Vu le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 15 avril, 10 juillet et 19 novembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Lionel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 5 février 2008 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à ce que le tribunal prenne les mesures nécessaires à l'exécution du jugement du 7 février 2006 enjoignant au recteur de l'académie d'Amiens de régulariser la situation des cotisations afférentes aux droits à pension de M. A auprès des organismes sociaux pour la période d'éviction illégale du 18 juin 1982 au 8 septembre 1992 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions de première instance ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Gaëlle Dumortier, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Yves Struillou, rapporteur public,
- la parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de M. A ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par un jugement du 7 février 2006, devenu définitif, le tribunal administratif d'Amiens après avoir relevé dans ses motifs que M. A, maître-auxiliaire au lycée d'enseignement professionnel Colard de Saint-Quentin (Aisne) avait été illégalement évincé du service à compter du 18 juin 1982 et avait été réintégré à compter du 8 septembre 1992, a enjoint au recteur de l'académie d'Amiens de s'acquitter auprès des organismes sociaux compétents des cotisations afférentes aux droits à pension de l'intéressé pour la période pendant laquelle il avait été illégalement évincé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le jugement du 7 février 2006 mentionnait précisément les dates de début et de fin de la période d'éviction illégale et indiquait que l'intéressé devait être rétabli dans ses droits à pension sur l'ensemble de cette période, sans que ce rétablissement soit subordonné à la reconnaissance par le juge d'un préjudice indemnisable à ce titre ; que, par suite, M. A est fondé à soutenir qu'en jugeant que ni le dispositif du jugement du 7 février 2006, ni les motifs qui en constituaient le soutien nécessaire ne permettait de fixer avec précision les dates de début et de fin de la période pour laquelle les cotisations de retraite étaient dues à l'employeur, ni ne prescrivait le versement à l'URSSAF des cotisations dues au titre de la retraite, le tribunal administratif d'Amiens a inexactement interprété la portée de la chose jugée par son jugement du 7 février 2006 ; qu'il est fondé pour ce motif à demander l'annulation de ce jugement ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'exécution par l'autorité administrative de la décision juridictionnelle d'annulation de la décision d'éviction illégale de M. A implique nécessairement, notamment, le rétablissement de ses droits à pensions pour la période d'éviction illégale ayant couru du 18 juin 1982 au 8 septembre 1992 ; qu'il résulte de l'instruction que, si le recteur de l'académie d'Amiens s'est acquitté auprès des organismes sociaux compétents des cotisations afférentes aux droits à pension de M. A pour la période du 18 septembre 1982 au 6 mars 1986, tel n'a en revanche pas été le cas pour la partie restante de période d'éviction illégale du 7 mars 1986 au 7 septembre 1992 ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement, de s'acquitter pour cette dernière période des cotisations afférentes aux droits à pensions de M. A dans le délai de six mois à compter de la notification de la présente décision ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de M. A tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 5 février 2008 est annulé.
Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement de s'acquitter auprès des organismes sociaux compétents des cotisations afférentes aux droits à pension de M. A pour la période du 7 mars 1986 au 7 septembre 1992 dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 3 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A et de ses conclusions devant le tribunal administratif d'Amiens est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Lionel A et au ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.