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17/06/2015 | FRANCE | N°369100

France | France, Conseil d'État, 9ème / 10ème ssr, 17 juin 2015, 369100


Vu la procédure suivante :

La société Printing Pack BV a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 et des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0705074 du 28 juin 2012, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12LY02215 du 16 avril 2013, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par la société Printing Pack BV contre ce jugement.
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Vu la procédure suivante :

La société Printing Pack BV a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 et des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0705074 du 28 juin 2012, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12LY02215 du 16 avril 2013, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par la société Printing Pack BV contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 juin 2013, 5 septembre 2013 et 18 mai 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Printing Pack BV demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'État les dépens, notamment la somme de 35 euros correspondant à la contribution pour l'aide juridique.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Matt, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de la société Printing Pack BV ;

1. Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel " ; qu'en vertu de l'article 259 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le lieu des prestations de services est réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle " ; qu'aux termes de l'article 259 B de ce code, dans sa rédaction alors applicable : " Par dérogation aux dispositions de l'article 259, le lieu des prestations suivantes est réputé se situer en France lorsqu'elles sont effectuées par un prestataire établi hors de France et lorsque le preneur est un assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée qui a en France le siège de son activité ou un établissement stable pour lequel le service est rendu ou, à défaut, qui y a son domicile ou sa résidence habituelle : / 1° Cessions et concessions de droits d'auteurs, de brevets, de droits de licences, de marques de fabrique et de commerce et d'autres droits similaires (...) / Le lieu de ces prestations est réputé ne pas se situer en France même si le prestataire est établi en France lorsque le preneur est établi hors de la Communauté européenne ou qu'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée dans un autre État membre de la Communauté (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, qui résultent de la transposition en droit interne de l'article 9 de la directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, il convient, comme la Cour de justice des Communautés européennes l'a jugé notamment dans ses arrêts Berkholz du 4 juillet 1985 (C-168/84, points 17 et 18) et ARO Lease BV du 17 juillet 1997 (C-190/95, points 15 et 16), de déterminer le point de rattachement des services rendus afin d'établir le lieu des prestations de services ; que l'endroit où le prestataire a établi le siège de son activité économique apparaît comme un point de rattachement prioritaire, la prise en considération d'un autre établissement à partir duquel la prestation de services est rendue ne présentant un intérêt que dans le cas où le rattachement au siège ne conduit pas à une solution rationnelle du point de vue fiscal ou crée un conflit avec un autre État membre ; qu'un établissement ne peut être utilement regardé, par dérogation au critère prioritaire du siège, comme lieu des prestations de services d'un assujetti, que s'il présente un degré suffisant de permanence et une structure apte, du point de vue de l'équipement humain et technique, à rendre possibles, de manière autonome, les prestations de services considérées ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Printing Pack BV, dont le siège est aux Pays-Bas, gère et exploite des brevets et droits de la propriété industrielle dont elle a sous-concédé l'exploitation à la SA LPG, située à Valence (Drôme) ; que des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis à sa charge au titre des redevances d'exploitation qui lui ont été versées par la SA LPG pour la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 ;

3. Considérant qu'après avoir estimé que la société Printing Pack BV disposait d'un établissement stable dans les locaux de la SA LPG, caractérisé par la disposition personnelle et permanente d'une installation comportant les moyens humains et techniques nécessaires à son activité d'exploitation de brevets, la cour a jugé que l'administration était pour ce seul motif fondée à rattacher les prestations de services en cause à cet établissement stable, sans rechercher si, compte tenu des principes rappelés au point 1 ci-dessus, il y avait lieu, ainsi que le soutenait la société devant elle par un moyen auquel elle n'a pas répondu, de les rattacher à son siège social ; qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que l'arrêt attaqué est entaché d'insuffisance de motivation et d'erreur de droit et doit, pour ces motifs, être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme globale de 3 500 euros à verser à la société Printing Pack BV au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article R. 761-1 du même code relatif au remboursement de la contribution pour l'aide juridique ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 16 avril 2013 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.

Article 3 : L'État versera une somme de 3 500 euros à la société Printing Pack BV au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Printing Pack BV et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème / 10ème ssr
Numéro d'arrêt : 369100
Date de la décision : 17/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - RÈGLES APPLICABLES - FISCALITÉ - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE - PRESTATIONS DE SERVICES - DÉTERMINATION DU POINT DE RATTACHEMENT DES SERVICES RENDUS - CRITÈRE PRIORITAIRE - SIÈGE DU PRESTATAIRE - CRITÈRE SUBSIDIAIRE - AUTRE ÉTABLISSEMENT SUFFISAMMENT PERMANENT ET AUTONOME - CONDITIONS POUR RECOURIR AU CRITÈRE SUBSIDIAIRE [RJ1].

15-05-11-01 Pour l'application des articles 259 et 259 B du code général des impôts (CGI), qui résultent de la transposition en droit interne de l'article 9 de la directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, il convient de déterminer le point de rattachement des services rendus afin d'établir le lieu des prestations de services. L'endroit où le prestataire a établi le siège de son activité économique apparaît comme un point de rattachement prioritaire, la prise en considération d'un autre établissement à partir duquel la prestation de services est rendue ne présentant un intérêt que dans le cas où le rattachement au siège ne conduit pas à une solution rationnelle du point de vue fiscal ou crée un conflit avec un autre État membre. Un établissement ne peut être utilement regardé, par dérogation au critère prioritaire du siège, comme lieu des prestations de services d'un assujetti, que s'il présente un degré suffisant de permanence et une structure apte, du point de vue de l'équipement humain et technique, à rendre possibles, de manière autonome, les prestations de services considérées.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILÉES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE - PERSONNES ET OPÉRATIONS TAXABLES - TERRITORIALITÉ - PRESTATIONS DE SERVICES - DÉTERMINATION DU POINT DE RATTACHEMENT DES SERVICES RENDUS - CRITÈRE PRIORITAIRE - SIÈGE DU PRESTATAIRE - CRITÈRE SUBSIDIAIRE - AUTRE ÉTABLISSEMENT SUFFISAMMENT PERMANENT ET AUTONOME - CONDITIONS POUR RECOURIR AU CRITÈRE SUBSIDIAIRE [RJ1].

19-06-02-01-02 Pour l'application des articles 259 et 259 B du code général des impôts (CGI), qui résultent de la transposition en droit interne de l'article 9 de la directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, il convient de déterminer le point de rattachement des services rendus afin d'établir le lieu des prestations de services. L'endroit où le prestataire a établi le siège de son activité économique apparaît comme un point de rattachement prioritaire, la prise en considération d'un autre établissement à partir duquel la prestation de services est rendue ne présentant un intérêt que dans le cas où le rattachement au siège ne conduit pas à une solution rationnelle du point de vue fiscal ou crée un conflit avec un autre État membre. Un établissement ne peut être utilement regardé, par dérogation au critère prioritaire du siège, comme lieu des prestations de services d'un assujetti, que s'il présente un degré suffisant de permanence et une structure apte, du point de vue de l'équipement humain et technique, à rendre possibles, de manière autonome, les prestations de services considérées.


Références :

[RJ1]

Cf. CJCE, 4 juillet 1985, Berkholz, aff. C-168/84 (points 17 et 18) ;

CJCE, 17 juillet 1997, ARO Lease BV, aff. C-190/95 (points 15 et 16).


Publications
Proposition de citation : CE, 17 jui. 2015, n° 369100
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Luc Matt
Rapporteur public ?: M. Frédéric Aladjidi
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:369100.20150617
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