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19/06/2015 | FRANCE | N°386716

France | France, Conseil d'État, 2ème / 7ème ssr, 19 juin 2015, 386716


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et deux mémoires complémentaires, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 26 décembre 2014, 26 janvier 2015 et 11 février 2015, M. B...A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret en date du 10 octobre 2014 par lequel le Premier ministre a accordé son extradition aux autorités russes ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros à Me Delamarre, son avocat, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de just

ice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du d...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et deux mémoires complémentaires, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 26 décembre 2014, 26 janvier 2015 et 11 février 2015, M. B...A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret en date du 10 octobre 2014 par lequel le Premier ministre a accordé son extradition aux autorités russes ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros à Me Delamarre, son avocat, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;

- la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 ;

- le code pénal ;

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Delamarre, avocat de M. A...;

1. Considérant que, par le décret attaqué du 10 octobre 2014, le Premier ministre a accordé aux autorités de la Fédération de Russie l'extradition de M.A..., ressortissant russe, aux fins d'exécution d'un jugement du tribunal de Frunzensky de la ville de Saint-Pétersbourg, rendu le 28 février 2008, le condamnant par défaut à la peine de six ans d'emprisonnement pour des faits de lésions corporelles intentionnelles graves ayant eu pour conséquence d'entraîner par imprudence la mort de la victime ;

2. Considérant que le décret attaqué comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'il satisfait ainsi à l'exigence de motivation prévue par l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 : " 1. La requête sera formulée par écrit et présentée par la voie diplomatique (...) / 2- Il sera produit à l'appui de la requête : / a) L'original ou l'expédition authentique soit d'une décision de condamnation exécutoire, soit d'un mandat d'arrêt ou de tout autre acte ayant la même force, délivré dans les formes prescrites par la loi de la Partie requérante ; / b) Un exposé des faits pour lesquels l'extradition est demandée. Le temps et le lieu de leur perpétration, leur qualification légale et les références aux dispositions légales qui leur sont applicables seront indiqués le plus exactement possible ; et / c) Une copie des dispositions légales applicables ou, si cela n'est pas possible, une déclaration sur le droit applicable, ainsi que le signalement aussi précis que possible de l'individu réclamé et tous autres renseignements de nature à déterminer son identité et sa nationalité " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'extradition était accompagnée de toutes les pièces requises par les stipulations de l'article 12 de la convention européenne d'extradition ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le décret attaqué aurait fait droit à une demande d'extradition sans disposer des éléments que l'Etat requérant devait présenter aux autorités françaises en vertu de ces stipulations doit être écarté ;

5. Considérant que, si M. A...soutient qu'en cas d'exécution du décret attaqué, il risque d'être exposé à des traitements inhumains ou dégradants en raison du régime de détention en " colonie correctionnelle de régime rigoureux ", il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de leur demande d'extradition, les autorités russes se sont notamment engagées à ce que celui-ci soit détenu dans un établissement respectant les prescriptions découlant de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que des règles pénitentiaires européennes concernant le traitement des détenus et ne soit pas soumis à des travaux physiques non consentis, à ce qu'un agent des services consulaires français puisse lui rendre visite pour s'assurer du respect des garanties qui assortissent cette demande et à ce qu'il ne soit pas soumis à la torture ou à des traitements contraires aux exigences de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations tant de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que de l'article 3 de la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 doit être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation du décret du 10 octobre 2014 accordant son extradition aux autorités de la Fédération de Russie ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Me Delamarre, avocat de M. A..., demande sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à la garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 2ème / 7ème ssr
Numéro d'arrêt : 386716
Date de la décision : 19/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2015, n° 386716
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: M. Xavier Domino
Avocat(s) : DELAMARRE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:386716.20150619
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