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22/04/2013 | FRANCE | N°349212

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 22 avril 2013, 349212


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 mai et 10 août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant au... ; M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09LY01613 du 17 mars 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son appel contre le jugement n° 0800633 du 23 avril 2009 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 février 2008 du préfet du Puy-de-Dôme lui refusant l'autorisation d'exploiter

des terres d'une superficie de 28 hectares 52 ares 95 centiares située...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 mai et 10 août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant au... ; M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09LY01613 du 17 mars 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son appel contre le jugement n° 0800633 du 23 avril 2009 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 février 2008 du préfet du Puy-de-Dôme lui refusant l'autorisation d'exploiter des terres d'une superficie de 28 hectares 52 ares 95 centiares situées sur le territoire des communes de Romagnat, Le Crest et Chanonat ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Jacoupy, avocat de M.B...,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Jacoupy, avocat de M.B... ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...a demandé le 14 septembre 2007 au préfet du Puy-de-Dôme l'autorisation d'exploiter des terres agricoles situées sur le territoire des communes de Romagnat, Le Crest et Chanonat ; qu'il a été informé par une lettre du 22 novembre 2007 que le délai d'instruction de cette demande était porté de quatre à six mois afin de permettre à la commission départementale d'orientation de l'agriculture d'examiner des demandes concurrentes portant sur les mêmes terres ; qu'au vu de l'avis émis par cette commission le 22 janvier 2008, le préfet du Puy-de-Dôme a rejeté la demande de M. B...par un arrêté du 5 février 2008, au motif que les demandes concurrentes de la sienne étaient prioritaires au regard des dispositions du schéma directeur départemental des structures agricoles ; que M. B...a demandé l'annulation de cet arrêté au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, qui a rejeté cette demande par un jugement du 23 avril 2009, confirmé par un arrêt du 17 mars 2011 de la cour administrative d'appel de Lyon, contre lequel M. B...se pourvoit en cassation ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Le préfet dispose d'un délai de quatre mois à compter de la date d'enregistrement du dossier complet mentionnée dans l'accusé de réception pour statuer sur la demande. / Il peut, par décision motivée, fixer ce délai à six mois à compter de cette date, notamment en cas de candidatures multiples soumises à l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture ou de consultation du préfet d'un autre département. (...) A défaut de notification d'une décision dans le délai de quatre mois à compter de la date d'enregistrement du dossier ou, en cas de prorogation de ce délai, dans les six mois à compter de cette date, l'autorisation est réputée accordée. (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la notification au pétitionnaire, dans les quatre mois suivant l'enregistrement de sa demande, d'une décision portant le délai d'instruction à six mois fait obstacle à la naissance d'une autorisation tacite au terme du délai normal de quatre mois ; qu'il en va ainsi alors même que la décision prolongeant le délai d'instruction aurait été prise par un fonctionnaire non habilité à cet effet, serait entachée d'une insuffisance de motivation ou ne serait pas justifiée par l'existence de candidatures multiples ou par la nécessité de recueillir l'avis du préfet d'un autre département ; que la circonstance que le délai d'instruction ait été prolongé irrégulièrement entache toutefois d'illégalité la décision d'accorder ou de refuser l'autorisation lorsque, du fait d'une évolution des circonstances de droit ou de fait intervenue pendant la prolongation, celle-ci a eu une incidence sur le sens de la décision ;

4. Considérant qu'après avoir relevé que le signataire de la lettre du 22 novembre 2007 prolongeant le délai d'instruction de la demande de M. B... ne disposait pas d'une délégation régulière de signature de la part du préfet, la cour administrative d'appel a jugé que l'intéressé bénéficiait, à compter du 14 janvier 2008, terme du délai normal d'instruction, d'une autorisation tacite et que cette autorisation était illégale dès lors qu'à la date à laquelle elle était née, les terres concernées faisaient l'objet de la part de tiers de projets de reprise qui bénéficiaient d'une priorité en application des dispositions du schéma directeur départemental des structures agricoles ; qu'elle a regardé l'arrêté du 5 février 2008 comme procédant au retrait de l'autorisation tacite illégale ; que M.B... soutient qu'en jugeant légal le retrait de l'autorisation tacite dont il bénéficiait, la cour a commis une erreur de droit, dès lors que, d'une part, l'administration avait, selon lui, été dessaisie à l'expiration du délai normal d'instruction et, d'autre part, que le préfet n'avait pas mis en oeuvre, préalablement au retrait, la procédure contradictoire prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, dont il invoquait les dispositions devant les juges du fond ;

5. Mais considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que c'est à tort que la cour a estimé qu'une autorisation tacite était née le 14 janvier 2008 au bénéfice de M. B... ; que les motifs de l'arrêt, non contestés par M. B..., selon lesquels il existait dès le terme du délai normal d'instruction des projets de reprise des terres concurrents du sien et bénéficiant d'une priorité au regard des dispositions du schéma directeur départemental des terres agricoles en justifient légalement le dispositif, dès lors qu'ils impliquent que la prolongation du délai d'instruction n'a pas eu d'incidence sur le sens de la décision du préfet ; qu'ainsi les moyens invoqués au soutien du pourvoi sont inopérants ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de M. B... doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B...et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 349212
Date de la décision : 22/04/2013
Type d'affaire : Administrative

Analyses

03-03 AGRICULTURE ET FORÊTS. EXPLOITATIONS AGRICOLES. - AUTORISATION D'EXPLOITER DES TERRES AGRICOLES (ART. R. 331-6 DU CRPM) - PROLONGATION IRRÉGULIÈRE DU DÉLAI D'INSTRUCTION - NAISSANCE D'UNE AUTORISATION TACITE À L'EXPIRATION DU DÉLAI DE DROIT COMMUN - ABSENCE - INCIDENCE SUR LA LÉGALITÉ DE LA DÉCISION PRISE SUR LA DEMANDE - EXISTENCE EN CAS D'INTERVENTION, PENDANT LA PROLONGATION, D'UNE ÉVOLUTION DES CIRCONSTANCES DE DROIT AYANT UNE INFLUENCE SUR LA DÉCISION.

03-03 Il résulte des dispositions de l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime (CRPM), qui permet au préfet de porter de quatre à six mois le délai d'instruction des demandes d'autorisation d'exploiter par décision motivée, notamment en cas de candidatures multiples soumises à l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture ou de consultation du préfet d'un autre département, que la notification au pétitionnaire, dans les quatre mois suivant l'enregistrement de sa demande, d'une décision portant le délai d'instruction à six mois fait obstacle à la naissance d'une autorisation tacite au terme du délai normal de quatre mois. Il en va ainsi alors même que la décision prolongeant le délai d'instruction aurait été prise par un fonctionnaire non habilité à cet effet, serait entachée d'une insuffisance de motivation ou ne serait pas justifiée par l'existence de candidatures multiples ou par la nécessité de recueillir l'avis du préfet d'un autre département, la circonstance que le délai d'instruction ait été prolongé irrégulièrement entachant toutefois d'illégalité la décision d'accorder ou de refuser l'autorisation lorsque, du fait d'une évolution des circonstances de droit ou de fait intervenue pendant la prolongation, celle-ci a eu une incidence sur le sens de la décision.


Publications
Proposition de citation : CE, 22 avr. 2013, n° 349212
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : JACOUPY

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:349212.20130422
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