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17/06/2016 | FRANCE | N°391534

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 17 juin 2016, 391534


Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 22 août 2014 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'admission au bénéfice de l'asile.

Par une décision n° 14033258 du 20 mars 2015, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande.

Par un pourvoi enregistré le 6 juillet 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat d'annuler cette décision n° 14033258 du 20 mars 2015 de l

a Cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la co...

Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 22 août 2014 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'admission au bénéfice de l'asile.

Par une décision n° 14033258 du 20 mars 2015, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande.

Par un pourvoi enregistré le 6 juillet 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat d'annuler cette décision n° 14033258 du 20 mars 2015 de la Cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative aux réfugiés ;

- la directive 2004 / 83/CE du Conseil du 29 avril 2004 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Villette, auditeur,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de M. A...B...;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du 2° du paragraphe A de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951, la qualité de réfugié est reconnue à : " toute personne qui (...), craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ". Aux termes de l'article 10, paragraphe 1 d) de la directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004 : " Un groupe est considéré comme un certain groupe social lorsque, en particulier : / - ses membres partagent (...) une caractéristique ou une croyance à ce point essentielle pour l'identité ou la conscience qu'il ne devrait pas être exigé d'une personne qu'elle y renonce, et / - ce groupe a son identité propre dans le pays en question parce qu'il est perçu comme étant différent par la société environnante. / En fonction des conditions qui prévalent dans le pays d'origine, un groupe social spécifique peut être un groupe dont les membres ont pour caractéristique commune une orientation sexuelle. ".

2. Un groupe social est, au sens de ces dispositions, constitué de personnes partageant un caractère inné, une histoire commune ou une caractéristique essentielle à leur identité et à leur conscience, auxquels il ne peut leur être demandé de renoncer, et une identité propre perçue comme étant différente par la société environnante ou par les institutions. En fonction des conditions qui prévalent dans un pays, des personnes peuvent, à raison de leur orientation sexuelle, constituer un groupe social au sens de ces dispositions. Il convient dès lors, dans l'hypothèse où une personne sollicite le bénéfice du statut de réfugié à raison de son orientation sexuelle, d'apprécier si les conditions existant dans le pays dont elle a la nationalité permettent d'assimiler les personnes se revendiquant de la même orientation sexuelle à un groupe social du fait du regard que portent sur ces personnes la société environnante ou les institutions et dont les membres peuvent craindre avec raison d'être persécutés du fait même de leur appartenance à ce groupe.

3. M.B..., ressortissant nigérian, a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 22 août 2014 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté la demande d'admission au bénéfice de l'asile qu'il a formulée par crainte d'être persécuté par les autorités nigérianes en raison de son orientation sexuelle. Pour rejeter le recours de M.B..., la Cour a estimé que son homosexualité n'était pas établie et que " les pièces du dossier et les déclarations insuffisamment précises du requérant ne conduisent pas à considérer comme constants les motifs de persécution invoqués ". Il ressort toutefois des pièces du dossier soumis à la Cour, que corroborent toutes les déclarations, claires et cohérentes, du requérant faites devant l'OFPRA comme devant la cour, que l'orientation sexuelle alléguée par M. B...expliquait, contrairement aux appréciations de la cour qui les avait jugées peu convaincantes, le comportement qu'il a eu tant avec sa femme qu'avec son ami de jeunesse ou avec John Odigie. En outre, il ressortait clairement des pièces du dossier soumis à la cour que la dissimulation qu'il avait entretenue découlait des pressions familiales qu'il avait subies et du regard très réprobateur posé par la société nigériane sur l'homosexualité. Dans ces conditions, eu égard à la cohérence des déclarations suffisamment circonstanciées du requérant, en rapport avec les risques allégués, la Cour, en jugeant que les motifs de persécution qu'il invoquait n'étaient pas constants, a entaché sa décision de dénaturation des pièces du dossier.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, que M. B...est fondé à demander l'annulation de la décision attaquée.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la Cour nationale du droit d'asile du 20 mars 2015 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 391534
Date de la décision : 17/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 jui. 2016, n° 391534
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Vincent Villette
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:391534.20160617
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