Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 16 septembre 2009, présentée par la COMMUNE DE SADA à Mayotte (97640), représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE SADA demande au juge des référés du Conseil d'Etat ;
1°) d'annuler l'ordonnance n° 0900326 en date du 11 septembre 2009 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a enjoint au maire de la commune de communiquer, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter d'un délai de trois jours suivant la notification de cette ordonnance, à MM. Abdillah et Fahardine A les registres de procurations et l'ensemble des coupons de procurations détenus par la mairie à l'occasion des élections municipales et cantonales du 9 août 2009 ;
2°) de rejeter la requête présentée par MM. Abdillah et Fahardine A au juge des référés du tribunal administratif de Mayotte ;
3°) de mettre à la charge de MM. Abdillah et Fahardine A le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a considéré a tort que la condition d'urgence était satisfaite, dès lors que la clôture de l'instruction décidée dans le cadre de la procédure de contestation électorale en cours devant le tribunal administratif n'interviendra que le 9 octobre ; que le juge de cette contestation était en mesure d'ordonner la communication des documents sollicités s'il l'avait jugée indispensable ; qu'en considérant que la décision par laquelle le maire a refusé de communiquer les pièces demandées avait porté une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que constituent les droits de la défense et la libre expression du suffrage, il a entaché son ordonnance d'une erreur de droit ; qu'au surplus, aucune décision implicite n'est encore intervenue, le délai de deux mois dont dispose le maire pour répondre à une demande n'étant pas écoulé ; que la mairie est disposée à présenter les pièces demandées ; qu'en tout état de cause, si une atteinte à certaines libertés fondamentales était avérée, rien n'indique qu'il s'agirait d'une atteinte grave et manifestement illégale ;
Vu l'ordonnance attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2009, présenté par M. Abdillah A et M. Fahardine A, qui concluent au rejet de la requête ; ils concluent en outre à ce que la somme demandée au titre de l'astreinte par jour de retard soit portée à un montant de 5 000 euros, et à ce qu'il soit mis à la charge de la COMMUNE DE SADA la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils soutiennent que l'appel formé par la COMMUNE DE SADA est irrecevable dès lors qu'il n'a pas été formé par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ; que l'extrême urgence est caractérisée ; que le refus du maire de communiquer les documents demandés constitue une atteinte grave et manifeste à des libertés fondamentales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la COMMUNE DE SADA et, d'autre part, M. Abdillah A et M. Fahardine A ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du mercredi 23 septembre 2009 à 12 heures au cours de laquelle a été entendu Me Boucard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la COMMUNE DE SADA ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par MM. A à la requête de la COMMUNE DE SADA :
Considérant que la requête de la COMMUNE DE SADA a été soutenue, lors de l'audience de référé, par un avocat au Conseil d'Etat ; qu'ainsi la fin de non-recevoir opposée par MM. A à cette requête ne peut en tout état de cause qu'être écartée ;
Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale... ;
Considérant qu'à la suite de l'annulation du scrutin municipal et cantonal organisé à Sada (Mayotte) en mars 2008, de nouvelles élections ont eu lieu le 9 août 2009 ; que MM. Abdillah et Fahardine A, candidats respectivement à cette élection municipale et à cette élection cantonale, ont formé devant le tribunal administratif de Mayotte une protestation contre le résultat de ce nouveau scrutin, fondée notamment sur un usage regardé par eux comme anormal des procurations électorales ; que pour mieux asseoir ce grief, ils ont demandé au maire de la COMMUNE DE SADA de leur communiquer divers documents relatifs à ces procurations ; que devant le refus du maire de leur donner satisfaction, ils ont saisi, sur le fondement de l'article L. 521-2 précité du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, lequel a, par l'ordonnance attaquée, enjoint à la commune de procéder sous astreinte à la communication sollicitée ;
Considérant toutefois que la communication des documents sollicités était, selon leurs propres dires, destinée à permettre aux demandeurs de renforcer leur argumentation dans le cadre de la contestation électorale pendante devant le tribunal administratif de Mayotte ; qu'elle n'était dès lors pas dissociable de l'instruction de cette contestation ; que c'est donc au tribunal qu'il reviendrait, dans le cadre de son pouvoir général de direction de cette instruction, de la prescrire, si l'état de l'instruction ne lui permettait pas de se prononcer en toute connaissance de cause sur le bien-fondé du grief relatif aux procurations ; que par suite, et en l'absence au surplus de toute atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a commis une erreur de droit en se croyant autorisé à faire usage des pouvoirs qu'il tenait des dispositions précitées de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ; que la COMMUNE DE SADA est dès lors fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée et le rejet de la demande présentée par MM. A au juge des référés du tribunal administratif de Mayotte ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions présentées par la voie de l'appel incident par MM. A et tendant à l'augmentation du montant de l'astreinte ordonnée par le premier juge, ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de MM. A le versement à la COMMUNE DE SADA de la somme qu'elle réclame sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions présentées sur le même fondement par MM. A ne peuvent qu'être rejetées.
O R D O N N E :
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Article 1er : L'ordonnance n° 0900326 en date du 11 septembre 2009 du juge des référés du tribunal administratif de Mayotte est annulée.
Article 2 : Les conclusions de première instance et d'appel de MM. A sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE DE SADA est rejeté.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la COMMUNE DE SADA et à MM. Abdillah et Farhadine A.
Copie en sera adressée, pour information, au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales et au préfet de Mayotte.