Vu la procédure suivante :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 10 février 2011 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement pour motif économique ainsi que la décision du 24 août 2011 du ministre du travail, de l'emploi et de la santé rejetant son recours contre cette décision. Par un jugement n° 1106147 du 17 avril 2013, le tribunal administratif de Lille a annulé ces décisions.
Par un arrêt n° 13DA00938 du 29 avril 2014, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel formé contre ce jugement par la société SCA Hygiene Products Supply.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 juin et 30 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société SCA Hygiene Products Supply demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Pauline Pannier, auditeur,
- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de la société SCA Hygiene Products Supply et à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de M. B...;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société SCA Hygiene Products Supply, qui appartient au groupe international SCA et fabriquait des produits d'hygiène personnelle sur le site de Linselles (Nord), a décidé de cesser son activité ; que la société a demandé à l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier M. B..., représentant syndical au comité d'établissement et représentant syndical au comité central d'entreprise de l'unité économique et sociale, autorisation qui a été accordée par une décision du 10 février 2011 ; que le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a rejeté le recours de M. B...dirigé contre cette décision par une décision du 24 août 2011 ; que sur recours de M.B..., le tribunal administratif de Lille a annulé les décisions du 10 février et du 24 août 2011 par un jugement du 17 avril 2013 ; que la société SCA Hygiene Products Supply se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 29 avril 2014 de la cour administrative d'appel de Douai qui a rejeté sa requête contre ce jugement ;
2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié ;
3. Considérant qu'à ce titre, lorsque la demande d'autorisation de licenciement pour motif économique est fondée sur la cessation d'activité de l'entreprise, il appartient à l'autorité administrative de contrôler que cette cessation d'activité est totale et définitive ; qu'il ne lui appartient pas, en revanche, de contrôler si cette cessation d'activité est justifiée par l'existence de mutations technologiques, de difficultés économiques ou de menaces pesant sur la compétitivité de l'entreprise ; qu'il incombe ainsi à l'autorité administrative de tenir compte, à la date à laquelle elle se prononce, de tous les éléments de droit ou de fait recueillis lors de son enquête qui sont susceptibles de remettre en cause le caractère total et définitif de la cessation d'activité ; qu'il lui incombe également de tenir compte de toute autre circonstance qui serait de nature à faire obstacle au licenciement envisagé, notamment celle tenant à une reprise, même partielle, de l'activité de l'entreprise impliquant un transfert du contrat de travail du salarié à un nouvel employeur en application de l'article L. 1224-1 du code du travail ; que, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, la seule circonstance que d'autres entreprises du groupe aient poursuivi une activité de même nature ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que la cessation d'activité de l'entreprise soit regardée comme totale et définitive ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en se fondant, pour rejeter l'appel de la société SCA Hygiene Products Supply, sur le fait que l'activité de cette société ne pouvait être regardée comme ayant cessé dès lors que d'autres sociétés du groupe SCA poursuivaient une activité de même nature, la cour a commis une erreur de droit ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;
5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société SCA Hygiene Products Supply, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 29 avril 2014 de la cour administrative d'appel de Douai est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Douai.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à SCA Hygiene Products Supply et à M. A...B....
Copie en sera adressée pour information au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.