Vu le pourvoi du ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, enregistré le 10 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 09NT01860 du 25 mars 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement n° 0804175 du 28 mai 2009 du tribunal administratif d'Orléans et les décisions du 15 octobre 2008 du ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire et du 26 mars 2008 de l'inspecteur du travail rejetant la demande d'autorisation du transfert du contrat de travail de Mme B...A...;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la SAS DHL Express ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Hervé Guichon, Maître des Requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Celice, Blancpain, Soltner, avocat de la SAS DHL Express ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'inspecteur du travail de la subdivision de Tours a rejeté la demande de la SAS DHL Express d'autoriser, dans le cadre d'un transfert partiel de son activité, le transfert du contrat de travail de MmeA..., salariée protégée, au motif que, l'opération de transfert d'activité étant réalisée à la date à laquelle il s'est prononcé, le contrat de la salariée avait été automatiquement transféré et que, dès lors, la SAS DHL Express n'avait plus qualité pour demander l'autorisation de transfert de son contrat de travail ; que le ministre chargé des transports a rejeté le recours hiérarchique de la société ; que le ministre se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 25 mars 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, infirmant le jugement du 28 mai 2009 du tribunal administratif d'Orléans, a annulé sa décision et celle de l'inspecteur du travail ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1224-1 du code du travail : " Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. " ; que, par le seul effet de ces dispositions, les contrats de travail des salariés compris dans un transfert partiel d'entreprise sont, en principe, transférés de plein droit au nouvel employeur à la date du transfert d'activité ;
3. Considérant, toutefois, qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; qu'à l'effet de concourir à la mise en oeuvre de la protection ainsi instituée, l'article L. 2414-1 de ce code prévoit que le transfert d'un salarié protégé compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement par application de l'article L. 1224-1 " ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ", lequel doit s'assurer, conformément aux dispositions de l'article L. 2421-9 du même code, que le salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en cas de transfert partiel d'activité d'une société, celle-ci doit être regardée comme restant l'employeur d'un salarié protégé tant que l'inspecteur du travail n'a pas délivré l'autorisation de transfert requise, et qu'une demande d'autorisation d'un tel transfert ne peut donc être légalement rejetée au seul motif que la société n'a plus qualité pour demander une autorisation ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient le ministre, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que l'administration ne pouvait, au seul motif que la SAS DHL Express n'aurait plus qualité pour demander l'autorisation de transférer le contrat de travail de MmeA..., refuser d'examiner sa demande ; que, dès lors, le ministre n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à la SAS DHL Express au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à la SAS DHL Express au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, à la SAS DHL Express et à Mme B...A....