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06/12/2012 | FRANCE | N°333977

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 06 décembre 2012, 333977


Vu le jugement du 17 novembre 2009, enregistré le 19 décembre 2009, par lequel le tribunal administratif de Nancy a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête dont ce tribunal a été saisi par la société Arcelormittal France ;

Vu la requête, enregistrée le 10 novembre 2008 au greffe du tribunal administratif de Nancy, présentée par la société Arcelormittal France, dont le siège est 1-5, rue Luigi Cherubini à Saint-Denis (93200) ; la société Arcelormittal France demande au Conseil d'Etat :

1°) d'a

nnuler l'arrêté des préfets de Meurthe-et-Moselle et de la Moselle du 9 septe...

Vu le jugement du 17 novembre 2009, enregistré le 19 décembre 2009, par lequel le tribunal administratif de Nancy a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête dont ce tribunal a été saisi par la société Arcelormittal France ;

Vu la requête, enregistrée le 10 novembre 2008 au greffe du tribunal administratif de Nancy, présentée par la société Arcelormittal France, dont le siège est 1-5, rue Luigi Cherubini à Saint-Denis (93200) ; la société Arcelormittal France demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté des préfets de Meurthe-et-Moselle et de la Moselle du 9 septembre 2008 lui prescrivant de réaliser, pour l'ancien site sidérurgique de Joeuf, un diagnostic de l'état des sols au regard d'une contamination au plomb dans un rayon de 500 mètres autour de ce site ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le décret n° 2010-164 du 22 février 2010, notamment son article 55 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie Roussel, Auditeur,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Arcelormittal France,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Arcelormittal France ;

1. Considérant que, par un arrêté du 9 septembre 2008, les préfets de la Moselle et de Meurthe-et-Moselle ont prescrit à la société Arcelormittal France la réalisation d'un diagnostic de l'état des sols dans un rayon de 500 mètres autour de l'ancienne usine sidérurgique de Joeuf ; qu'en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, par un jugement du 17 novembre 2009, le tribunal administratif de Nancy a transmis au Conseil d'Etat le recours formé contre cet arrêté ;

Sur la compétence en premier et dernier ressort du Conseil d'Etat :

2. Considérant que le 5° de l'article R. 311-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction alors applicable, donne compétence en premier et dernier ressort au Conseil d'Etat pour connaître " des recours dirigés contre les actes administratifs dont le champ d'application s'étend au-delà du ressort d'un seul tribunal administratif " ; que l'arrêté imposant à une installation classée pour la protection de l'environnement un diagnostic de l'état des sols produit effet à l'endroit où ces études doivent être réalisées ; que l'emprise de l'usine de Joeuf et de ses abords s'étend sur le territoire de trois communes, elles-mêmes situées dans deux départements différents, la Moselle et la Meurthe-et-Moselle, compris respectivement dans le ressort du tribunal administratif de Strasbourg et dans celui du tribunal administratif de Nancy ; qu'il en résulte que, contrairement à ce que soutient la société requérante, le Conseil d'Etat est compétent pour connaître en premier ressort du recours exercé contre l'arrêté litigieux ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. " ; qu'aux termes de l'article L. 512-7 du même code : " En vue de protéger les intérêts visés à l'article L. 511-1, le préfet peut prescrire la réalisation des évaluations et la mise en oeuvre des remèdes que rendent nécessaires soit les conséquences d'un accident ou incident survenu dans l'installation, soit les conséquences entraînées par l'inobservation des conditions imposées en application du présent titre, soit tout autre danger ou inconvénient portant ou menaçant de porter atteinte aux intérêts précités. Ces mesures sont prescrites par des arrêtés pris, sauf cas d'urgence, après avis de la commission départementale consultative compétente " ; qu'aux termes de l'article R. 512-31 du même code : " Des arrêtés complémentaires peuvent être pris sur proposition de l'inspection des installations classées et après avis du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques. Ils peuvent fixer toutes les prescriptions additionnelles que la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 rend nécessaires ou atténuer celles des prescriptions primitives dont le maintien n'est plus justifié (...) " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 34 du décret du 21 septembre 1977, aujourd'hui codifié à l'article R. 512-68 du code de l'environnement : " Sauf dans le cas prévu à l'article 23-2, lorsqu'une installation classée change d'exploitant, le nouvel exploitant en fait la déclaration au préfet dans le mois qui suit la prise en charge de l'exploitation. / Cette déclaration mentionne, s'il s'agit d'une personne physique, les nom, prénoms et domicile du nouvel exploitant et, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination ou sa raison sociale, sa forme juridique, l'adresse de son siège social ainsi que la qualité du signataire de la déclaration. / Il est délivré un récépissé sans frais de cette déclaration. " ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que si les articles L. 512-7 et R. 512-31 du code de l'environnement cités ci-dessus peuvent constituer la base légale d'un arrêté relatif à une installation dont l'exploitation a cessé, l'autorité administrative pouvant prendre à tout moment, à l'égard de l'exploitant d'une installation classée, les mesures qui se révèleraient nécessaires à la protection des intérêts énumérés à l'article L 511-1 du code de l'environnement, y compris après sa mise à l'arrêt définitif, les arrêtés pris sur le fondement de ces articles ne peuvent toutefois légalement viser que l'exploitant de l'installation, lequel doit s'entendre comme le titulaire de l'autorisation délivrée sur le fondement de l'article L. 511-1 du code de l'environnement précité ou comme son ayant-droit, le changement d'exploitant étant soumis, en vertu de l'article 34 du décret du 21 septembre 1977, aujourd'hui codifié à l'article R. 512-68 du code de l'environnement précité, à une procédure de déclaration en préfecture ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le dernier exploitant en titre de l'usine sidérurgique de Joeuf était la société Unimetal, aux droits de laquelle est venue la société Sogepass, filiale de la société Arcelormittal France ; que si le dernier exploitant de fait de cette usine était la société des Hauts-fourneaux réunis de Saulnes et Uckange, aux droits de laquelle est venue la société Arcelormittal France, société requérante, il résulte également de l'instruction, en particulier du rapport de l'inspecteur des installations classées du 11 mai 1988 qu'à la reprise de l'exploitation du site de Joeuf, la société des Hauts-fourneaux réunis de Saulnes et d'Uckange n'a pas fait de déclaration de reprise des activités ; qu'il suit de là que l'ayant droit du dernier exploitant en titre de l'usine sidérurgique de Joeuf n'est pas la société Arcelormittal France mais la société Sogepass, filiale de cette première société et ayant-droit de la société Unimetal, dernier exploitant en titre du site sidérurgique de Joeuf ; que, par suite, les préfets de Meurthe-et-Moselle et de la Moselle ne pouvaient légalement désigner la société Arcelormittal France comme destinataire de l'arrêté du 9 septembre 2008 ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la société Arcelormittal France est fondée à demander l'annulation de l'arrêté des préfets de Meurthe-et-Moselle et de la Moselle du 9 septembre 2008 ;

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à la société Arcelormittal France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêté des préfets de Meurthe-et-Moselle et de la Moselle du 9 septembre 2008 est annulé.

Article 2 : L'Etat versera à la société Arcelormittal France une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Arcelormittal France, à la société Sogepass et à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 333977
Date de la décision : 06/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 déc. 2012, n° 333977
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie Roussel
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:333977.20121206
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