Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés le 13 janvier, le 25 janvier et le 25 février 2010, présentés pour Mlle Irène A, demeurant ... ; Mlle A demande au conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 19 novembre 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision du 26 octobre 2007 par laquelle le consul de France à Brazzaville (République du Congo) a rejeté les demandes de visas de long séjour pour ses trois enfants, Jadèle Mifoundou, Marpy Bilongo et Préfina Ndjitoukoulou ; et, à titre subsidiaire, d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision du 26 octobre 2007 par laquelle le consul de France à Brazzaville a rejeté les demandes de visas de long séjour pour ses trois enfants, sollicités au titre de la procédure de regroupement familial ;
2°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de procéder au réexamen des demandes de visas de long séjour dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros en application des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention internationale des droits de l'enfant ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Agnès Fontana, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mlle Irène A,
- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mlle Irène A ;
Considérant que le recours de Mlle Irène A tendant au réexamen de la décision 26 octobre 2007 du consul de France à Brazzaville (République du Congo) refusant à ses enfants, Jadèle Mifoundou, Marpy Bilongo, et Préfina Ndjitoukoulou, un visa d'entrée et de long séjour en France, au titre de la procédure de famille rejoignante d'un réfugié statutaire, a été rejeté par une décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; que la commission, par une décision explicite du 19 novembre 2009, qui s'est substituée à sa décision précédente, a rejeté la demande qui lui avait été adressée par la requérante ; que les conclusions de la requête doivent dès lors être regardées comme seulement dirigées contre cette seconde décision ;
Sur les conclusions dirigées contre le refus de visa en tant qu'il concerne les enfants Jadèle Mifoundou et Préfina Ndjitoukoulou :
Considérant que, postérieurement à l'introduction de la requête, les visas sollicités pour Jadèle Mifoundou et Préfina Ndjitoukoulou ont été effectivement délivrés le 11 août 2010 ; que, dès lors, les conclusions à fin d'annulation et d'injonction en tant qu'elles concernent Jadèle Mifoundou et Préfina Ndjitoukoulou sont devenues sans objet ; que, par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions dirigées contre le refus de visa en tant qu'il concerne l'enfant Marpy Bilongo :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : Sont considérés comme autorités administratives au sens de la présente loi les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif ; qu'aux termes du second alinéa de l'article 4 de la même loi : Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ; que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, qui, lorsqu'elle rejette un recours en application de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est une autorité administrative au sens de l'article 1er de la loi du 12 avril 2000, se trouve dans cette hypothèse soumise aux prescriptions de l'article 4 de cette loi ; que, s'agissant d'une autorité de caractère collégial, il est satisfait aux exigences découlant de celles-ci dès lors que les décisions que prend la commission portent la signature de son président, accompagnée des mentions, en caractères lisibles, prévues par cet article ; qu'il ressort des pièces du dossier que si la décision du 19 novembre 2001 mentionne la qualité de son auteur, le président de la commission de recours contre les décision de refus de visas d'entrée en France, il ne comporte pas l'indication du nom et du prénom de celui-ci ; que ni la signature manuscrite, qui est illisible, ni aucune autre mention de ce document ne permettent d'identifier la personne qui en est l'auteur ; que, par suite, la décision de la commission est entachée d'irrégularité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mlle A est fondée à demander l'annulation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 19 novembre 2009 en tant qu'elle concerne l'enfant Marpy Bilongo ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'en exécution de la présente décision, il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'enjoindre au ministre de réexaminer, dans le délai d'un mois, la demande de visa pour l'enfant Marpy Bilongo ;
Considérant qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SCP Waquet-Farge-Hazan, avocat de Mlle A, de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation et d'injonction sur la décision de refus de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en tant qu'elles concernent les demandes de Jadèle Mifoundou et Préfina Ndjitoukoulou.
Article 2 : La décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 19 novembre 2009 est annulée en tant qu'elle concerne l'enfant Marpy Bilongo.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de réexaminer la demande de visa d'entrée en France pour l'enfant Marpy Bilongo dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 4 : L'Etat versera à la SCP Waquet-Farge-Hazan, avocat de Mlle A, une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mlle Irène A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et du développement solidaire.