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05/11/2014 | FRANCE | N°364085

France | France, Conseil d'État, 5ème ssjs, 05 novembre 2014, 364085


Vu la requête sommaire, le mémoire complémentaire et le nouveau mémoire, enregistrés les 26 novembre 2012 et les 26 février et 18 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...D..., demeurant.Grisgione, Lot Grandinaghja à San Martino di Lota (20200), et M. C... A..., demeurant... ; M. D... et M. A... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2012 par lequel le ministre de l'intérieur a interdit le déplacement des supporters du club de football SC Bastia à l'occasion de la rencontre du samedi 29 septembre 2012

avec l'OGC Nice ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d...

Vu la requête sommaire, le mémoire complémentaire et le nouveau mémoire, enregistrés les 26 novembre 2012 et les 26 février et 18 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...D..., demeurant.Grisgione, Lot Grandinaghja à San Martino di Lota (20200), et M. C... A..., demeurant... ; M. D... et M. A... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2012 par lequel le ministre de l'intérieur a interdit le déplacement des supporters du club de football SC Bastia à l'occasion de la rencontre du samedi 29 septembre 2012 avec l'OGC Nice ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code du sport ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Manon Perrière, auditeur,

- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de M. D...et de M. A...;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 332-16-1 du code du sport : " Le ministre de l'intérieur peut, par arrêté, interdire le déplacement individuel ou collectif de personnes se prévalant de la qualité de supporter d'une équipe ou se comportant comme tel sur les lieux d'une manifestation sportive et dont la présence est susceptible d'occasionner des troubles graves pour l'ordre public. L'arrêté énonce la durée, limitée dans le temps, de la mesure, les circonstances précises de fait qui la motivent ainsi que les communes de point de départ et de destination auxquelles s'applique... " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur, estimant que l'arrêté pris le 24 septembre 2012 par le préfet des Alpes-Maritimes pour assurer la sécurité aux abords du stade de Nice, où devait se dérouler, le 29 septembre, une rencontre de football entre le SC Bastia et l'OGC Nice, ne suffisait pas pour prévenir les risques de troubles à l'ordre public, a pris le 25 septembre un arrêté interdisant, le 29 septembre entre zéro heure et minuit, le déplacement individuel ou collectif, par tout moyen, de toute personne se prévalant de la qualité de supporter du SC Bastia ou se comportant comme telle entre la Corse et la commune de Nice ; que MM. D... et A...demandent que cet arrêté soit annulé pour excès de pouvoir ;

3. Considérant que l'arrêté attaqué énonce avec précision les circonstances qui le motivent, notamment les incidents violents et récurrents constatés tant lors des rencontres de football entre l'équipe du SC Bastia et celle de l'OGC Nice qu'à l'occasion des déplacements du club du SC Bastia, les supporters de ce dernier s'étant manifestés à de multiples reprises aux abords des stades mais également dans les centres-villes des lieux de rencontre par des comportements entraînant des troubles à l'ordre public, lesquels étaient susceptibles de se reproduire dans les moyens de transport empruntés par les supporters du SC Bastia pour se rendre à Nice ; qu'ainsi, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation doit être écarté ;

4. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de l'arrêté que l'interdiction qu'il prévoit concerne les déplacements entre toute commune de la collectivité territoriale de Corse et la commune de Nice de personnes se prévalant de la qualité de supporter du SC Bastia ou se comportant comme telles ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce qu'en violation des dispositions précitées de l'article L. 332-16-1 du code du sport, du principe de sécurité juridique et de l'objectif constitutionnel de clarté et d'intelligibilité de la norme l'arrêté ne définirait pas avec précision son champ d'application ne saurait être accueilli ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'eu égard au climat d'extrême tension entre les supporters des clubs sportifs en présence ainsi qu'à la fréquence et à la gravité des heurts et troubles constatés lors des déplacements du SC Bastia, la manifestation en cause comportait des risques sérieux de troubles à l'ordre public ; qu'en estimant que les mesures prises par le préfet des Alpes-Maritimes afin d'assurer la sécurité des abords du stade où elle devait se dérouler ne suffiraient pas à prévenir ces troubles, compte tenu notamment des risques pour la sécurité des personnes sur les trajets empruntés par les supporters, le ministre de l'intérieur n'a pas commis d'erreur d'appréciation ; qu'en prenant la mesure litigieuse sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 332-16-1 du code du sport, il a apporté à la liberté d'aller et venir une restriction qui n'est pas excessive au regard des risques pour l'ordre public que cette mesure avait pour objet de prévenir ; qu'ainsi, le moyen tiré d'une atteinte illégale à cette liberté et d'une violation du droit de libre circulation garanti par l'article 2 du protocole n° 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

6. Considérant que la seule mention, dans la motivation de la décision attaquée, de renseignements recueillis par les services de police selon lesquels 500 supporters venus de Bastia devant être rejoints à Nice par " environ 300 membres de la diaspora corse du continent " ne saurait, contrairement à ce que soutiennent les requérants, faire regarder l'arrêté comme entaché d'une violation du principe d'égalité devant la loi de tous les citoyens quelle que soit leur origine ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté attaqué ;

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par MM. D... etA... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de MM. D...et A...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à MM. B...D...et C...A..., ainsi qu'au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5ème ssjs
Numéro d'arrêt : 364085
Date de la décision : 05/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 nov. 2014, n° 364085
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Manon Perrière
Rapporteur public ?: Mme Fabienne Lambolez
Avocat(s) : SCP SPINOSI, SUREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:364085.20141105
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