Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 juillet 2008 et 20 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE SEE SIMEONI, dont le siège est ZA de la Petite Villedieu, 10 rue de Liège, à Elancourt Cedex (78990) ; la SOCIETE SEE SIMEONI demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 17 juin 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 22 décembre 2006 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande de condamnation du syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe, venant aux droits du syndicat d'agglomération nouvelle des portes de la Brie, à lui payer différentes sommes au titre du solde du marché portant sur la construction d'un groupe scolaire à Magny-le-Hongre ainsi qu'en réparation de différents préjudices subis à l'occasion de l'exécution de ce marché;
2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun du 22 novembre 2006 et de condamner le syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe et l'établissement public d'aménagement du secteur IV de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée à lui verser les sommes de 183 951,66 euros au titre du solde du marché et de 795 125,96 euros avec intérêts et capitalisation en réparation de son préjudice ;
3°) de mettre la somme de 5 000 euros à la charge du syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe et EPAFRANCE au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Laurent Cytermann, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boulloche, avocat de la SOCIETE SEE SIMEONI et de la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat du syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe et de l'EPAFRANCE,
- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boulloche, avocat de la SOCIETE SEE SIMEONI et à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat du syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe et de l'EPAFRANCE ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE SEE SIMEONI a, par acte d'engagement signé le 25 septembre 2000, conclu avec le syndicat d'agglomération nouvelle des portes de la Brie, devenu le syndicat d'agglomération nouvelle Val d'Europe, un marché de travaux pour la construction du groupe scolaire n°2 sur le territoire de la commune de Magny-le-Hongre ; que le maître d'ouvrage était assisté de l'établissement public d'aménagement du secteur IV de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée, maître d'ouvrage délégué, le bureau d'études Iratome étant maître d'oeuvre ; que le maître d'ouvrage délégué a notifié à l'entreprise un projet de décompte que la société a contesté par deux courriers adressés le 27 juin 2003, l'un au maître d'ouvrage délégué, l'autre au maître d'oeuvre ; que par une demande enregistrée au tribunal administratif de Melun le 21 novembre 2003, la société a saisi notamment la juridiction de conclusions tendant à la condamnation du maître d'ouvrage à lui payer deux sommes de 183 951,66 euros et 795 125,96 euros ; que le syndicat d'agglomération nouvelle et l'établissement public d'aménagement ont pour leur part saisi le tribunal administratif d'une demande tendant à l'inscription de la somme de 781 428,95 euros au passif du redressement judiciaire de la SOCIETE SEE SIMEONI ; que par jugement du 22 décembre 2006, le tribunal administratif, joignant les deux demandes, a rejeté les demandes de la société et fait droit aux conclusions du syndicat d'agglomération nouvelle et de l'établissement public en fixant à 781 428,95 euros la créance de ces collectivités sur la SOCIETE SEE SIMEONI ; que la cour administrative d'appel de Paris, par l'arrêt attaqué du 17 juin 2008, a rejeté l'appel de la SOCIETE SEE SIMEONI ;
Considérant qu'aux termes de l'article 13.44 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux : (...) si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposées par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement (...) ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre... ; qu'aux termes de l'article 13.45 du même cahier : Dans le cas où [l'entrepreneur] n'a pas motivé son refus ou n'a pas exposé en détail les motifs de ses réserves en précisant le montant de ses réclamations, ce décompte général est réputé être accepté par lui ; il devient le décompte général et définitif du marché. ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE SEE SIMEONI a produit en pièce n°12 jointe à son mémoire d'appel, le courrier 03.06.168 adressé au maître d'oeuvre, avec copie au maître d'ouvrage délégué, par lequel elle exprimait ses réserves sur le décompte général, et auquel elle avait joint un mémoire détaillant et motivant ses réclamations ; que la cour, en jugeant que la société se bornait à faire valoir le montant de ses réclamations sans les justifier ni motiver suffisamment sa demande et que le décompte général était ainsi devenu définitif, en se fondant sur le seul courrier du même jour adressé au maître de l'ouvrage délégué lui faisant part de ses réserves, sans relever l'existence de ce courrier 03.06.168 adressé au maître d'oeuvre, constitutif du mémoire de réclamation exigé par l'article 13.44 du cahier des clauses administratives générales, a dénaturé les pièces qui lui étaient soumises ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler l'arrêt attaqué ;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions présentées par la SOCIETE SEE SIMEONI au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre solidairement à la charge du syndicat d'agglomération nouvelle Val d'Europe et de l'établissement public d'aménagement du secteur IV de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 17 juin 2008 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : Le syndicat d'agglomération nouvelle Val d'Europe et l'établissement public d'aménagement du secteur IV de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée verseront solidairement la somme de 3 000 euros à la SOCIETE SEE SIMEONI en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SEE SIMEONI, au Syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe et à l'établissement public d'aménagement du secteur IV de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée.