Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juillet et 12 août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Arezki A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 10 mai 2011 par laquelle le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), statuant en matière disciplinaire, a prononcé à son encontre une interdiction d'exercer toute fonction d'enseignement et de recherche dans tout établissement public d'enseignement supérieur pendant une durée de trois ans avec privation de la totalité du traitement ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 24 mai 2012, présentée pour l'universités Paris 13 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Hervé Guichon, Maître des Requêtes en service extraordinaire,
- les observations de la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de M. A et de la SCP Fabiani, Luc-Thaler, avocat de l'université Paris 13,
- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de M. A et à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, avocat de l'université Paris 13,
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 232-37 du code de l'éducation, relatif à la procédure d'instruction devant le CNESER : " (...) Dans le cas où la juridiction est saisie de nouveaux éléments, le président ordonne la réouverture de l'instruction qui se déroule selon les formes prescrites à l'alinéa précédent du présent article " ;
Considérant qu'il est reproché à M. A, maître de conférences à l'université de Paris 13, d'avoir favorisé, alors que ses fonctions ne lui conféraient aucune qualité pour intervenir dans cette procédure, l'inscription dans des conditions irrégulières d'au moins quarante-six étudiants chinois qui ne remplissaient pas les conditions de diplômes exigées par cette université ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond, et notamment du rapport de la commission d'instruction du CNESER, que, pour engager contre M. A la procédure disciplinaire qui a conduit le CNESER à prendre la décision contestée, le président de l'université s'est principalement fondé sur le visionnage d'un enregistrement vidéo réalisé pour la chaîne de télévision France 2 qui, selon ses dires, ferait apparaître l'existence de malversations relatives à ces inscriptions ; que cet enregistrement constituait dès lors une pièce déterminante de l'instruction ;
Considérant qu'il ressort des énonciations mêmes de la décision attaquée qu'une enveloppe scellée contenant cet enregistrement a été remise par le président de l'université au cours de l'audience publique du CNESER statuant en matière disciplinaire le 10 mai 2011 ; qu'en refusant de livrer à l'instruction cette pièce déterminante pour qualifier la plainte, le CNESER a vicié la procédure ; que, dans ces conditions, M. A est fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie dans la présente instance, ainsi qu'à celle du requérant, qui n'est pas la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du 10 mai 2011 du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche, statuant en matière disciplinaire, est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de l'université de Paris 13 présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Arezki A et à l'université de Paris 13.
Copie en sera adressée pour information à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.