La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/04/2013 | FRANCE | N°358519

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 08 avril 2013, 358519


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 avril et 24 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ; le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1200124/7 du 4 avril 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice adminis

trative, a rejeté son recours tendant à ce qu'il soit enjoint à la s...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 avril et 24 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ; le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1200124/7 du 4 avril 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, a rejeté son recours tendant à ce qu'il soit enjoint à la société France Télécom, d'une part, de ne procéder à aucune déconnexion permettant le fonctionnement des 3 673 sirènes qui composent le réseau national d'alerte, sous astreinte d'un million d'euros par sirène et par jour de déconnexion, d'autre part, de poursuivre l'exécution de toutes les prestations d'établissement, exploitation, fourniture et entretien du réseau national d'alerte mises à sa charge aux termes de l'article 5 de la loi du 2 juillet 1990, permettant la continuité de ce service, sous astreinte d'un million d'euros par constat de dysfonctionnement de sirène ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la société France Télécom le versement de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 26 mars 2013, présentée pour le ministre de l'intérieur ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 28 mars 2013, présentée pour France Télécom ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

Vu le code des postes et des communications électroniques ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. David Gaudillère, Auditeur,

- les observations de la SCP Boulloche, avocat du ministre de l'intérieur, et de la SCP Defrenois, Levis, avocat de France Télécom,

- les conclusions de M. Damien Botteghi, rapporteur public,

La parole ayant à nouveau été donnée à la SCP Boulloche, avocat du ministre de l'intérieur, et à la SCP Defrenois, Levis, avocat de France Télécom ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-3 du code de justice administrative : " En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative " ;

2. Considérant que pour rejeter, par l'ordonnance attaquée, la demande présentée par le ministre de l'intérieur tendant à ce qu'il soit enjoint à la société France Télécom, d'une part, de ne procéder à aucune déconnexion des installations permettant le fonctionnement des 3 673 sirènes qui composent le réseau national d'alerte, sous astreinte d'un million d'euros par sirène et par jour de déconnexion, d'autre part, de poursuivre l'exécution des prestations d'établissement, exploitation, fourniture et entretien du réseau national d'alerte, permettant la continuité de ce service, sous astreinte d'un million d'euros par constat de dysfonctionnement de sirène imputable à France Télécom, le juge des référés s'est fondé sur ce que la mesure sollicitée ne présentait, en l'état de l'instruction, aucun caractère d'urgence ou d'utilité ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom, sans préjudice des obligations qui peuvent être imposées, en application de l'article 33-1 du code des postes et des communications électroniques, à l'établissement et à l'exploitation des réseaux de communications électroniques ouverts au public pour les besoins de la défense nationale et de la sécurité publique : " France Télécom, à la demande du Gouvernement, établit, exploite, fournit et entretient en toute circonstance et sur l'ensemble du territoire national : / a) Des réseaux ou services de télécommunications spécialisés de sécurité, affectés à l'usage des autorités gouvernementales et des représentants de l'Etat sur le territoire national ; (...) / Les coûts de ces prestations sont remboursés à France Télécom. Un décret détermine, en tant que de besoin, les conditions d'application du présent article " ; que si le ministre de l'intérieur soutient qu'un objectif d'entretien du réseau national d'alerte pesait sur la société France Télécom en application des dispositions de l'article 5 de la loi du 2 juillet 1990, ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet d'imposer une telle obligation, le réseau national d'alerte ne constituant pas un réseau ou service de télécommunications spécialisé de sécurité ;

4. Considérant que le juge des référés a souverainement apprécié, sans dénaturer les pièces du dossier, que la déconnexion des liaisons n'avait pas pour effet d'empêcher toute activation des sirènes en cas de risques dès lors que ces sirènes pouvaient être déclenchées localement, de façon manuelle, par les maires ; qu'il ne résulte pas des termes de l'ordonnance attaquée, en tout état de cause, que le juge des référés aurait porté une appréciation sur l'utilité du réseau national d'alerte ; qu'il ne saurait non plus être reproché au juge des référés d'avoir dénaturé la circulaire du 6 mai 2011 relative à l'arrêt de la maintenance du réseau national d'alerte par France Télécom, dès lors que l'ordonnance attaquée ne se fonde pas sur cette circulaire ; que pour estimer que l'urgence ne justifiait pas que soit ordonnée la mesure sollicitée, le juge des référés s'est également fondé sur la circonstance que la société France Télécom avait cessé toute prestation de maintenance sur le réseau national d'alerte depuis le 1er janvier 2011 après en avoir informé le directeur de la sécurité civile dès le 18 octobre 2010 ; qu'il s'est livré ce faisant, sans les dénaturer, à une appréciation souveraine des circonstances de l'espèce qui ne peut être discutée devant le juge de cassation, et n'a pas commis d'erreur de droit en prenant en considération les circonstances relatives au préavis donné par France Télécom et à l'arrêt de la maintenance sur le réseau national d'alerte ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de France Télécom, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à France Télécom au titre de ces dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à France Télécom une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à France Télécom.


Synthèse
Formation : 2ème et 7ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 358519
Date de la décision : 08/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

51-02-004 POSTES ET COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES. COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES. - RÉSEAU NATIONAL D'ALERTE - CARACTÈRE DE RÉSEAU OU SERVICE DE TÉLÉCOMMUNICATIONS SPÉCIALISÉ DE SÉCURITÉ - ABSENCE - CONSÉQUENCE - OBLIGATION D'ENTRETIEN PAR FRANCE TÉLÉCOM - ABSENCE.

51-02-004 Le réseau national d'alerte ne constitue pas un réseau ou service de télécommunications spécialisé de sécurité dont l'entretien incombe à France Télécom en application des dispositions de l'article 5 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990.


Publications
Proposition de citation : CE, 08 avr. 2013, n° 358519
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. David Gaudillère
Rapporteur public ?: M. Damien Botteghi
Avocat(s) : SCP BOULLOCHE ; SCP DEFRENOIS, LEVIS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:358519.20130408
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award