Vu le pourvoi, enregistré le 20 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), dont le siège est 20, avenue du Grésillé, BP 90406, à Angers Cedex 01 (49004) ; l'ADEME demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 11NC00768 du 23 avril 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0801768-0900109 du 31 mars 2011 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en tant qu'il a annulé la décision du 10 juin 2008 de son délégué régional Champagne-Ardenne rejetant la demande de la congrégation des clarisses de Cormontreuil tendant à l'octroi d'une subvention pour l'installation d'un capteur solaire alimentant le système de chauffage, d'autre part, au rejet de la demande de première instance de la congrégation ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la congrégation des clarisses de Cormontreuil la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Agnès Martinel, Maître des Requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Ricard, avocat de l'Agence de l'environnement et de la maitrise de l'énergie et à la SCP Ortscheidt, avocat de la congrégation des clarisses de Cormontreuil ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la congrégation des clarisses de Cormontreuil a demandé à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) de lui octroyer une subvention afin d'installer des capteurs solaires devant alimenter son système de chauffage ; que, par une décision du 10 juin 2008, le délégué régional Champagne-Ardenne de l'agence a rejeté cette demande ; que, par un jugement du 31 mars 2011, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé cette décision ; que l'ADEME se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 23 avril 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel qu'elle a interjeté de ce jugement ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat : " La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public " ; que l'article 2 de cette loi dispose : " La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. En conséquence, à partir du 1er janvier qui suivra la promulgation de la présente loi, seront supprimées des budgets de l'Etat, des départements et des communes, toutes dépenses relatives à l'exercice des cultes " ; qu'enfin, aux termes du dernier alinéa de l'article 19 de cette même loi, les associations formées pour subvenir aux frais, à l'entretien et à l'exercice d'un culte en vertu du titre IV de cette loi " ne pourront, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions de l'Etat, des départements et des communes. Ne sont pas considérées comme subventions les sommes allouées pour réparations aux édifices affectés au culte public, qu'ils soient ou non classés monuments historiques " ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 131-3 du code de l'environnement : " I. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie est un établissement public de l'Etat à caractère industriel et commercial. / II. Cet établissement public exerce des actions, notamment d'orientation et d'animation de la recherche, de prestation de services, d'information et d'incitation dans chacun des domaines suivants : / 1° La prévention et la lutte contre la pollution de l'air ; / (...) / 4° La réalisation d'économies d'énergie et de matières premières et le développement des énergies renouvelables, notamment d'origine végétale (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 131-6 du même code : " L'agence peut attribuer des subventions et consentir des avances remboursables. (...) " ;
4. Considérant que les dispositions précitées du code de l'environnement n'ont ni pour objet, ni pour effet, de déroger aux dispositions précitées de la loi du 9 décembre 1905 ; que, dès lors, en jugeant que, par ces dispositions, le législateur avait autorisé l'ADEME à accorder des subventions à toute personne physique ou morale, y compris à une personne ayant des activités cultuelles, sans qu'y fassent obstacle les dispositions des articles 2 et 19 de la loi du 9 décembre 1905, la cour administrative d'appel de Nancy a commis une erreur de droit ; que son arrêt doit, pour ce motif, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, être annulé ;
5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'ADEME, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par l'ADEME ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 23 avril 2012 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nancy.
Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi et les conclusions présentées par la congrégation des clarisses de Cormontreuil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise et de l'énergie et à la congrégation des clarisses de Cormontreuil.
Copie en sera adressée pour information au ministre de l'intérieur.