions de la société anonyme Recylex.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 septembre 2015 et 29 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société anonyme Recylex demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 21 juillet 2015 en tant qu'il a partiellement rejeté les conclusions de sa tierce opposition ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à celles de ses conclusions qui ont été rejetées par la cour administrative d'appel ;

3°) de mettre à la charge de l'association Choeurs de fondeurs la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;

- la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Florence Marguerite, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Jean Lessi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de la SA Recylex, et à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de l'association Choeurs de fondeurs ;

Considérant ce qui suit :

1. Les anciens salariés de la société Metaleurop Nord, filiale de la société Metaleurop, devenue société anonyme Recylex, réunis dans l'association " Choeurs de fondeurs ", ont demandé l'inscription de l'établissement de traitement de minerais situé à Noyelles-Godault sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Par décision du 25 juin 2003, confirmée par une décision du 23 août 2004 prise sur le recours gracieux de l'association, le ministre chargé du travail a rejeté cette demande. A la suite d'une nouvelle demande de cette association le 19 décembre 2008, le ministre chargé du travail a, une nouvelle fois, refusé l'inscription sollicitée par une décision du 23 décembre 2009. Par un jugement du 4 juillet 2012, le tribunal administratif de Lille a rejeté la requête formée par l'association Choeurs de fondeurs à l'encontre de cette décision. Par un arrêt du 13 mai 2013, la cour administrative de Douai a fait droit à l'appel de l'association Choeurs de fondeurs formé contre ce jugement, a annulé la décision du 23 décembre 2009 et a enjoint au ministre chargé du travail de procéder à l'inscription de l'établissement sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour la période allant du 1er janvier 1962 au 31 décembre 1996. Toutefois, par l'arrêt attaqué du 21 juillet 2015, statuant sur la tierce opposition de la société anonyme Recylex, la cour administrative d'appel de Douai a déclaré son arrêt du 13 mai 2013 non avenu en tant qu'il a fixé la date du 31 décembre 1996 comme terme de l'inscription sur la liste précitée et a enjoint au ministre chargé du travail de modifier le terme de l'inscription en retenant la date du 31 décembre 1989. La société anonyme Recylex se pourvoit en cassation contre cet arrêt du 21 juillet 2015 en tant qu'il a partiellement rejeté les conclusions de sa tierce opposition. Par la voie du pourvoi incident, l'association Choeurs de fondeurs demande l'annulation de cet arrêt en tant qu'il a fixé le terme de la période d'inscription sur la liste précitée au 31 décembre 1989.

Sur le pourvoi de la société anonyme Recylex :

2. Aux termes du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999, dans sa rédaction applicable à la date des décisions des 25 juin 2003 et 23 août 2004 : " Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : / 1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante (...) ". A la date de la décision du 23 décembre 2009, le 1° du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 avait été complété par la phrase suivante, issue de l'article 119 de la loi du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007: " L'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage à l'amiante de l'établissement doit présenter un caractère significatif ". Il ressort des travaux parlementaires ayant précédé l'adoption de ces dispositions que le législateur, en complétant sur ce point l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, a seulement entendu confirmer l'interprétation donnée de la loi par le Conseil d'Etat statuant au contentieux dans plusieurs décisions rendues à compter du 4 décembre 2002. Par suite, l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions ne peut être regardée comme un changement dans les circonstances de droit.

3. Dès lors, la cour administrative d'appel de Douai a commis une erreur de droit en jugeant que la modification de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 par l'article 119 de la loi du 21 décembre 2006 constituait une circonstance de droit nouvelle, ce dont elle a déduit que la décision du 23 décembre 2009 ne pouvait être regardée comme confirmative de celle du 23 août 2004 et qu'ainsi, la société anonyme Recylex n'était pas fondée à soutenir que la requête tendant à son annulation était irrecevable.

4. Il résulte de ce qui précède que la société anonyme Recylex est fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai en tant qu'il se prononce sur l'inscription de l'établissement de la société Metaleurop puis Metaleurop Nord situé à Noyelles-Godault sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour la période allant de 1962 à 1989. Le moyen retenu suffisant à entraîner cette annulation, il n'est pas nécessaire de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi.

Sur le pourvoi incident de l'association Choeurs de fondeurs :

5. Il résulte des dispositions du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 citées au point 2 que peuvent seuls être légalement inscrits sur la liste qu'elles prévoient les établissements dans lesquels les opérations de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de calorifugeage ou de flocage à l'amiante ont, compte tenu notamment de leur fréquence et de la proportion de salariés qui y ont été affectés, représenté sur la période en cause une part significative de l'activité de ces établissements.

6. Après avoir constaté que les matériaux amiantés utilisés à des fins de calorifugeage dans l'établissement de Noyelles-Godault avaient été progressivement remplacés par des produits de substitution, la cour a pu estimer, au terme d'une appréciation souveraine exempte de dénaturation, qu'à partir de 1990, l'utilisation de matériaux amiantés avait très fortement diminué et les opérations de calorifugeage à l'amiante ne pouvaient être regardées comme représentant une part significative de l'activité de l'établissement.

7. Par suite, le pourvoi incident de l'association Choeurs de fondeurs doit être rejeté.

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société anonyme Recylex au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font par ailleurs obstacle à ce qu'une somme soit mise au même titre à la charge de cette société.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative de Douai du 21 juillet 2015 est annulé en tant qu'il se prononce sur l'inscription de l'établissement de la société Metaleurop puis Metaleurop Nord situé à Noyelles-Godault sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour la période allant de 1962 à 1989.

Article 2 : Le pourvoi incident de l'association Choeurs de fondeurs est rejeté.

Article 3 : L'affaire est renvoyée, dans la mesure de la cassation prononcée, à la cour administrative d'appel de Douai.

Article 4 : Les conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme Recylex, à l'association Choeurs de fondeurs et à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 393672
Date de la décision : 27/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2016, n° 393672
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Florence Marguerite
Rapporteur public ?: M. Jean Lessi
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR ; SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN, COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:393672.20160627
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