Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 mars et 5 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société en participation Picard Devrière, dont le siège social est 47, rue Saint Thibault à Epernay (51200) ; la société requérante demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 11NC00214 du 5 janvier 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0200474 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 21 novembre 2006 en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er juillet 1994 au 30 juin 1996 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. François Loloum, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boullez, avocat de la société en participation Picard Devrière ;
1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de la société en participation Picard Devrière, qui fabrique et commercialise des préparations magistrales en homéopathie, l'administration a remis en cause en matière de taxe sur la valeur ajoutée le taux réduit pratiqué par la société et appliqué le taux normal à l'ensemble des ventes de la société ; que, par décision du 27 janvier 2011, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé pour erreur de droit un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 19 juin 2008 rejetant l'appel de la société tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er juillet 1994 au 30 juin 1996 ; que la société demande l'annulation de l'arrêt du 5 janvier 2012 de la même cour statuant sur renvoi et rejetant à nouveau sa requête en décharge des impositions litigieuses ;
2. Considérant, en premier lieu, que la société requérante reproche à la cour administrative d'appel d'avoir soulevé d'office, sans inviter les parties à en débattre, le moyen tiré de ce que les ordonnanciers ne comportaient pas les mentions requises par l'article R. 5198 du code de la santé publique alors que l'administration fiscale n'avait pas invoqué la méconnaissance de ce texte devant le juge d'appel ; que s'il est vrai que l'administration, qui s'est référée à cet article R. 5198 pour la première fois en cassation, s'est abstenue de produire devant la cour de renvoi un nouveau mémoire reprenant cette référence, il ressort des pièces du dossier soumis à la cour de renvoi que le litige entre les parties devant les juges du fond portait sur la question de savoir si les préparations magistrales commercialisées par la société avaient été réalisées sur prescription d'un médecin pour pouvoir bénéficier du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée et que la société se prévalait, à cet effet, devant le juge d'appel des mentions figurant dans ses ordonnanciers qu'elle prétendait elles-mêmes conformes aux dispositions de " l'article R. 5124-45 du code de la santé publique " ; qu'en mentionnant l'article R. 5198 du code de la santé publique, alors applicable, qui prévoyait notamment l'inscription du nom du médecin prescripteur dans les registres dénommés ordonnanciers, la cour s'est bornée à donner la bonne référence aux dispositions relatives à la tenue de ces ordonnanciers et à statuer sur les termes du litige tels qu'ils étaient en débat entre les parties ; que, ce faisant, elle n'a soulevé d'office aucun moyen nouveau ; que, dès lors, le moyen tiré d'une violation du caractère contradictoire de la procédure doit être écarté ;
3. Considérant, en second lieu, que, contrairement à ce que soutient la société requérante, la cour n'a pas subordonné le bénéfice du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée au respect des dispositions réglementaires du code de la santé publique relatives aux ordonnanciers mais a recherché, au vu de l'instruction, si et dans quelle mesure les préparations magistrales correspondaient à des prescriptions médicales, pour déterminer la ventilation des recettes passibles du taux réduit et de celles relevant du taux normal ; qu'ainsi, elle n'a pas commis d'erreur de droit et a porté sur la valeur probante des documents produits par les parties une appréciation souveraine, qui ne peut être discutée devant le juge de cassation en l'absence de dénaturation ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société en participation Picard Devrière n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; qu'en conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société en participation Picard Devrière est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société en participation Picard Devrière et au ministre des finances et des comptes publics.