Vu la procédure suivante :
L'association " Société Protectrice des Animaux " (SPA) d'Aix-en-Provence a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre la décision du 19 décembre 2014 par laquelle le maire de la commune d'Aix-en-Provence a résilié pour faute le contrat de délégation de service public relatif à la gestion de la fourrière et du refuge animalier du Réaltor signé le 23 décembre 2013 et d'enjoindre à la commune la reprise immédiate des relations contractuelles.
Par une ordonnance n° 1500328 du 16 février 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a suspendu cette décision de résiliation.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 2 et 18 mars et le 22 mai 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune d'Aix-en-Provence demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de mettre à la charge de la SPA le versement de la somme de 4 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Stéphane Bouchard, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Haas, avocat de la commune d'Aix-en-Provence, et à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de l'association " Société Protectrice des Animaux " d'Aix-en-Provence ;
1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. " ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le 23 décembre 2013, la commune d'Aix-en-Provence a conclu avec une association locale, l'association " Société Protectrice des Animaux " (SPA) d'Aix-en-Provence, une convention de délégation de service public relative à la gestion d'une fourrière et d'un refuge pour animaux, pour une durée de sept ans à compter du 1er janvier 2014 ; que par une décision du 19 décembre 2014, le maire de la commune a résilié ce contrat pour faute ; qu'après avoir contesté devant le juge du contrat la validité de cette décision de résiliation, l'association a également saisi le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'une demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision de résiliation et à la reprise provisoire des relations contractuelles ; que la commune d'Aix-en-Provence se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 16 février 2015 ayant fait droit à cette demande ;
3. Considérant qu'une partie à un contrat administratif peut, eu égard à la portée d'une telle mesure d'exécution, former devant le juge du contrat un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles ; que de telles conclusions peuvent être assorties d'une demande tendant, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, à la suspension de l'exécution de la résiliation, afin que les relations contractuelles soient provisoirement reprises ; qu'il incombe alors au juge des référés saisi sur ce fondement, en premier lieu, après avoir vérifié que l'exécution du contrat n'est pas devenue sans objet, de prendre en compte, pour apprécier la condition d'urgence, d'une part les atteintes graves et immédiates que la résiliation litigieuse est susceptible de porter à un intérêt public ou aux intérêts du requérant, notamment à la situation financière de ce dernier ou à l'exercice même de son activité, d'autre part l'intérêt général ou l'intérêt de tiers, notamment du titulaire d'un nouveau contrat dont la conclusion aurait été rendue nécessaire par la résiliation litigieuse, qui peut s'attacher à l'exécution immédiate de la mesure de résiliation ; qu'en second lieu, pour déterminer si un moyen est propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la validité de la mesure de résiliation litigieuse et à justifier en conséquence qu'il soit fait droit à la reprise des relations contractuelles, il incombe au juge des référés d'apprécier si, en l'état de l'instruction, les vices invoqués paraissent d'une gravité suffisante pour conduire à une telle reprise ;
4. Considérant que, pour suspendre la décision du 19 décembre 2014 par laquelle le maire de la commune d'Aix-en-Provence a résilié pour faute la délégation de service public conclue avec l'association, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, après avoir estimé que la condition d'urgence était remplie, s'est borné à rechercher si les vices invoqués par l'association requérante contre cette décision de résiliation étaient de nature à créer un doute sérieux quant à sa légalité, sans vérifier si ces vices paraissaient d'une gravité suffisante pour conduire à la reprise provisoire des relations contractuelles ; qu'il a, de la sorte, entaché son ordonnance d'une erreur de droit ; que par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'ordonnance attaquée doit être annulée ;
5. Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'association requérante, dont l'objet est local, a essentiellement comme ressources financières celles provenant de l'exploitation de la fourrière et du refuge pour animaux déléguée par la commune d'Aix-en-Provence ; que la résiliation de cette délégation de service public est ainsi susceptible de porter une atteinte grave et immédiate à sa situation financière ainsi que de menacer sa pérennité ; que d'autre part, le service public en cause est désormais assuré en régie par la commune ; que dans l'attente de la passation d'un nouveau contrat, une reprise immédiate des relations contractuelles n'est ainsi pas susceptible de porter atteinte aux droits de tiers ;
7. Considérant en second lieu, qu'en l'état de l'instruction, il apparaît que le mauvais fonctionnement des installations en cause, imputé à l'association, résulte en réalité d'un défaut de conception du bâtiment mis à sa disposition par la commune ; que les moyens invoqués par l'association à l'encontre de la résiliation, tiré de ce que les fautes invoquées par la commune seraient infondées et que la mesure litigieuse serait en réalité guidée par d'autres motifs que ceux affichés sont de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la validité de la mesure de résiliation prononcée et doivent être regardés comme étant d'une gravité suffisante pour conduire à la reprise provisoire des relations contractuelles ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision de résiliation en date du 19 décembre 2014 et la reprise des relations contractuelles ;
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'association SPA qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence la somme de 4 500 euros à verser à l'association SPA d'Aix-en-Provence au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative pour la procédure suivie devant le tribunal administratif de Marseille et le Conseil d'Etat ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 16 février 2015 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est annulée.
Article 2 : La décision du 19 décembre 2014 par laquelle le maire de la commune d'Aix-en-Provence a résilié pour faute le contrat de délégation de service public relatif à la gestion de la fourrière et du refuge animalier du Réaltor signé le 23 décembre 2013 est suspendue. Il est ordonné à la commune d'Aix-en-Provence de reprendre les relations contractuelles avec l'association " Société protectrice des animaux " à titre provisoire.
Article 3 : La commune d'Aix-en-Provence versera à l'association Société Protectrice des Animaux d'Aix-en-Provence une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune d'Aix-en-Provence tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune d'Aix-en-Provence et à l'association " Société Protectrice des Animaux " d'Aix-en-Provence.