La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/10/2013 | FRANCE | N°356080

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 04 octobre 2013, 356080


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 janvier et 18 avril 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme A...B..., demeurant... ; Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 11221 du 24 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 24 décembre 2010 par lequel le vice-recteur de Nouvelle-Calédonie a refusé de lui accorder le bénéfice de l'indemnité d'éloignement prévue par le décret n°

96-1028 du 27 novembre 1996 et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 janvier et 18 avril 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme A...B..., demeurant... ; Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 11221 du 24 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 24 décembre 2010 par lequel le vice-recteur de Nouvelle-Calédonie a refusé de lui accorder le bénéfice de l'indemnité d'éloignement prévue par le décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996 et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui verser la première fraction de l'indemnité d'éloignement assortie d'intérêts ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 50-772 du 30 juin 1950 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 96-1026 du 26 novembre 1996 ;

Vu le décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Fabrice Benkimoun, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Delamarre, avocat de Mme A...B...;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 30 juin 1950 fixant les conditions d'attribution des soldes et indemnités des fonctionnaires civils et militaires relevant du ministère de la France d'outre-mer : " Pour faire face aux sujétions particulières inhérentes à l'exercice de la fonction publique dans les territoires d'outre-mer, les fonctionnaires civils (...) recevront : (...) / 2° Une indemnité destinée à couvrir les sujétions résultant de l'éloignement pendant le séjour et les charges afférentes au retour, accordée au personnel appelé à servir en dehors soit de la métropole, soit de son territoire, soit du pays ou territoire où il réside habituellement, qui sera déterminée pour chaque catégorie de cadres à un taux uniforme s'appliquant au traitement et majorée d'un supplément familial. Elle sera fonction de la durée du séjour et de l'éloignement et versée pour chaque séjour administratif, moitié avant le départ et moitié à l'issue du séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 27 novembre 1996 relatif à l'attribution de l'indemnité d'éloignement aux magistrats et aux fonctionnaires titulaires et stagiaires de l'Etat en service à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, le droit à l'indemnité d'éloignement " est ouvert lors de l'affectation à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna à la condition que cette affectation entraîne, pour l'agent concerné, un déplacement effectif pour aller servir en dehors du territoire dans lequel est situé le centre de ses intérêts matériels et moraux " ; qu'en vertu de l'article 3 du même décret, l'indemnité est versée par fraction, à chacune des échéances prévues au 2° de l'article 2 de la loi du 30 juin 1950 ; qu'aux termes de l'article 4 de ce décret : " Le droit à l'indemnité pour les personnels qui sont affectés sans limitation de durée (...), en Nouvelle-Calédonie, (...) n'est ouvert que pour deux périodes de deux ans. (...) / Les intéressés n'acquièrent un nouveau droit à l'indemnité pour une nouvelle affectation à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna qu'après une période de services de deux ans au moins accomplie en dehors de toute collectivité ouvrant droit au bénéfice de l'indemnité. " ; qu'enfin, aux termes de l'article 2 du décret du 26 novembre 1996 relatif à la situation des fonctionnaires de l'Etat et de certains magistrats dans les territoires d'outre-mer de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française et de Wallis-et-Futuna : " La durée de l'affectation dans les territoires d'outre-mer de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française et de Wallis-et-Futuna est limitée à deux ans. / Cette affectation peut être renouvelée une seule fois à l'issue de la première affectation. / Une affectation dans l'un des territoires d'outre-mer énumérés au premier alinéa du présent article ne peut être sollicitée qu'à l'issue d'une affectation d'une durée minimale de deux ans hors de ces territoires ou de Mayotte. (...). " ;

2. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que les agents affectés à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna pour une durée limitée, conformément à l'article 2 du décret du 26 novembre 1996, ont droit à l'indemnité d'éloignement dans les conditions fixées par les articles 2 et 3 du décret du 27 novembre 1996 ; que la condition pour l'octroi de l'indemnité d'éloignement posée au deuxième alinéa de l'article 4 du décret du 27 novembre 1996 relatif à l'attribution de cette indemnité se rapporte exclusivement aux agents mentionnés à l'alinéa précédent, c'est-à-dire à ceux qui sont affectés sans limitation de durée dans un de ces territoires ; que, par suite, en rejetant la demande d'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 24 décembre 2010 du vice-recteur de Nouvelle-Calédonie ayant refusé à Mme B...le bénéfice de l'indemnité d'éloignement, au motif que l'intéressée ne répondait pas à la condition posée par le deuxième alinéa de l'article 4 du décret du 27 novembre 1996, alors qu'il résultait de l'arrêté du 13 décembre 2010 joint aux pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B...avait été affectée pour une durée limitée de deux ans en Nouvelle-Calédonie et qu'ainsi l'article 4 du décret du 27 novembre 1996 ne lui était pas applicable, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a commis une erreur de droit ; que dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son jugement doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que MmeB..., qui avait été affectée par arrêté du 13 décembre 2010 pour aller servir deux ans en Nouvelle-Calédonie, tirait des articles 2 et 3 du décret du 27 novembre 1996 le droit de bénéficier de l'indemnité d'éloignement sans que puisse y faire obstacle la circonstance qu'elle n'aurait accompli qu'une période de service inférieure à deux ans en dehors des collectivités ouvrant droit au bénéfice de cette indemnité ; que, par suite l'article 3 de l'arrêté du 24 décembre 2010 par lequel le vice-recteur de Nouvelle-Calédonie a refusé d'accorder à Mme B...le bénéfice de l'indemnité d'éloignement doit être annulé ;

5. Considérant que l'exécution de la présente décision implique que la première fraction de l'indemnité d'éloignement soit versée à MmeB... ; qu'elle a droit aux intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 2 mars 2011, date de réception par l'administration de sa demande du 26 février 2011 tendant au versement de l'indemnité d'éloignement ; que Mme B...a demandé la capitalisation des intérêts par un mémoire enregistré le 17 juin 2011 ; que cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière ; que dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 2 mars 2012 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ; que Mme B...a droit à la capitalisation des intérêts échus à cette date, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure ;

6. Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie est annulé.

Article 2: L'article 3 de l'arrêté du 24 décembre 2010 par lequel le vice-recteur de Nouvelle-Calédonie a refusé d'accorder à Mme B...le bénéfice de l'indemnité d'éloignement est annulé.

Article 3: L'Etat versera à Mme B...la première fraction de l'indemnité d'éloignement. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 2 mars 2011. Ces intérêts seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts au 2 mars 2012 ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 4: L'Etat versera une somme de 3 000 euros à Mme B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5: La présente décision sera notifiée à Mme A... B...et au ministre de l'éducation nationale.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 356080
Date de la décision : 04/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 04 oct. 2013, n° 356080
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Fabrice Benkimoun
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : DELAMARRE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:356080.20131004
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award