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11/05/2016 | FRANCE | N°392513

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 11 mai 2016, 392513


Vu la procédure suivante :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de la décision du 25 septembre 2013 par laquelle le préfet de police a rejeté la demande de regroupement familial qu'il avait présentée concernant son épouse Mme B...D....

Par un jugement n° 1316775 du 13 mai 2014, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du préfet de police et lui a enjoint d'autoriser le regroupement familial demandé dans un délai de trois mois.

Par un arrêt n° 14PA03024 du 27 mars 2015, la cour administrative d'appel de Paris,

sur appel du préfet de police, a annulé ce jugement et rejeté la demande de prem...

Vu la procédure suivante :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de la décision du 25 septembre 2013 par laquelle le préfet de police a rejeté la demande de regroupement familial qu'il avait présentée concernant son épouse Mme B...D....

Par un jugement n° 1316775 du 13 mai 2014, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du préfet de police et lui a enjoint d'autoriser le regroupement familial demandé dans un délai de trois mois.

Par un arrêt n° 14PA03024 du 27 mars 2015, la cour administrative d'appel de Paris, sur appel du préfet de police, a annulé ce jugement et rejeté la demande de première instance.

Par un pourvoi, enregistré le 10 août 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du préfet de police ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, son avocat, sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Paul Bernard, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M. A...;

1. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que M. C... A..., ressortissant marocain, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 22 juin 2016, a demandé, le 18 octobre 2010, à ce que son épouse soit autorisée à le rejoindre en France au titre du regroupement familial ; que, par une décision du 3 août 2011, confirmée sur recours gracieux le 27 octobre 2011, le préfet de police a opposé un refus à cette demande ; que, par un jugement du 12 décembre 2012, le tribunal administratif de Paris a annulé ces décisions et enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de l'intéressé ; qu'à la suite de ce réexamen, le préfet de police a de nouveau refusé, par une décision du 25 septembre 2013, d'accorder le bénéfice du regroupement familial ; que le tribunal administratif, par un jugement du 13 mai 2014, a annulé cette nouvelle décision ; que, par un arrêt du 27 mars 2015, la cour administrative d'appel de Paris a annulé ce jugement du tribunal administratif ; que M. A...se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction résultant de la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, en vigueur à la date de la décision litigieuse : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. (...) Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale (...) " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale : " Toute personne résidant sur le territoire métropolitain (...) ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation prévue à l'article L. 541-1 et dont l'incapacité permanente est au moins égale à un pourcentage fixé par décret perçoit, dans les conditions prévues au présent titre, une allocation aux adultes handicapés (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 821-2 du même code : " L'allocation aux adultes handicapés est également versée à toute personne qui remplit l'ensemble des conditions suivantes : / 1° Son incapacité permanente, sans atteindre le pourcentage fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 821-1, est supérieure ou égale à un pourcentage fixé par décret ; / 2° La commission mentionnée à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles lui reconnaît, compte tenu de son handicap, une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, précisée par décret (...) " ; qu'aux termes de l'article D. 821-1 du même code : " Pour l'application de l'article L. 821-1, le taux d'incapacité permanente exigé pour l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés est d'au moins 80 %. / Pour l'application de l'article L. 821-2, ce taux est de 50 % (...) " ;

4. Considérant que si les dispositions des articles L. 821-1 et L. 821-2 du code de la sécurité sociale prévoient des conditions différentes pour l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés, elles n'instituent pas deux allocations distinctes ; que la loi du 20 novembre 2007, en modifiant l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a dispensé celui qui demande le bénéfice du regroupement familial de la condition tenant à l'existence de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille, dans le cas où il est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés ; que le législateur, en faisant alors référence au seul article L. 821-1, n'a pas entendu limiter le champ de la dérogation qu'il instituait aux seuls titulaires de l'allocation aux adultes handicapés qui en bénéficient au titre de l'article L. 821-1, mais a entendu viser l'ensemble des personnes titulaires de cette allocation ;

5. Considérant, par suite, qu'en jugeant, après avoir souverainement constaté que M. A...était titulaire depuis le 3 mai 2006 de l'allocation aux adultes handicapés en vertu de l'article L. 821-2 du code de la sécurité sociale, que les dispositions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne dispensaient pas l'intéressé de justifier de la condition de ressources, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que M. A...est, dès lors, fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;

6. Considérant que M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à cette société ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 27 mars 2015 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M.A..., au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 392513
Date de la décision : 11/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 mai. 2016, n° 392513
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Paul Bernard
Rapporteur public ?: Mme Béatrice Bourgeois-Machureau
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:392513.20160511
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