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12/12/2014 | FRANCE | N°382603

France | France, Conseil d'État, 2ème ssjs, 12 décembre 2014, 382603


Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme M...J..., demeurant ... et M. A...G..., demeurant ... ; ils demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 1400985 du 12 juin 2014 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur protestation tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 pour l'élection des conseillers municipaux dans la commune de Sains-Richaumont (Aisne) et à déclarer M. W...Q...inéligible sur le fondement de l'article L. 11

8-4 du code électoral ;

2°) d'annuler ces opérations électorales et ...

Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme M...J..., demeurant ... et M. A...G..., demeurant ... ; ils demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 1400985 du 12 juin 2014 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur protestation tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 pour l'élection des conseillers municipaux dans la commune de Sains-Richaumont (Aisne) et à déclarer M. W...Q...inéligible sur le fondement de l'article L. 118-4 du code électoral ;

2°) d'annuler ces opérations électorales et de déclarer M. Q... inéligible ;

3°) de mettre à la charge de M. W...Q..., Mme C...V..., M. K...S..., Mme R...L..., M. N...P..., Mme T...H..., M. U...E..., MmeY..., Mme D...F..., M. B...I...et Mme O...X...le versement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Paul Bernard, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de Mme J...et de M. G...;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 en vue de l'élection du conseil municipal de la commune de Sains-Richaumont (Aisne), la liste " Pour Sains-Richaumont, l'expérience au service des habitants " conduite par le maire sortant, M.Q..., a obtenu 310 voix contre 275 voix pour la liste " Pour Sains et Richaumont, ensemble marchons ! " conduite par Mme J...; que Mme J...et l'un de ses colistiers, M.G..., relèvent appel du jugement du 12 juin 2014 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur protestation tendant à l'annulation des opérations électorales du 23 mars 2014 et à ce que M. W...Q...soit déclaré inéligible sur le fondement de l'article L. 118-4 du code électoral ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le tribunal administratif d'Amiens, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments des requérants venant au soutien des griefs de manoeuvres et pressions exercées sur les électeurs le jour des opérations électorales qu'ils avaient invoqués, n'a pas omis de répondre à un grief opérant et n'a donc pas entaché son jugement d'insuffisance de motivation ;

Sur les griefs tirés d'irrégularités commises pendant la campagne électorale :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 48-2 du code électoral : " Il est interdit à tout candidat de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n'aient pas la possibilité d'y répondre utilement avant la fin de la campagne électorale. " ; qu'aux termes de l'article L. 49 du même code : " A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de distribuer ou faire distribuer des bulletins, circulaires et autres documents. / A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est également interdit de diffuser ou de faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale. " ; que, s'il n'est pas contesté que dans la soirée du vendredi 21 mars 2014, la liste conduite par M. Q...a diffusé un tract dans les boîtes aux lettres des habitants de la commune, il résulte de l'instruction que ce tract ne comportait aucun élément nouveau de propagande et n'excédait pas les limites habituelles de la polémique électorale ; qu'ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la diffusion de ce tract aurait, dans les circonstances de l'espèce, constitué une irrégularité de nature à altérer la sincérité du scrutin ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 106 du code électoral : " Quiconque, par des dons ou libéralités en argent ou en nature, par des promesses de libéralités, de faveurs, d'emplois publics ou privés ou d'autres avantages particuliers, faits en vue d'influencer le vote d'un ou de plusieurs électeurs aura obtenu ou tenté d'obtenir leur suffrage, soit directement, soit par l'entremise d'un tiers, quiconque, par les mêmes moyens, aura déterminé ou tenté de déterminer un ou plusieurs d'entre eux à s'abstenir, sera puni de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 15 000 euros. (...) " ; que si les requérants soutiennent que le maire sortant a tenté d'exercer des pressions sur certains électeurs en faisant des promesses d'emploi ou de travaux en échange de voix, les attestations produites par les parties au cours de l'instruction ne permettent pas, en tout état de cause, d'établir l'existence de telles promesses prohibées par les dispositions précitées de l'article L. 106 du code électoral ;

Sur les griefs tirés d'irrégularités relatives aux opérations électorales du 23 mars 2014 :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 59 du code électoral : " Le scrutin est secret " ; que, par ailleurs, aux termes de l'article L. 62 du même code : " A son entrée dans la salle du scrutin, l'électeur, après avoir fait constater son identité suivant les règles et usages établis ou après avoir fait la preuve de son droit de voter par la production d'une décision du juge du tribunal d'instance ordonnant son inscription ou d'un arrêt de la Cour de cassation annulant un jugement qui aurait prononcé sa radiation, prend, lui-même, une enveloppe. / Sans quitter la salle du scrutin, il doit se rendre isolément dans la partie de la salle aménagée pour le soustraire aux regards pendant qu'il met son bulletin dans l'enveloppe ; il fait ensuite constater au président qu'il n'est porteur que d'une seule enveloppe; le président le constate sans toucher l'enveloppe, que l'électeur introduit lui-même dans l'urne. (...). " ; que si les requérants soutiennent que M. Q...et certains de ses colistiers auraient accompagné certains électeurs jusqu'aux isoloirs ou auraient préparé leur bulletin de vote, ils n'ont formulé aucune observation en ce sens dans le procès-verbal des opérations électorales et les attestations produites au cours de l'instruction émanant d'autres personnes que MmeJ..., M. G...ou leurs colistiers ne permettent pas d'établir la réalité de ces faits, ni, en tout état de cause, l'existence de pressions sur certains électeurs de nature à fausser la sincérité du scrutin ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 58 du code électoral : " Dans chaque salle de scrutin les candidats ou les mandataires de chaque liste peuvent faire déposer des bulletins de vote sur une table préparée à cet effet par les soins du maire. (...) " ; que si les requérants soutiennent qu'un compte rendu de l'action de la municipalité sortante était posé sur la table où se trouvaient les bulletins de vote et que des photographies d'un projet porté par la liste de M. Q...et autres étaient affichées dans le bureau de vote, ils n'apportent aucun élément probant au soutien de leurs allégations ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 49-1 du code électoral : " A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de procéder, par un système automatisé ou non, à l'appel téléphonique en série des électeurs afin de les inciter à voter pour un candidat. " ; que si les requérants soutiennent que M. Q...a consulté à plusieurs reprises la liste d'émargements le jour du scrutin afin de contacter des électeurs n'ayant pas encore voté, ces allégations ne sont étayées que par quatre attestations dont deux émanent de leurs colistiers ; que si elles ont donné lieu à des observations dans le procès-verbal des opérations électorales, la liste adverse a formulé la même observation à l'égard de Mme J...et de l'un de ses colistiers ; qu'en l'absence d'autres éléments probants produits au cours de l'instruction, ces faits ne peuvent être regardés comme ayant altéré, dans les circonstances de l'espèce, la sincérité du scrutin ;

8. Considérant, enfin, que la seule circonstance que le compteur de l'urne ait enregistré un nombre de votants supérieur à celui des enveloppes ne saurait être regardé comme constitutive d'une irrégularité, dès lors qu'il n'est pas contesté que le nombre d'émargements était égal au nombre de bulletins trouvés dans l'urne ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme J...et M. G...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'ils attaquent, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur protestation ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. Q...et autres qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu' il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre des mêmes dispositions par M. Q...et autres ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de Mme J...et de M. G...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. Q...et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme M...J..., à M. A...G..., à M. W...Q...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2ème ssjs
Numéro d'arrêt : 382603
Date de la décision : 12/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 12 déc. 2014, n° 382603
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Paul Bernard
Rapporteur public ?: Mme Béatrice Bourgeois-Machureau
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:382603.20141212
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