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23/12/2011 | FRANCE | N°337489

France | France, Conseil d'État, 7ème sous-section jugeant seule, 23 décembre 2011, 337489


Vu le pourvoi, enregistré le 12 mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT qui demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0502903 du 14 janvier 2010 par lequel le tribunal administratif de Rouen a, à la demande de Mme Evelyne A, veuve de M. Justin A, d'une part, annulé les décisions du 27 septembre 2005 et du 20 octobre 2005 par lesquelles le chef du service des pensions du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a refusé d

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Vu le pourvoi, enregistré le 12 mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT qui demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0502903 du 14 janvier 2010 par lequel le tribunal administratif de Rouen a, à la demande de Mme Evelyne A, veuve de M. Justin A, d'une part, annulé les décisions du 27 septembre 2005 et du 20 octobre 2005 par lesquelles le chef du service des pensions du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a refusé d'accorder à cette dernière la fraction de la pension de réversion de son mari dont Mme Gabrielle Driant, première épouse divorcée, était bénéficiaire et, d'autre part, lui a enjoint de réviser la pension de réversion de Mme A à compter du 14 septembre 2005 et de verser à cette dernière les arriérés de pension qui lui sont dus à compter de cette date, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de Mme A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Francis Girault, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de Mme Evelyne A,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de Mme Evelyne A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme Driant, première épouse de M. A, ancien fonctionnaire du ministère de l'économie et des finances, et Mme A, sa seconde épouse, ont, au décès de celui-ci, obtenu le bénéfice d'une fraction de pension de réversion, déterminée au prorata de la durée respective de leur mariage avec M. A, en application des dispositions de l'article L. 45 du code des pensions civiles et militaires de retraite alors en vigueur ; qu'à la suite du décès de Mme Driant, survenu en juin 2005, Mme A a demandé à ce que le montant de sa pension soit accru de la part de la première épouse défunte ; que par jugement du 14 janvier 2010 contre lequel le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT se pourvoit, le tribunal administratif de Rouen a annulé ses décisions des 27 septembre et 20 octobre 2005 refusant la révision de sa pension à ce titre ;

Considérant que, si les dispositions de l'article L. 43 du code des pensions civiles et militaires de retraite prévoient qu'en cas de décès de l'un des conjoints bénéficiaires d'une fraction de pension de réversion, sa part passe le cas échéant aux orphelins de moins de vingt et un ans, légitimes ou naturels, issus de son union avec le fonctionnaire ou le titulaire de la pension, ou adoptés au cours de cette union , la même règle n'est pas applicable en l'absence d'enfants mineurs pour la répartition de la pension entre les conjoints ; qu'en l'absence d'enfants, il résulte des dispositions de l'article L. 45 dans leur rédaction issue de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites et applicables à compter du 1er janvier 2004, que la part de pension attribuée à l'un des conjoints n'est pas transmise à l'autre conjoint et que le partage initial n'est pas modifié ; qu'ainsi, en jugeant qu'en l'absence d'enfant mineur du premier lit, la part revenant à celui-ci passait à l'autre lit, le tribunal administratif de Rouen a commis une erreur de droit ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT est fondé à demander l'annulation du jugement du 14 janvier 2010 du tribunal administratif de Rouen ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant, en premier lieu, ainsi qu'il a été dit, que les dispositions de l'article L. 45 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans leur rédaction issue de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites et applicables à compter du 1er janvier 2004, prévoient qu'en cas de décès de l'un des conjoints bénéficiaires d'une fraction de pension de réversion, sa part passe le cas échéant aux orphelins de moins de vingt et un ans, légitimes ou naturels, issus de son union avec le fonctionnaire ou le titulaire de la pension, ou adoptés au cours de cette union ; qu'il résulte de ces dispositions que la part versée à un conjoint qui vient à décéder ne peut être attribuée, après le décès, à un autre conjoint également titulaire d'une part à raison d'un autre mariage ; que l'alinéa 1er de l'article L. 38 du même code, qui prévoit que les conjoints d'un fonctionnaire civil ont droit à une pension de réversion égale à 50 % de la pension obtenue par le fonctionnaire ou qu'ils auraient pu obtenir au jour de son décès s'appliquent à la date de liquidation des pensions des ayants droits, c'est-à-dire à la date du décès du titulaire de la pension principale et, à défaut de disposition expresse telle que prévue antérieurement à la loi du 21 août 2003, la part versée à un conjoint qui vient à décéder ne peut être attribuée, après le décès, à un autre conjoint également titulaire d'une part à raison d'un autre mariage ;

Considérant, en second lieu, que Mme A soutient qu'une discrimination existerait, en méconnaissance des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, entre la situation résultant de l'application des dispositions de l'article L. 45 du code des pensions civiles et militaires de retraite et celle résultant de l'application de l'alinéa 4 de l'article L. 353-3 du code de la sécurité sociale aux termes desquelles, pour le calcul d'une pension de réversion, la part versée à un conjoint qui vient à décéder peut être attribuée, après le décès, à un autre conjoint également titulaire d'une part à raison d'un autre mariage ; que la différence de traitement en fonction du statut, public ou privé, de la personne défunte auteur du droit à pension correspond à la différence de situation entre assurés du secteur public et du secteur privé et n'est pas contraire aux stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision par laquelle le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT a rejeté sa demande de révision de sa pension de réversion ; que la requête de cette dernière doit dès lors être rejetée ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 14 janvier 2010 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande de Mme A présentée devant le tribunal administratif de Rouen et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Madame Evelyne A et à la MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 23 déc. 2011, n° 337489
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Rémy Schwartz
Rapporteur ?: M. Francis Girault
Rapporteur public ?: M. Bertrand Dacosta
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Formation : 7ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 23/12/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 337489
Numéro NOR : CETATEXT000025041106 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2011-12-23;337489 ?
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