La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/06/2016 | FRANCE | N°389364

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 08 juin 2016, 389364


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 avril, 10 juillet 2015 et le 31 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération nationale des cheminots CGT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-142 du 10 février 2015 relatif au comité central du groupe public ferroviaire et aux commissions consultatives ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code

de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitu...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 avril, 10 juillet 2015 et le 31 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération nationale des cheminots CGT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-142 du 10 février 2015 relatif au comité central du groupe public ferroviaire et aux commissions consultatives ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002 ;

- le code des transports ;

- le code du travail ;

- la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 ;

- le décret n° 2014-406 du 16 avril 2014 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de la Fédération nationale des cheminots CGT ;

Une note en délibéré, enregistrée le 24 mai 2016, a été présentée par la Fédération nationale des cheminots CGT ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2101-5 du code des transports, issu de l'article premier de la loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire : " I.-Il est constitué auprès de la SNCF, par dérogation aux dispositions de l'article L. 2327-1 du code du travail relatives au comité central d'entreprise, un comité central du groupe public ferroviaire commun à la SNCF, à SNCF Réseau et à SNCF Mobilités et une commission consultative auprès de chacun de ces établissements publics lorsqu'ils sont dotés de plusieurs comités d'établissement. / A l'exception de l'article L. 2327-14-1, qui ne s'applique qu'au comité central du groupe public ferroviaire, les dispositions du code du travail relatives à la composition, à l'élection, au mandat et au fonctionnement du comité central d'entreprise mentionné à l'article L. 2327-1 du même code s'appliquent au comité central du groupe public ferroviaire et aux commissions consultatives et sont adaptées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'État. / Les attributions du comité central d'entreprise mentionné au même article L. 2327-1 sont réparties entre le comité central du groupe public ferroviaire et les commissions consultatives, selon des modalités définies par décret en Conseil d'État... " ; qu'en application de ces dispositions, a été pris le décret du 10 février 2015 relatif au comité central du groupe public ferroviaire et aux commissions consultatives, dont la Fédération nationale des cheminots CGT demande l'annulation ;

Sur la légalité externe :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 22 de la Constitution : " Les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution " ; que les ministres chargés de l'exécution d'un décret sont ceux qui ont compétence pour signer ou contresigner les mesures réglementaires ou individuelles que comporte nécessairement l'exécution des actes en cause ; que si la fédération requérante soutient que l'autorité administrative pourrait être amenée à intervenir pour décider du nombre et de la répartition des sièges au sein des établissements publics, en application de l'article L. 2327-7 du code du travail, et que le décret relatif aux attributions du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social prévoit qu'il prépare et met en oeuvre les règles relatives aux conditions de travail, à la négociation collective et aux droits des salariés, l'exécution du décret attaqué ne comporte pas de mesures que le ministre chargé du travail serait compétent pour signer ou contresigner ; que, dès lors, l'absence de contreseing du ministre chargé du travail n'entache pas d'illégalité le décret attaqué ;

Sur la légalité interne :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er du décret attaqué : " Le comité central du groupe public ferroviaire... exerce les attributions économiques dévolues au comité central d'entreprise par l'article L. 2327-2 du code du travail relatives à la marche générale des établissements publics constituant le groupe public ferroviaire et qui excèdent les limites des pouvoirs des chefs d'établissement, à l'exception des attributions confiées à titre exclusif aux commissions consultatives par l'article 2 " ; qu'aux termes de l'article 2 du même décret : " Chaque commission consultative... exerce auprès de l'établissement public concerné les attributions du comité d'entreprise mentionné à l'article L. 2322-1 du code du travail relatives à : 1° L'information sur les documents comptables et financiers de l'établissement public selon les modalités prévues à l'article L. 2323-9 du code du travail ; 2° La mise en place de l'intéressement, de la participation et de l'épargne salariale, prévus aux articles L. 2323-18, L. 3312-5, L. 3322-6 et L. 3332-3 à L. 3332-6 du code du travail au sein de l'établissement public;3° L'information et la consultation sur l'organisation et la formation professionnelle au sein de l'établissement public... " ;

4. Considérant qu'en prévoyant, conformément aux dispositions de l'article L. 2101-5 du code des transports, que certaines attributions exercées par les comités centraux d'entreprise seraient exercées par les commissions consultatives placées auprès de chaque établissement public, ces dispositions mettent en oeuvre au niveau des établissements publics, pour ces attributions, la participation des salariés à la détermination collective des conditions de travail et à la gestion de ces établissements ; qu'elles ne méconnaissent ainsi ni les dispositions du huitième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, ni les objectifs de la directive 2002/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne et tendant à l'effectivité du droit à l'information et à la consultation des travailleurs dans les entreprises ; qu'au demeurant, elles ne font pas obstacle à ce que soient fournies au comité central du groupe public ferroviaire les informations utiles à l'exercice de ses attributions économiques qui auraient pu être également adressées aux commissions consultatives ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 2327-4 du code du travail, applicables aux commissions consultatives placées auprès des établissements publics en application de l'article L. 2101-5 du code des transports, un délégué titulaire et un délégué suppléant au moins de ces commissions consultatives doivent appartenir à la catégorie des ingénieurs, chefs de service et cadres administratifs, commerciaux ou techniques assimilés sur le plan de la classification lorsqu'un ou plusieurs établissements, au sens du code du travail, constituent un collège électoral distinct pour cette catégorie en application de l'article L. 2324-11 du code du travail ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 3 du décret attaqué : " Les sièges de délégué titulaire et de délégué suppléant appartenant à la catégorie des ingénieurs, chefs de service et cadres administratifs, commerciaux ou techniques assimilés sur le plan de la classification, sont attribués, au sein de chacun des établissements publics, à l'établissement distinct dont le plus grand nombre de salariés relève de cette catégorie " ;

6. Considérant que si ces dernières dispositions permettent d'attribuer au moins un siège de délégué titulaire et de délégué suppléant de la catégorie des ingénieurs, chefs de service et cadres administratifs, commerciaux ou techniques assimilés sur le plan de la classification à l'établissement distinct dont le plus grand nombre de salariés relève de cette catégorie, elles n'affectent pas le droit de tout salarié qui appartient à cette catégorie et travaille dans un autre établissement distinct où il existe un collège électoral pour cette catégorie, en application des dispositions combinées des articles L. 2324-11 et L. 2327-4 du code du travail, de voter pour des candidats dans ce collège ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ces dispositions méconnaîtraient le principe d'égalité entre les salariés appartenant à la catégorie des ingénieurs, chefs de service et cadres administratifs, commerciaux ou techniques assimilés sur le plan de la classification en réservant l'élection des représentants de cette catégorie aux salariés d'un seul établissement distinct ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, que si, en vertu des dispositions de l'article L. 2327-12 du code du travail, les comités centraux d'entreprise sont dotés de la personnalité civile, l'article L. 2101-5 précité du code des transports permet d'adapter ces dispositions en tant que de besoin au comité central du groupe public ferroviaire et aux commissions consultatives qu'il a constitués ; qu'ainsi, en réservant la personnalité civile au seul comité central du groupe public ferroviaire, l'autorité réglementaire s'est bornée à faire usage du pouvoir d'adaptation que lui a reconnu la loi ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Fédération nationale des cheminots CGT n'est pas fondée à demander l'annulation du décret attaqué ; que ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la Fédération nationale des cheminots CGT est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Fédération nationale des cheminots CGT, au Premier ministre et à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 389364
Date de la décision : 08/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 2016, n° 389364
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: M. Xavier Domino
Avocat(s) : SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:389364.20160608
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award