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04/05/2015 | FRANCE | N°380470

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 04 mai 2015, 380470


Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 février 2013 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement n° 1301507 du 24 juin 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13LY02579 du 20 mars 2014, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de MmeA..., rejeté sa requête tendant, d'une

part, à l'annulation du jugement et d'autre part, à l'annulation de l'arrêté d...

Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 février 2013 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement n° 1301507 du 24 juin 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13LY02579 du 20 mars 2014, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de MmeA..., rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement et d'autre part, à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Drôme et à ce que soit enjoint au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour "vie privée et familiale" dans un délai de 30 jours à compter de la notification de l'arrêt et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les deux jours suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 mai et 20 août 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de Mme A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MmeA..., de nationalité algérienne, est entrée en France le 10 février 2001 sous couvert d'un visa de court séjour ; qu'elle a, en 2011, sollicité la délivrance d'un certificat de résidence au titre des paragraphes 1° et 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que le préfet de la Drôme a, le 28 décembre 2011, rejeté sa demande ; que, par arrêté du 28 février 2013, il a refusé la délivrance du titre de séjour que Mme A...avait à nouveau sollicité en se prévalant de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, saisi par l'intéressée d'une demande tendant à l'annulation de cet arrêté, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté celle-ci par jugement du 24 juin 2013 ; que Mme A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 20 mars 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle avait formée contre ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " ...Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit :/ 1° au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans .../ 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédents ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de son refus... " ;

3. Considérant que, dans le cas où un texte prévoit l'attribution d'un avantage sans avoir défini l'ensemble des conditions permettant de déterminer à qui l'attribuer parmi ceux qui sont en droit d'y prétendre, l'autorité compétente peut, alors qu'elle ne dispose pas en la matière du pouvoir réglementaire, encadrer l'action de l'administration, dans le but d'en assurer la cohérence, en déterminant, par la voie de lignes directrices, sans édicter aucune condition nouvelle, des critères permettant de mettre en oeuvre le texte en cause, sous réserve de motifs d'intérêt général conduisant à y déroger et de l'appréciation particulière de chaque situation ; que, dans ce cas, la personne en droit de prétendre à l'avantage en cause peut se prévaloir, devant le juge administratif, de telles lignes directrices si elles ont été publiées ; qu'en revanche, il en va autrement dans le cas où l'administration peut légalement accorder une mesure de faveur au bénéfice de laquelle l'intéressé ne peut faire valoir aucun droit ; que s'il est loisible, dans ce dernier cas, à l'autorité compétente de définir des orientations générales pour l'octroi de ce type de mesures, l'intéressé ne saurait se prévaloir de telles orientations à l'appui d'un recours formé devant le juge administratif ;

4. Considérant qu'en dehors des cas où il satisfait aux conditions fixées par la loi ou par un engagement international pour la délivrance d'un titre de séjour, un étranger ne saurait se prévaloir d'un droit à l'obtention d'un tel titre ; que, si les règles régissant la délivrance des titres de séjour n'imposent pas au préfet, sauf disposition spéciale contraire, de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui ne remplit pas les conditions auxquelles est subordonné le droit d'obtenir ce titre, la faculté pour le préfet de prendre, à titre gracieux et exceptionnel, une mesure favorable à l'intéressé pour régulariser sa situation relève de son pouvoir d'appréciation de l'ensemble des circonstances de l'espèce ; qu'il est loisible au ministre de l'intérieur, chargé de mettre en oeuvre la politique du Gouvernement en matière d'immigration et d'asile, alors même qu'il ne dispose en la matière d'aucune compétence réglementaire, d'énoncer des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir de prendre des mesures de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation ; que c'est toutefois au préfet qu'il revient, dans l'exercice du pouvoir dont il dispose, d'apprécier dans chaque cas particulier, compte tenu de l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de l'étranger, l'opportunité de prendre une mesure de régularisation favorable à l'intéressé ;

5. Considérant que si un étranger peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision préfectorale refusant de régulariser sa situation par la délivrance d'un titre de séjour, soutenir que, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, la décision du préfet serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, il ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu, dans le cadre de la politique du Gouvernement en matière d'immigration, adresser aux préfets, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation de chaque cas particulier, pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;

6. Considérant, par suite, qu'en jugeant que Mme A...ne pouvait utilement se prévaloir des énonciations de la circulaire du 28 novembre 2012 et notamment de celles relatives à l'examen des demandes d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants étrangers en situation irrégulière, la cour administrative d'appel de Lyon, qui a suffisamment motivé sa décision, n'a pas dénaturé les pièces du dossier et n'a pas commis d'erreur de droit ;

7. Considérant qu'en jugeant que Mme A...ne produisait pas de pièces suffisantes pour établir sa présence sur le territoire national entre le mois de mai 2002 et le mois d'octobre 2006, la cour administrative d'appel de Lyon s'est livrée, sans erreur de droit, à une appréciation souveraine des éléments produits, exempte de dénaturation ;

8. Considérant, enfin, que pour estimer que le refus de délivrer à Mme A...un titre de séjour n'avait pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris et n'avait pas méconnu les stipulations précitées du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, la cour administrative d'appel de Lyon s'est fondée sur un ensemble d'éléments dont le fait que l'intéressée a vécu jusqu'à l'âge de 37 ans en Algérie où résident ses parents ainsi que la quasi-totalité de ses frères et soeurs et la circonstance que si elle est mariée à un ressortissant algérien vivant en France en situation régulière, le couple n'a pas d'enfant ; qu'en statuant ainsi, la cour n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce et n'a pas commis d'erreur de droit ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme A...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 380470
Date de la décision : 04/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 04 mai. 2015, n° 380470
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: Mme Béatrice Bourgeois-Machureau
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN, COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:380470.20150504
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