Vu 1°) sous le n°347936, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 mars et 29 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme B...A..., demeurant...; M. et Mme A...demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 09BX03002 du 6 juillet 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté leur requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0700948 du 11 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à leur verser à chacun la somme de 5000 euros et à chacun de leurs neveu et nièce la somme de 15 000 euros au titre des préjudices subis du fait des décisions illégales du préfet de la Haute-Vienne des 25 septembre 2001 et 22 février 2005 ayant refusé le bénéfice du regroupement familial, d'autre part à l'annulation des décisions du préfet de la Haute-Vienne en date des 25 septembre 2001 et 22 février 2005 portant refus de regroupement familial, enfin à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 32 000 euros au titre de leur préjudice matériel, à chacun une somme de 6000 euros au titre du préjudice moral et à chacun de leurs neveu et nièce une somme de 16 000 euros ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3000 euros au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 à la SCP Roger et Sevaux, leur avocat ;
Vu 2°) sous le n° 347 938, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 mars et 29 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et MmeA..., demeurant...; M. et Mme A...demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 09BX03042 du 6 juillet 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a, d'une part, rejeté leur requête tendant à l'annulation du jugement n° 0800093 du 11 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 22 juin 2007 par laquelle le préfet de la Haute-Vienne a refusé le regroupement familial au bénéfice de Djilali et Hanane A...et de la décision du préfet en date du 17 septembre 2007 rejetant leur recours gracieux et, d'autre part, refusé d'annuler ces décisions pour excès de pouvoir et d'enjoindre au préfet d'autoriser le regroupement familial sollicité ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leur demande de regroupement familial dans le délai d'un mois sous astreinte de 200 euros par jour de retard;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3000 euros au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 à la SCP Roger et Sevaux, leur avocat ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Vu l'accord franco - algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et des membres de leur famille ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pierre Chaubon, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. et MmeA...,
- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. et Mme A...;
1. Considérant que les pourvois visés ci-dessus présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dans sa rédaction issue du troisième avenant à cet accord : " Les membres de famille qui s'établissent en France sont mis en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent./ Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente./ Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants :/1 Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille (...)/2. Le demandeur ne dispose ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant en France/ Peut être exclu de regroupement familial:/ 1 Un membre de la famille atteint d'une maladie inscrite au règlement sanitaire international ; /2 Un membre de la famille séjournant à un autre titre ou irrégulièrement sur le territoire français./ Le regroupement familial est sollicité pour l'ensemble des personnes désignées au Titre II du Protocole annexé au présent Accord. Un regroupement familial partiel peut être autorisé pour les motifs tenant à l'intérêt des enfants " ; qu'aux termes du titre II du protocole annexé à l'accord franco-algérien dans sa rédaction issue du troisième avenant: " Les membres de la famille s'entendent du conjoint d'un ressortissant algérien, de ses enfants mineurs ainsi que des enfants de moins de dix huit ans dont il a juridiquement la charge en vertu d'une décision de l'autorité judiciaire algérienne, dans l'intérêt supérieur de l'enfant " ;
3 Considérant que l'intérêt d'un enfant est en principe de vivre auprès de la personne qui, en vertu d'une décision de justice qui produit des effets juridiques en France, est titulaire à son égard de l'autorité parentale ; qu'ainsi dans le cas où est demandé, sur le fondement des stipulations précédemment citées de l'accord franco-algérien, le regroupement familial en vue de permettre à un enfant de rejoindre en France un ressortissant algérien qui en a la charge en vertu d'une décision de l'autorité judiciaire algérienne, l'autorisation de regroupement familial ne peut, en règle générale, eu égard aux stipulations de l'accord franco-algérien, être refusée pour un motif tiré de ce que l'intérêt de l'enfant serait de demeurer en Algérie auprès de ses parents ou d'autres membres de sa famille ; qu'en revanche, et sous réserve de ne pas porter une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale, l'autorité administrative peut se fonder, pour rejeter la demande dont elle est saisie, sur les motifs énumérés à l'article 4 de l'accord franco-algérien, notamment sur ceux tirés de ce que les conditions d'accueil de l'enfant en France seraient, compte tenu en particulier des ressources et des conditions de logement du titulaire de l'autorité parentale, contraires à son intérêt;
Sur le pourvoi n°347 936 :
4. Considérant que, pour confirmer, par l'arrêt attaqué, le jugement du tribunal administratif de Limoges du 11 juin 2009 ayant rejeté la demande d'indemnisation présentée par M. et MmeA..., de nationalité algérienne en raison de l'illégalité des refus d'autorisation de regroupement familial qui leur avaient été opposés, la cour administrative d'appel de Bordeaux, s'est fondée sur le motif que le préfet de la Haute-Vienne était fondé, par sa décision du 25 février 2002, à rejeter la demande de regroupement familial de M. et Mme A...dès lors que la condition tenant à l'intérêt de cette mesure pour les enfants mineurs Djilali et Hanane A...n'était pas remplie et que, par suite, les requérants n'étaient pas fondés à demander réparation des préjudices que leur aurait causé le rejet d'autoriser ce regroupement familial de leurs neveu et nièce ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la garde de ces deux enfants mineurs avait été confiée à M. et Mme A...par actes de kafala, prononcés une première fois le 6 mai 2000 par l'autorité judiciaire algérienne et confirmés par un second jugement du 24 mai 2004 ; que, dès lors, l'intérêt de ces enfants était, en principe, de vivre auprès des personnes titulaires de l'autorité parentale en vertu d'une délégation obtenue par une décision de justice ; qu'il suit de là qu'en estimant que le refus opposé aux demandes de regroupement familial était légalement fondé dès lors que la condition de fond tenant à l'intérêt supérieur des enfants en cause n'était pas remplie faute pour les intéressés de fournir aucun élément permettant d'établir l'intérêt pour les enfants d'être séparés de leurs parents, de leur milieu de vie et de leurs frères et soeurs majeurs qui résident en Algérie, la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit ; qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que M. et Mme A...sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt n° 09BX03002 du 6 juillet 2010 ;
Sur le pourvoi n°347 938 :
5. Considérant que pour confirmer, par l'arrêt attaqué, le jugement du tribunal administratif de Limoges du 11 juin 2009 ayant rejeté le recours pour excès de pouvoir formé par M. et Mme A...contre la décision du 22 juin 2007 par laquelle le préfet de la Haute-Vienne a refusé de faire droit à leur nouvelle demande de regroupement familial pour leurs neveu et nièce Djilali et Hanane, dont la garde leur avait été confiée, ainsi qu'il a été dit plus haut, par actes de kafala prononcés par l'autorité judiciaire algérienne, et de la décision du même préfet en date du 17 septembre 2007 rejetant leur recours gracieux, la cour administrative d'appel de Bordeaux s'est fondée sur le motif que les requérants ne fournissaient aucun élément permettant d'établir l'intérêt pour les enfants mineurs d'être séparés de leurs parents, de leur milieu de vie et de leurs frères et soeurs majeurs qui résident en Algérie ; qu'en statuant ainsi, sans prendre en considération d'autres circonstances, alors que l'intérêt des enfants est, en principe, de vivre auprès des personnes qui sont titulaires de l'autorité parentale en vertu d'une décision de justice, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leur pourvoi, que M. et Mme A...sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt n° 09BX03042 du 6 juillet 2010 ;
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Roger et Sevaux renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SCP Roger et Sevaux de la somme de 6000 euros au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les arrêts n°09BX03002 et 09BX03042 de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 6 juillet 2010 sont annulés.
Article 2 : Les affaires sont renvoyées devant la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 :L'Etat versera à la SCP Roger et Sevaux, avocat de M..et MmeA..., une somme de 6000 euros au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la part contributive de l'Etat.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B...A...et au ministre de l'intérieur.