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16/03/2015 | FRANCE | N°371465

France | France, Conseil d'État, 1ère / 6ème ssr, 16 mars 2015, 371465


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société des cliniques Colmoulins et François 1er SA, devenu l'Hôpital privé de l'Estuaire, a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 9 décembre 2009, notifiée le 20 décembre 2009, par laquelle la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation de Haute-Normandie a prononcé à l'encontre de la Clinique du Petit Colmoulins une sanction financière d'un montant de 124 250 euros. Par un jugement n° 1000565 du 4 septembre 2012, le tribuna

l administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12DA01609 du 13 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société des cliniques Colmoulins et François 1er SA, devenu l'Hôpital privé de l'Estuaire, a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 9 décembre 2009, notifiée le 20 décembre 2009, par laquelle la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation de Haute-Normandie a prononcé à l'encontre de la Clinique du Petit Colmoulins une sanction financière d'un montant de 124 250 euros. Par un jugement n° 1000565 du 4 septembre 2012, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12DA01609 du 13 juin 2013, la cour administrative d'appel de Douai a, à la demande de l'Hôpital privé de l'Estuaire, d'une part, annulé ce jugement du tribunal administratif de Rouen du 4 septembre 2012 ainsi que la décision de la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation de Haute-Normandie du 20 décembre 2009 et, d'autre part, enjoint à l'Etat de mettre en oeuvre les procédures nécessaires en vue du remboursement du montant de la sanction à cet hôpital.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 août 2013 et 28 mai 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des affaires sociales et de la santé demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 13 juin 2013 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de l'Hôpital privé de l'Estuaire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yannick Faure, auditeur,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, avocat de la Hôpital privé de l'Estuaire ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 3 mars 2015, présentée par le ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse : " Les établissements de santé sont passibles, après qu'ils ont été mis en demeure de présenter leurs observations, d'une sanction financière en cas de manquement aux règles de facturation fixées en application des dispositions de l'article L. 162-22-6, d'erreur de codage ou d'absence de réalisation d'une prestation facturée. / Cette sanction est prise par la commission exécutive mentionnée à l'article L. 6115-2 du code de la santé publique, à la suite d'un contrôle réalisé sur pièces et sur place par les médecins inspecteurs de santé publique ou les praticiens-conseils des organismes d'assurance maladie mentionnés au sixième alinéa de l'article L. 1112-1 du même code en application du programme de contrôle régional établi par ladite commission. Elle est notifiée à l'établissement. / Son montant est fonction du pourcentage des sommes indûment perçues par rapport aux sommes dues (...) " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la Clinique du Petit Colmoulins a fait l'objet, du 12 au 21 novembre 2008, d'un contrôle externe de la tarification à l'activité, au titre des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale ; que ce contrôle, qui a notamment porté sur l'examen de dossiers relatifs à l'activité d'accueil et de traitement des urgences, a révélé l'existence de manquements aux règles de facturation dans sept dossiers ; qu'à la suite de ce contrôle, la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation de Haute-Normandie a prononcé, sur le fondement de ces mêmes dispositions, une sanction à l'encontre de cet établissement d'un montant de 124 250 euros, par une décision du 9 décembre 2009, notifiée le 20 décembre suivant ; que cette sanction a été annulée pour excès de pouvoir par l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 13 juin 2013 contre lequel le ministre des affaires sociales et de la santé se pourvoit en cassation ;

3. Considérant, en premier lieu, que l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale permet à l'organisme de prise en charge, lorsqu'un établissement n'a pas respecté les règles de tarification ou de facturation des actes, prestations, produits ou frais de transport pris en charge par l'assurance maladie, de recouvrer auprès de cet établissement, sous le contrôle du juge judiciaire, l'indu qui en est résulté ; que, toutefois, il appartient au juge administratif, saisi d'un recours tendant à l'annulation d'une sanction prise sur le fondement de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale, d'apprécier lui-même, si elle est contestée devant lui, la matérialité des manquements aux règles de facturation, des erreurs de codage et du défaut de réalisation de prestations facturées qui sont reprochés à un établissement et qui fondent la sanction prise à son encontre par la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation ; que si, par un jugement du 28 janvier 2013, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Havre avait rejeté le recours formé par l'Hôpital privé de l'Estuaire pour contester l'indu de 120 514,28 euros dont le remboursement lui était réclamé par la caisse primaire d'assurance maladie du Havre à la suite du contrôle opéré du 12 au 21 novembre 2008, ce jugement, qui au surplus n'était pas définitif, ne présentait pas d'identité d'objet, de cause et de parties avec le contentieux engagé devant le juge administratif par l'Hôpital privé de l'Estuaire, de telle sorte que l'autorité relative de la chose jugée ne pouvait être opposée à ce dernier ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que la cour aurait commis une erreur de droit en appréciant elle-même la matérialité des faits reprochés à l'établissement au lieu de se fonder sur le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du Havre pour écarter le moyen ou de surseoir à statuer jusqu'à l'issue de l'appel formé devant la cour d'appel de Rouen ;

4. Considérant, en second lieu, qu'un recours devant le juge administratif tendant à l'annulation d'une sanction prononcée à l'encontre d'un établissement de santé sur le fondement de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale, qui a le caractère d'une sanction visant à réprimer la méconnaissance des règles particulières auxquelles est soumis l'exercice d'une activité professionnelle déterminée, relève du contentieux de l'excès de pouvoir ; qu'en l'espèce, la cour administrative d'appel de Douai a estimé que la matérialité des faits imputés à l'établissement n'était pas établie dans plusieurs des dossiers retenus au titre des anomalies constatées et que la commission exécutive n'aurait pu prendre la même sanction si elle n'avait retenu l'existence de surfacturations que dans les autres dossiers litigieux ; qu'en en déduisant que la décision de sanction attaquée devait être annulée, la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, n'a pas méconnu, contrairement à ce que soutient le ministre, les règles gouvernant son office ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi du ministre des affaires sociales et de la santé doit être rejeté ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à l'Hôpital privé de l'Estuaire, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du ministre des affaires sociales et de la santé est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à l'Hôpital privé de l'Estuaire une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et à l'Hôpital privé de l'Estuaire.


Synthèse
Formation : 1ère / 6ème ssr
Numéro d'arrêt : 371465
Date de la décision : 16/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

SANTÉ PUBLIQUE - ADMINISTRATION DE LA SANTÉ - AGENCES RÉGIONALES D'HOSPITALISATION - SANCTION PRISE SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE L - 162-22-18 DU CSS - JUGE ADMINISTRATIF COMPÉTENT POUR APPRÉCIER LUI-MÊME LA MATÉRIALITÉ DES MANQUEMENTS - EXISTENCE.

61-09-01 L'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale permet à l'organisme de prise en charge, lorsqu'un établissement n'a pas respecté les règles de tarification ou de facturation des actes, prestations, produits ou frais de transport pris en charge par l'assurance maladie, de recouvrer auprès de cet établissement, sous le contrôle du juge judiciaire, l'indu qui en est résulté.... ,,Toutefois, il appartient au juge administratif, saisi d'un recours tendant à l'annulation d'une sanction prise sur le fondement de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale, d'apprécier lui-même, si elle est contestée devant lui, la matérialité des manquements aux règles de facturation, des erreurs de codage et du défaut de réalisation de prestations facturées qui sont reprochés à un établissement et qui fondent la sanction prise à son encontre par la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation.

SANTÉ PUBLIQUE - ADMINISTRATION DE LA SANTÉ - SANCTION PRISE SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE L - 162-22-18 DU CSS - JUGE ADMINISTRATIF COMPÉTENT POUR APPRÉCIER LUI-MÊME LA MATÉRIALITÉ DES MANQUEMENTS - EXISTENCE.

61-09-02-01 L'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale permet à l'organisme de prise en charge, lorsqu'un établissement n'a pas respecté les règles de tarification ou de facturation des actes, prestations, produits ou frais de transport pris en charge par l'assurance maladie, de recouvrer auprès de cet établissement, sous le contrôle du juge judiciaire, l'indu qui en est résulté.... ,,Toutefois, il appartient au juge administratif, saisi d'un recours tendant à l'annulation d'une sanction prise sur le fondement de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale, d'apprécier lui-même, si elle est contestée devant lui, la matérialité des manquements aux règles de facturation, des erreurs de codage et du défaut de réalisation de prestations facturées qui sont reprochés à un établissement et qui fondent la sanction prise à son encontre par la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation.


Publications
Proposition de citation : CE, 16 mar. 2015, n° 371465
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Yannick Faure
Rapporteur public ?: M. Rémi Decout-Paolini
Avocat(s) : SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD, POUPOT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:371465.20150316
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