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19/12/2012 | FRANCE | N°338721

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 19 décembre 2012, 338721


Vu le pourvoi, enregistré le 16 avril 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du gouvernement ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09BX01610 du 9 février 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, à la demande de la commune de Luz-Saint-Sauveur, a annulé le jugement n° 0801308 du 5 mai 2009 du tribunal administratif de Pau et l'arrêté du 6 mai 2008 de l'inspecteur d'académie des Hautes-Pyrénées supprimant un poste d'enseignant à l'école materne

lle de la commune de Luz-Saint-Sauveur à compter de la rentrée scolaire ...

Vu le pourvoi, enregistré le 16 avril 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du gouvernement ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09BX01610 du 9 février 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, à la demande de la commune de Luz-Saint-Sauveur, a annulé le jugement n° 0801308 du 5 mai 2009 du tribunal administratif de Pau et l'arrêté du 6 mai 2008 de l'inspecteur d'académie des Hautes-Pyrénées supprimant un poste d'enseignant à l'école maternelle de la commune de Luz-Saint-Sauveur à compter de la rentrée scolaire 2008 2009 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de la commune de Luz-Saint-Sauveur ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu le code général des impôts ;

Vu la loi n° 95-115 du 4 février 1995 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Esther de Moustier, Auditeur,

- les observations de la SCP Hémery, Thomas-Raquin, avocat de la commune de Luz-Saint-Sauveur,

- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Hémery, Thomas-Raquin, avocat de la commune de Luz-Saint-Sauveur ;

1. Considérant que, par un arrêté du 6 mai 2008, l'inspecteur d'académie des Hautes-Pyrénées a décidé de supprimer, à compter de la rentrée scolaire 2008-2009, un des trois emplois d'enseignant de l'école maternelle de la commune de Luz-Saint-Sauveur ; que le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du gouvernement se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 9 février 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a, d'une part, annulé le jugement du 5 mai 2009 du tribunal administratif de Pau rejetant la demande de la commune de Luz-Saint-Sauveur tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 6 mai 2008, d'autre part, annulé cet arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'éducation : " Les classes enfantines ou les écoles maternelles sont ouvertes, en milieu rural comme en milieu urbain, aux enfants qui n'ont pas atteint l'âge de la scolarité obligatoire. / Tout enfant doit pouvoir être accueilli, à l'âge de trois ans, dans une école maternelle ou une classe enfantine le plus près possible de son domicile, si sa famille en fait la demande. / L'accueil des enfants de deux ans est étendu en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne et dans les régions d'outre-mer. " ; qu'aux termes de l'article D. 113-1 du même code : " Les enfants qui ont atteint l'âge de deux ans au jour de la rentrée scolaire peuvent être admis dans les écoles et les classes maternelles dans la limite des places disponibles. Ils y sont scolarisés jusqu'à la rentrée scolaire de l'année civile au cours de laquelle ils atteignent l'âge de six ans, âge de la scolarité obligatoire. / L'accueil des enfants de moins de trois ans est assuré en priorité dans les écoles et classes maternelles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne et dans les régions d'outre-mer, et particulièrement en zone d'éducation prioritaire. (...) " ;

3. Considérant que ces dispositions n'instituent pas un droit pour les enfants de moins de trois ans à être accueillis dans les écoles et classes maternelles mais se bornent à indiquer au service public de l'enseignement que, lorsque cet accueil peut être organisé, il doit l'être en priorité dans les écoles et classes maternelles situées dans un environnement social défavorisé ; que, dès lors, en jugeant, après avoir estimé que l'école de la commune de Luz-Saint-Sauveur était située dans un environnement social défavorisé, que l'arrêté attaqué avait été édicté en méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 113-1 et D.113-1 du code de l'éducation dans la mesure où l'inspecteur d'académie avait omis de prendre en compte dans le calcul prévisionnel des effectifs de l'école maternelle de la commune de Luz-Saint-Sauveur les enfants de moins de trois ans, la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

5. Considérant, en premier lieu, que si la commune requérante soutient que l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance des dispositions du II de l'article 29 de la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, qui prévoient que le représentant de l'Etat dans le département est informé des perspectives d'évolution de l'organisation des services publics et de tout projet de réorganisation susceptibles d'affecter de manière significative les conditions d'accès à ces services, qu'il transmet ces informations notamment au président du conseil général qui peut mener une concertation locale sur tout projet de réorganisation, il ressort des pièces du dossier que le préfet des Hautes Pyrénées a été informé du projet litigieux par un courrier de l'inspecteur d'académie du 28 mars 2008 et qu'il a transmis cette information au président du conseil général par un courrier du 22 avril 2008 ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux aurait été pris en méconnaissance des dispositions du II de l'article 29 de la loi du 4 février 1995, lesquelles n'édictent aucun délai spécifique, doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que, ainsi que cela a été rappelé, les dispositions précitées de l'article L. 113-1 du code de l'éducation n'instituent pas un droit pour les enfants de moins de trois ans à être accueillis dans les écoles et classes maternelles mais se bornent à indiquer au service public de l'enseignement que, lorsque cet accueil peut être organisé, il doit l'être en priorité dans les écoles et classes maternelles situées dans un environnement social défavorisé ; que, dès lors, en ne comptabilisant pas les enfants de moins de trois ans dans le calcul prévisionnel des effectifs de l'école maternelle de la commune de Luz-Saint-Sauveur, l'inspecteur d'académie n'a pas commis d'erreur de droit ;

7. Considérant, en troisième lieu, que si la commune requérante soutient que l'arrêté attaqué aurait été pris en méconnaissance des dispositions de l'article 61 de la loi du 4 février 1995, qui prévoient que dans les zones de revitalisation rurale, dans lesquelles se trouve classée la commune, l'Etat et les collectivités mettent en oeuvre des dispositions visant notamment à assurer aux habitants de ces zones des conditions de vie équivalentes à celles ayant cours sur les autres parties du territoire, il n'est pas contesté par la commune requérante elle-même qu'après l'intervention de l'arrêté litigieux, le ratio d'enfants de plus de trois ans par classe dans l'école maternelle de la commune de Luz-Saint-Sauveur est comparable à celui constaté dans les autres écoles maternelles de la circonscription de Lourdes-Bagnères ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Luz-Saint-Sauveur n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 9 février 2010 est annulé.

Article 2 : La requête présentée par la commune de Luz-Saint-Sauveur devant la cour administrative d'appel de Bordeaux est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Luz-Saint-Sauveur présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'éducation nationale et à la commune de Luz-Saint-Sauveur.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 338721
Date de la décision : 19/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

30-02-01-01 ENSEIGNEMENT ET RECHERCHE. QUESTIONS PROPRES AUX DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ENSEIGNEMENT. ENSEIGNEMENT DU PREMIER DEGRÉ. ADMISSIONS EN CLASSE MATERNELLE ET CLASSE PRIMAIRE. - ACCUEIL DES ENFANTS DE MOINS DE TROIS ANS DANS LES ÉCOLES ET CLASSES MATERNELLES (ART. L. 113-1 ET D. 113-1 DU CODE DE L'ÉDUCATION) - DROIT - ABSENCE.

30-02-01-01 Les dispositions des articles L. 113-1 et D. 113-1 du code de l'éducation n'instituent pas un droit pour les enfants de moins de trois ans à être accueillis dans les écoles et classes maternelles mais se bornent à indiquer au service public de l'enseignement que, lorsque cet accueil peut être organisé, il doit l'être en priorité dans les écoles et classes maternelles situées dans un environnement social défavorisé.


Publications
Proposition de citation : CE, 19 déc. 2012, n° 338721
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Esther de Moustier
Rapporteur public ?: M. Rémi Keller
Avocat(s) : SCP HEMERY, THOMAS-RAQUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:338721.20121219
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