La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/07/2013 | FRANCE | N°343454

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 03 juillet 2013, 343454


Vu 1°, sous le n° 343454, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 septembre et 22 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant... ; M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°/ d'annuler l'arrêt n° 08MA03539 du 8 juillet 2010 de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'elle a limité la somme que le centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de l'académie d'Aix-Marseille a été condamné à lui verser au titre des heures supplémentaires qu'il a effectuées

du 1er juillet 1986 au 15 mars 1999 ;

2°/ de mettre à la charge du CROUS ...

Vu 1°, sous le n° 343454, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 septembre et 22 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant... ; M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°/ d'annuler l'arrêt n° 08MA03539 du 8 juillet 2010 de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'elle a limité la somme que le centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de l'académie d'Aix-Marseille a été condamné à lui verser au titre des heures supplémentaires qu'il a effectuées du 1er juillet 1986 au 15 mars 1999 ;

2°/ de mettre à la charge du CROUS d'Aix-Marseille la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°, sous le n° 343474, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 septembre et 22 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B...qui reprend les conclusions et les moyens analysés sous le n° 343454 ;

....................................................................................

Vu 3°, sous le n° 343491, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 septembre et 24 décembre 2010, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CROUS d'Aix-Marseille dont le siège est 31, avenue Jules Ferry à Aix-en-Provence (13621), représenté par son directeur ; le CROUS d'Aix-Marseille demande au Conseil d'Etat :

1°/ d'annuler l'arrêt n° 08MA03539 du 8 juillet 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille l'a condamné à verser à M. B...une indemnité correspondant aux heures supplémentaires effectuées par l'intéressé sur une période allant du 1er juillet 1986 au 15 mars 1999 ;

2°/ réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le décret n° 85-1022 du 24 septembre 1985 ;

Vu le décret n° 87-155 du 5 mars 1987 ;

Vu le décret n° 94-725 du 24 août 1994 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, avocat de M. B...et à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires d'aix Marseille ;

1. Considérant que les pourvois de M. B...et du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) d'Aix-Marseille sont dirigés contre le même arrêt ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B... a été employé par le CROUS d'Aix-Marseille en qualité de veilleur de nuit contractuel du 1er juillet 1986 au 15 mars 1999 ; qu'estimant avoir accompli un nombre d'heures de travail supérieur à celui qui correspondait à ses obligations, il a demandé au CROUS, en décembre 1999, de lui verser une somme de 44 259,51 euros au titre des heures supplémentaires qu'il aurait effectuées pendant cette période ; que la directrice du CROUS ayant rejeté cette demande par une décision du 1er février 2000, M. B... a saisi le tribunal administratif de Marseille qui, par un jugement du 13 mai 2004, a accueilli sa demande et condamné le CROUS à lui verser une indemnité correspondant aux 3 352 heures supplémentaires qu'il aurait effectuées pendant cette période ; que la cour administrative d'appel de Marseille, par un arrêt du 16 janvier 2007, a annulé ce jugement et rejeté la demande de M.B... ; que, par une décision du 25 juin 2008, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour et renvoyé l'affaire devant elle ; que, statuant à nouveau par un arrêt du 8 juillet 2010, la cour a retenu la responsabilité du CROUS et l'a condamné à verser à l'intéressé une indemnité correspondant au paiement de 3 047 heures supplémentaires ; que M. B... et le CROUS d'Aix-Marseille se pourvoient en cassation contre cet arrêt ;

3. Considérant que les personnels ouvriers des CROUS, dont font partie les veilleurs de nuit, sont des agents contractuels de droit public et non des fonctionnaires ; que, dès lors, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit en se fondant, pour faire partiellement droit à la demande indemnitaire de M. B..., sur les dispositions des décrets du 24 septembre 1985 et du 24 août 1994 qui fixent la durée hebdomadaire du travail des fonctionnaires de l'Etat ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, le CROUS d'Aix-Marseille est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

4. Considérant que l'annulation prononcée ci-dessus rend sans objet les pourvois de M.B... ; que, par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer ;

5. Considérant qu'il y a lieu, par application du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M.B... :

6. Considérant que les conclusions d'appel du CROUS n'ont pas le même objet que celles sur lesquelles s'est prononcée la cour administrative d'appel de Marseille par un arrêt du 22 janvier 2001 devenu définitif ayant annulé pour excès de pouvoir une note de service de sa directrice ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée pour ce motif par M. B...ne peut qu'être écartée ;

Sur le fond :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille s'est fondé, pour faire droit à la demande de M.B..., sur les dispositions des décrets du 24 septembre 1985 et du 24 août 1994 applicables aux seuls fonctionnaires de l'Etat ; qu'il appartient toutefois au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... en première instance et en appel ;

Sur la période du 1er juillet 1986 au 18 octobre 1994 :

8. Considérant qu'en l'absence de toute disposition fixant les règles relatives au temps de travail des agents contractuels des CROUS, le directeur du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) était compétent, en vertu des pouvoirs généraux d'organisation des services placés sous son autorité, pour fixer le temps de travail applicable à ces personnels ; que cette compétence a d'ailleurs été confirmée par l'article 21 du décret du 5 mars 1987 relatif aux missions et à l'organisation des oeuvres universitaires, en vertu duquel les dispositions applicables aux personnels ouvriers des établissements " sont fixées par le directeur du centre national et approuvées par le ministre chargé de la fonction publique, le ministre chargé des universités et le ministre chargé du budget. " ;

9. Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle différemment des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier ; qu'en raison de la différence de situation entre les veilleurs de nuit et les autres personnels ouvriers des CROUS, qui travaillent de jour, le directeur du CNOUS a pu prévoir des temps de travail différents pour ces deux catégories d'agents ; qu'il résulte de l'instruction que cette différence n'est pas manifestement disproportionnée eu égard aux motifs qui la justifient ; que, dès lors, le moyen tiré de l'atteinte au principe d'égalité doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant, qui ne soutient pas avoir effectué pendant la période en cause une durée annuelle de travail supérieure à celle qui était prévue par le directeur du CNOUS, n'est pas fondé à réclamer le versement d'une indemnité correspondant aux heures supplémentaires qu'il aurait accomplies pendant cette période ;

Sur la période du 19 octobre 1994 au 15 mars 1999 :

11. Considérant que, par une circulaire du 18 octobre 1994, le directeur du CNOUS a fixé à 2 054 heures la durée annuelle de travail des veilleurs de nuit des CROUS ; qu'il a ensuite réduit cette durée à 1 935 heures par une circulaire du 3 juillet 1997 ;

12. Considérant que s'il est soutenu que les circulaires du directeur du CNOUS des 18 octobre 1994 et 3 juillet 1997 n'ont pas été soumises à la consultation préalable du comité technique paritaire central, une telle circonstance n'est pas de nature, en tout état de cause, à ouvrir droit à réparation à M.B..., dès lors que ces décisions ne sont, par ailleurs, entachées d'aucune illégalité ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B..., qui n'allègue pas avoir effectué, entre le 18 octobre 1994 et le 15 mars 1999, une durée de travail annuelle supérieure à celle qui avait été fixée par le directeur du CNOUS, n'est pas fondé à réclamer le versement d'une indemnité correspondant aux heures supplémentaires qu'il aurait effectuées pendant cette période ;

14. Considérant que si M. B...invoque également l'illégalité de plusieurs notes de service de la directrice du CROUS d'Aix-Marseille, une telle illégalité, à la supposer établie, est sans incidence sur la solution du litige dès lors qu'aucune de ces notes de service ne fixait la durée de travail à laquelle il était soumis ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a condamné le CROUS d'Aix-Marseille à verser une indemnité à M. B...au titre des heures supplémentaires que ce dernier aurait effectuées ; que, par suite, le CROUS d'Aix-Marseille est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Marseille ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge du CROUS d'Aix-Marseille qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 500 euros à verser au CROUS à ce titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 8 juillet 2010 et le jugement du tribunal administratif de Marseille du 13 mai 2004 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les pourvois n°s 343454 et 343474 présentés par M. B....

Article 4 : M. B...versera au CROUS d'Aix-Marseille une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées par M. B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. A...B..., au centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de l'académie d'Aix-Marseille et à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 343454
Date de la décision : 03/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 03 jui. 2013, n° 343454
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno Bachini
Rapporteur public ?: M. Rémi Keller
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET ; SCP MONOD, COLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:343454.20130703
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award