La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/12/2015 | FRANCE | N°366716

France | France, Conseil d'État, 9ème / 10ème ssr, 30 décembre 2015, 366716


Vu la procédure suivante :

La société Randstad a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 à 2006, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n°s 0804189, 0902145 du 5 octobre 2010, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 10VE03919 du 4 décembre 2012, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par ces sociétés contre ce jugement.

Par un

pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés res...

Vu la procédure suivante :

La société Randstad a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 à 2006, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n°s 0804189, 0902145 du 5 octobre 2010, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 10VE03919 du 4 décembre 2012, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par ces sociétés contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement les 11 mars et 11 juin 2013 et le 1er septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Randstad demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bastien Lignereux, auditeur,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de la société Randstad ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, la société Randstad, entreprise de travail temporaire, s'est vue notifier des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle au titre des années 2004 à 2006 au motif que, pour le calcul de la valeur ajoutée servant au plafonnement de la taxe professionnelle, il n'y avait pas lieu de déduire, en tant que consommations des biens et de service en provenance de tiers, les sommes qu'elle avait versées au titre de la formation professionnelle continue de ses employés permanents et intérimaires, correspondant à 1,20 % de sa masse salariale, acquittées dans le cadre de son plan de formation ; qu'elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 décembre 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 5 octobre 2010 du tribunal administratif de Montreuil rejetant ses demandes en décharge de ces cotisations supplémentaires de taxe professionnelle ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 235 ter C du code général des impôts, dans sa version alors en vigueur : " Tout employeur, à l'exception de l'Etat, des collectivités locales et de leurs établissements publics à caractère administratif, doit concourir au développement de la formation professionnelle continue en participant, chaque année, au financement des actions mentionnées à l'article L. 900-2 et à l'article L. 900-3 du code du travail " ; qu'en application des dispositions de l'article 235 ter D du même code, les entreprises de travail temporaire occupant au minimum dix salariés doivent consacrer au financement des actions définies à l'article 235 ter C un pourcentage minimal de 2 % du montant des rémunérations versées pendant l'année en cours ; que l'article L. 951-1 du code du travail, alors en vigueur, précise que pour atteindre cet objectif, les entreprises de travail temporaire doivent, d'une part, effectuer un versement au moins égal à 0,3 % des rémunérations de l'année de référence à l'organisme collecteur de la branche professionnelle agréé par l'Etat au titre du congé individuel de formation, d'autre part, effectuer un versement au moins égal à 0,5 % des rémunérations de l'année de référence à un organisme paritaire agréé au titre des contrats ou des périodes de professionnalisation et du droit individuel à la formation ; que, pour le surplus, ces entreprises peuvent notamment financer des actions mentionnées aux articles L. 900-2 et L. 900-3 du code du travail au bénéfice de leurs personnels dans le cadre d'un plan de formation ; que, lorsque les dépenses justifiées par l'employeur en application de l'article L. 951-1 sont inférieures à la participation fixée par cet article, l'article L. 951-9 du code du travail lui fait obligation d'effectuer au Trésor un versement égal à la différence constatée ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée à 3,5 % de la valeur ajoutée produite (...) II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. 2. Pour la généralité des entreprises, la production de l'exercice est égale à la différence entre : d'une part, les ventes, les travaux, les prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenues ; les travaux faits par l'entreprise elle-même ; les stocks à la fin de l'exercice ; et, d'autre part, les achats de matières et marchandises ; droits de douanes compris ; les réductions sur ventes ; les stocks au début de l'exercice. Les consommations de biens et services en provenance de tiers comprennent : les travaux, fournitures et services extérieurs, à l'exception des loyers afférents aux biens pris en crédit-bail, les frais de transports et déplacements, les frais divers de gestion " ; que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ; que, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux normes comptables, dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée ;

4. Considérant qu'il résulte du plan comptable général, auquel il revient de se référer en application des dispositions précitées, que les sommes versées au titre de la formation professionnelle continue sur le fondement de l'article 235 ter C du code général des impôts doivent être inscrites au compte 6333 " participation des employeurs à la formation professionnelle continue ", non déductible pour le calcul de la valeur ajoutée, à la double condition, d'une part, qu'elles présentent un caractère libératoire, en dispensant l'employeur de s'acquitter, à due proportion, du versement au Trésor prévu à l'article L. 951-9 du code du travail et, d'autre part, qu'il s'agisse de versements à fonds perdus ou de subventions ; que, dès lors, lorsque les sommes versées par l'entreprise comportent pour elle une contrepartie, elles constituent non une " participation des employeurs à la formation professionnelle continue " mais une charge liée à une fourniture de service extérieur et par suite déductible pour le calcul de la valeur ajoutée, alors même qu'elles présentent un caractère libératoire de la participation des employeurs à la formation professionnelle continue ; que, par suite, en jugeant que les sommes versées par la société requérante au titre de la formation professionnelle continue de ses employés, correspondant à 1,20 % de sa masse salariale, acquittées dans le cadre de son plan de formation, ne pouvaient, pour le calcul de la valeur ajoutée servant au plafonnement de la taxe professionnelle, être assimilées au paiement d'une prestation de service au motif de leur caractère libératoire d'une imposition, alors qu'elles constituaient la contrepartie directe d'un service de formation de ses salariés qui lui était rendu, déductible en vertu des normes comptables, la cour a commis une erreur de droit ; qu'il suit de là, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que la société requérante est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros à verser à la société Randstad au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 4 décembre 2012 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 500 euros à la société Randstad au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Randstad et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème / 10ème ssr
Numéro d'arrêt : 366716
Date de la décision : 30/12/2015
Type d'affaire : Administrative

Analyses

19-03-04-05 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES. TAXE PROFESSIONNELLE. QUESTIONS RELATIVES AU PLAFONNEMENT. - CALCUL DE LA VALEUR AJOUTÉE AU SENS DE L'ARTICLE 1647 B SEXIES DU CGI - DÉPENSES DE FORMATION CONTINUE DES EMPLOYÉS D'UNE SOCIÉTÉ - CHARGE DÉDUCTIBLE POUR LE CALCUL DE LA VALEUR AJOUTÉE, Y COMPRIS SI LA DÉPENSE PRÉSENTE UN CARACTÈRE LIBÉRATOIRE DE LA PARTICIPATION DES EMPLOYEUR À LA FORMATION PROFESSIONNELLE CONTINUE.

19-03-04-05 Il résulte du plan comptable général, auquel il revient de se référer pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à une catégorie prise en compte pour le cacul de la valeur ajoutée au sens de l'article 1647 B sexies du code général des impôts (CGI) [RJ1], que les sommes versées au titre de la formation professionnelle continue sur le fondement de l'article 235 ter C du même code doivent être inscrites au compte 6333 participation des employeurs à la formation professionnelle continue , non déductible pour le calcul de la valeur ajoutée, à la double condition, d'une part, qu'elles présentent un caractère libératoire, en dispensant l'employeur de s'acquitter, à due proportion, du versement au Trésor prévu à l'article L. 951-9 du code du travail et, d'autre part, qu'il s'agisse de versements à fonds perdus ou de subventions. Dès lors, lorsque les sommes versées par l'entreprise comportent pour elle une contrepartie, comme en l'espèce les dépenses acquittées pour la formation professionnelle continue des employés de la société, elles constituent non une participation des employeurs à la formation professionnelle continue mais une charge liée à une fourniture de service extérieur et par suite déductible pour le calcul de la valeur ajoutée, alors même qu'elles présentent un caractère libératoire de la participation des employeurs à la formation professionnelle continue.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 4 août 2006, Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie c/ Société foncière Ariane, n°267150, T. p. 831.


Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2015, n° 366716
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bastien Lignereux
Rapporteur public ?: M. Frédéric Aladjidi
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:366716.20151230
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award