Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 juin et 21 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Astha A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 0913692 du 19 février 2010 par laquelle le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val d'Oise d'ordonner son relogement sous astreinte en application de l'article L. 778-1 du code de justice administrative ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à la SCP Waquet-Farge-Hazan, son avocat, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 2008-1227 du 27 novembre 2008, modifié par le décret n° 2009-400 du 10 avril 2009 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Olivier Talabardon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A,
- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A,
Considérant qu'aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation : Le demandeur qui a été reconnu par la commission de médiation comme prioritaire et comme devant être logé d'urgence et qui n'a pas reçu, dans un délai fixé par décret, une offre de logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités peut introduire un recours devant la juridiction administrative tendant à ce que soit ordonné son logement ou son relogement. ; qu'aux termes de l'article R. 441-16-1 du même code : A compter du 1er décembre 2008, le recours devant la juridiction administrative prévu au I de l'article L. 441-2-3-1 peut être introduit (...) passé un délai de trois mois à compter de la décision de la commission de médiation (...). Dans les départements d'outre-mer et, jusqu'au 1er janvier 2014, dans les départements comportant au moins une agglomération (...) de plus de 300 000 habitants, ce délai est de six mois. ; qu'aux termes de l'article R. 441-18-2 de ce code, inséré par le décret du 27 novembre 2008 relatif au contentieux du droit au logement opposable : Quand la commission de médiation reconnaît (...) que le demandeur est prioritaire et doit se voir attribuer un logement en urgence (...), elle informe l'intéressé dans la notification de sa décision du délai, prévu (...) par l'article R. 441-16-1 (...), dans lequel une offre de logement adaptée à ses besoins et à ses capacités (...) doit lui être faite. Elle porte également à sa connaissance le délai, prévu à l'article R. 778-2 du code de justice administrative, dans lequel il pourra exercer le recours contentieux mentionné à l'article L. 441-2-3-1 du présent code (...) ; que, selon le premier alinéa de l'article R. 778-2 inséré dans le code de justice administrative par le même décret du 27 novembre 2008 : Les requêtes (...) sont présentées dans un délai de quatre mois à compter de l'expiration des délais prévus aux articles R. 441-16-1 (...) du code de la construction et de l'habitation. Ce délai n'est toutefois opposable au requérant que s'il a été informé, dans la notification de la décision de la commission de médiation (...) d'une part, de celui des délais mentionnés aux articles R. 441-16-1 (...) de ce code qui était applicable à sa demande et, d'autre part, du délai prévu par le présent article pour saisir le tribunal administratif. ; qu'enfin, aux termes de l'article 3 du décret du 27 novembre 2008, tel que modifié par le décret du 10 avril 2009 : Par dérogation aux dispositions de l'article R. 778-2 du code de justice administrative, les requêtes (...) doivent être présentées au plus tard le 31 décembre 2009 lorsque le requérant se prévaut d'une décision de la commission de médiation rendue avant le 1er janvier 2009 (...) et qu'il n'a pas bénéficié de l'information prévue à l'article R. 441-18-2 du code de la construction et de l'habitation. ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par décision du 22 août 2008, la commission de médiation du Val d'Oise a reconnu que Mme A était prioritaire et devait recevoir un logement en urgence ; qu'en l'absence d'offre satisfaisante dans le délai de six mois, applicable dans ce département, Mme A disposait de la possibilité, en application des dispositions de l'article R. 441-16-1 du code de la construction et de l'habitation, de saisir la juridiction administrative d'une demande tendant à ce que soit ordonné son relogement ; que, la décision de la commission lui ayant été notifiée antérieurement à l'insertion, par le décret du 27 novembre 2008, des articles R. 441-18-2 du code de la construction et de l'habitation et R. 778-2 du code de justice administrative, Mme A n'a pu bénéficier de l'information, prévue par les dispositions combinées de ces articles, selon laquelle le délai imparti pour exercer un tel recours contentieux est fixé à quatre mois à compter de l'expiration du délai de six mois suivant la décision de la commission de médiation ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, le délai de droit commun de deux mois n'était, en tout état de cause, pas opposable à Mme A, dès lors que l'action engagée par elle en application de l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation n'avait pas le caractère d'un recours contre une décision, au sens de l'article R. 421-1 du code de justice administrative ; que, dans ces conditions, Mme A relevait des dispositions dérogatoires de l'article 3 du décret du 27 novembre 2008 modifié, permettant de saisir le tribunal administratif jusqu'au 31 décembre 2009 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en rejetant comme tardive la demande présentée par Mme A le 15 décembre 2009, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a méconnu les dispositions de l'article 3 du décret du 27 novembre 2008 ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, Mme A qui, contrairement à ce que soutient le ministre, peut utilement invoquer ce moyen né de l'ordonnance attaquée, est fondée à en demander l'annulation ;
Considérant que Mme A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Waquet-Farge-Hazan, avocat de Mme A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cette société de la somme de 1 500 euros ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance n° 0913692 du 19 février 2010 du président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
Article 3 : L'Etat versera à la SCP Waquet-Farge-Hazan, avocat de Mme A, une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Astha A et à la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.