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17/02/2010 | FRANCE | N°319818

France | France, Conseil d'État, 7ème sous-section jugeant seule, 17 février 2010, 319818


Vu la requête, enregistrée le 14 août 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Mohamed A et Mme Karima A demeurant ... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours tendant à l'annulation de la décision du 14 février 2008 du consul général de France à Fès (Maroc) refusant de délivrer un visa d'entrée et de long séjour à l'enfant recueilli par acte de kafala, Haytham B, ensemble

cette décision ;

2°) d'enjoindre au consul général de France à Fès de ré...

Vu la requête, enregistrée le 14 août 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Mohamed A et Mme Karima A demeurant ... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours tendant à l'annulation de la décision du 14 février 2008 du consul général de France à Fès (Maroc) refusant de délivrer un visa d'entrée et de long séjour à l'enfant recueilli par acte de kafala, Haytham B, ensemble cette décision ;

2°) d'enjoindre au consul général de France à Fès de réexaminer la demande de visa sollicité pour le jeune Haytham B ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jacky Richard, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;

Considérant que M. et Mme A demandent l'annulation, d'une part, de la décision du 14 février 2008 du consul général de France à Fès (Maroc) refusant de délivrer un visa d'entrée et de long séjour à l'enfant Haytham B qui leur a été confié par acte de kafala du 24 août 2007 du tribunal de Berkane (Maroc) et, d'autre part, de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours dirigé contre cette décision ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision du 14 février 2008 du consul général de France à Fès :

Considérant qu'il résulte des dispositions des articles D. 211-5 à D. 211-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile qu'en raison des pouvoirs conférés à la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, les décisions par lesquelles elle rejette les recours introduits devant elle se substituent à celles des autorités diplomatiques et consulaires qui lui sont déférées ; que, par suite, la décision implicite de rejet par laquelle la commission a rejeté le recours de M. et Mme A dirigé contre la décision du consul général de France à Fès en date du 14 février 2008 refusant à l'enfant recueilli par acte de kafala, Haytham B, la délivrance d'un visa de long séjour en France s'est substituée à cette dernière décision ; que, dès lors, les conclusions de la requête tendant à l'annulation de la décision du consul général de France à Fès du 14 février 2008 ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation dirigées contre la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'il ressort des écritures du ministre que le refus de délivrer le visa sollicité se fonde, d'une part, sur l'absence d'intérêt supérieur de l'enfant à s'installer en France et, d'autre part, sur le détournement de la procédure d'adoption internationale ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que l'enfant Haytham B, né le 23 avril 2007 de père inconnu, a été abandonné par sa mère et qu'un jugement du 26 juillet 2007 du tribunal de Berkane a acté cet abandon ; que Mme A a obtenu par jugement de kafala du tribunal de Berkane en date du 24 août 2007 la garde de cet enfant et s'est vue confier la responsabilité de subvenir à ses besoins et à son éducation ; que Mme A et son époux ont manifesté leur volonté d'accueillir cet enfant dans leur foyer et possèdent les moyens matériels et financiers d'assumer cette charge ; que, dès lors, dans les circonstances particulières de l'espèce, les requérants sont fondés à soutenir que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a méconnu les stipulations de l'article 3§1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Considérant, d'autre part, que le ministre n'établit pas que le jugement de kafala rendu au bénéfice de Mme A aurait manifesté de la part de cette dernière la volonté de détourner la procédure d'adoption internationale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A sont fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que la présente décision a pour effet de saisir à nouveau les autorités compétentes de la demande des intéressées ; qu'il y a lieu d'enjoindre au consul général de France à Fès de procéder à un nouvel examen de la demande de visa de long séjour du jeune Haytham B dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au consul général de France à Fès de réexaminer la demande de visa du jeune Haytham B dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 17 fév. 2010, n° 319818
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Schwartz
Rapporteur ?: M. Jacky Richard
Rapporteur public ?: M. Boulouis Nicolas

Origine de la décision
Formation : 7ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 17/02/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 319818
Numéro NOR : CETATEXT000021852502 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-02-17;319818 ?
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