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13/06/2016 | FRANCE | N°384789

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 13 juin 2016, 384789


Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 2000 à 2002 et des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0900140 du 15 janvier 2013, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13NC00448 du 25 juillet 2014, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par M. B...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregist

rés les 25 septembre et 26 décembre 2014 et le 28 août 2015 au secrétariat du content...

Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 2000 à 2002 et des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0900140 du 15 janvier 2013, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13NC00448 du 25 juillet 2014, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par M. B...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 25 septembre et 26 décembre 2014 et le 28 août 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale ;

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Timothée Paris, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. B...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'un examen contradictoire de la situation personnelle de M.B..., joueur de football professionnel, l'administration a rapporté au revenu imposable de celui-ci au titre de l'année 2000, dans la catégorie des traitements et salaires, une somme de 2 millions de francs correspondant à plusieurs versements effectués par son agent sur un compte bancaire ouvert en Suisse à son nom et à celui de son épouse, à l'occasion de son transfert du Football Club de Sion au Racing Club de Strasbourg ; que, par un jugement du 15 janvier 2013, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. B...tendant à la décharge des impositions et des pénalités résultant de cette rectification ; que M. B...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 25 juillet 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel qu'il avait formé contre ce jugement ;

2. Considérant, en premier lieu, que, pour rejeter l'appel de M.B..., la cour a estimé, en ce qui concerne les droits, qu'eu égard aux circonstances de fait rappelées dans son arrêt, l'administration établissait que la somme versée au contribuable avait le caractère de revenus imposables dans la catégorie des traitements et salaires ; qu'en ce qui concerne les pénalités, elle a jugé que l'intéressé avait sciemment omis, dans ses déclarations de revenus, de mentionner cette somme créditée sur un compte bancaire ouvert en Suisse à son nom ; qu'elle a ainsi répondu à l'argumentation invoquée devant elle, tirée de ce que la somme litigieuse avait été versée à l'insu de M. B...et n'a, dès lors, pas entaché son arrêt d'insuffisance de motivation ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'en jugeant, par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif, que la proposition de rectification adressée à M. B...exposait de manière suffisante les motifs pour lesquels la somme en litige avait été regardée comme relevant de la catégorie des traitements et salaires, et en en déduisant que cette proposition de rectification était suffisamment motivée au regard des exigences qui résultent de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, la cour administrative d'appel, qui n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis, n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit ;

4. Considérant, en troisième lieu, que la réservé émise par la Suisse à l'application de l'article 2 de la convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale, en vertu de laquelle la Suisse se réserve le droit de n'accorder l'entraide judiciaire prévue par la convention qu'à la condition que les résultats des investigations faites en Suisse et les renseignements contenus dans les documents ou dossiers transmis soient utilisés exclusivement pour instruire et juger les infractions à raison desquelles l'entraide est fournie, n'est invocable qu'entre les Etats parties à cette convention ; que, dès lors qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier qui lui était soumis que la Suisse avait fait valoir cette réserve à l'occasion de la transmission à l'autorité judiciaire des documents sur le fondement desquels l'administration fiscale, après les avoir obtenus dans l'exercice de son droit de communication, a établi l'imposition de M.B..., la cour pouvait, sans erreur de droit, d'une part, en tout état de cause, juger que la procédure d'imposition n'était pas entachée d'irrégularité et, d'autre part, que M. B...ne pouvait utilement se prévaloir de cette réserve ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes des dispositions alors en vigueur de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales : " Même si les délais de reprise prévus à l'article L. 169 sont écoulés, les omissions ou insuffisances d'imposition révélées par une instance devant les tribunaux ou par une réclamation contentieuse peuvent être réparées par l'administration des impôts jusqu'à la fin de l'année suivant celle de la décision qui a clos l'instance et au plus tard jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due " ; qu'après avoir relevé, par des appréciations souveraines exemptes de dénaturation, que l'administration fiscale ne disposait pas d'éléments suffisants lui permettant, par la mise en oeuvre des procédures d'investigation dont elle dispose, avant l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, d'établir les omissions et insuffisances d'imposition reprochées à M.B..., la cour a pu, sans erreur de droit, en déduire que ces omissions et insuffisances avaient été révélées par l'instance ouverte devant le tribunal de grande instance de Strasbourg et que l'administration pouvait dès lors bénéficier du délai de reprise dérogatoire alors prévu par ces dispositions ;

6. Considérant, en cinquième lieu, qu'en jugeant qu'une première proposition de rectification, régulièrement notifiée à M.B..., avait interrompu le délai de prescription du droit de reprise de l'administration, alors même qu'une nouvelle proposition de rectification se substituant à celle-ci a ensuite été adressée à l'intéressé, la cour n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit ;

7. Considérant, en sixième lieu, qu'en jugeant que la somme litigieuse de deux millions de francs avait été créditée, à la suite de la remise à l'encaissement de trois chèques les 24 et 28 mars 2000, sur un compte bancaire ouvert au nom de M. et Mme B...auprès d'une banque suisse, et en en déduisant que ces derniers avaient eu la disposition des sommes correspondantes au titre de l'année 2000, la cour n'a entaché son arrêt, ni de dénaturation des pièces du dossier, ni d'erreur de droit ;

8. Considérant, en septième lieu, que, pour juger que la somme de deux millions de francs versée sur le compte bancaire ouvert en Suisse au nom de M. B...devait être rattachée au futur contrat de travail conclu entre celui-ci et le Racing club de Strasbourg et était, par suite, imposable en France dans la catégorie des traitements et salaires, la cour s'est fondée sur ce que cette indemnité avait été rétrocédée à l'intéressé, à l'occasion de ce transfert, par l'agent mandaté par son futur employeur pour le recruter ; que, ce faisant, la cour, qui a caractérisé un lien de rattachement suffisant entre la somme ainsi versée et le futur contrat, alors même que ce versement n'était pas prévu par les stipulations de celui-ci, n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit ;

9. Considérant, enfin, que la cour qui, contrairement à ce que soutient M. B..., a bien recherché, d'une part, implicitement mais nécessairement, si la somme versée au crédit de son compte bancaire avait fait l'objet d'une imposition en Suisse et, d'autre part, s'il avait été le bénéficiaire effectif de cette somme, et qui n'avait pas à rechercher si le contribuable avait fait l'objet de poursuites pénales, n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant fondée l'application de la majoration de 80% pour manoeuvres frauduleuses prévue par l'article 1729 du code général des impôts ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 384789
Date de la décision : 13/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 13 jui. 2016, n° 384789
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Timothée Paris
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:384789.20160613
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