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30/03/2009 | FRANCE | N°311045

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 30 mars 2009, 311045


Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 30 novembre 2007, 26 février et 30 avril 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO, dont le siège est Postfach 980267 à Köln (D51130), Allemagne ; la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 11 septembre 2007 par laquelle l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA) lui a infligé une amende administrative de 12 000 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'

Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de j...

Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 30 novembre 2007, 26 février et 30 avril 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO, dont le siège est Postfach 980267 à Köln (D51130), Allemagne ; la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 11 septembre 2007 par laquelle l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA) lui a infligé une amende administrative de 12 000 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'aviation civile ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;

Vu l'arrêté du 18 février 2003 portant restriction d'usage par la création de volume de protection environnementale sur l'aérodrome de Paris-Charles-de-Gaulle ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yves Doutriaux, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public,

- la parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 227-4 du code de l'aviation civile : « Sur proposition de la Commission nationale de prévention des nuisances, l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires prononce une amende administrative à l'encontre : - soit de la personne physique ou morale exerçant une activité de transport aérien public (...), dont l'aéronef ne respecte pas les mesures prises par le ministre chargé de l'aviation civile sur un aérodrome fixant : (...) - des procédures particulières de décollage ou d'atterrissage en vue de limiter les nuisances sonores engendrées par ces phases de vol (...). / Ces manquements font l'objet de procès-verbaux qui (...) sont notifiés à la personne concernée (...). / La personne concernée est invitée à présenter ses observations à l'autorité dans un délai d'un mois à compter de cette notification.(...) / Les amendes administratives sont prononcées par l'Autorité et ne peuvent excéder, par manquement constaté, un montant de 1 500 euros pour une personne physique et de 20 000 euros pour une personne morale (...) » ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1 de l'arrêté du 18 février 2003 portant restriction d'usage par la création de volumes de protection environnementale sur l'aérodrome de Paris-Charles-de-Gaulle : « II- ...Conformément aux dispositions des articles L. 227-4 (...) du code de l'aviation civile et en vue de maîtriser les nuisances sonores autour de l'aérodrome de Paris-Charles-de-Gaulle (Val-d'Oise), les restrictions d'exploitation suivantes sont applicables sur cette plate-forme : / I- Au sens du présent arrêté, est désigné par : « Volume de protection environnementale » : un volume de l'espace aérien associé à une procédure de départ ou une procédure d'arrivée (...), dans lequel le vol doit être contenu pour des raisons environnementales ; / (...) III- Le commandant de bord ne peut déroger aux règles définies (...) que s'il le juge absolument nécessaire pour des motifs de sécurité ou s'il a reçu une instruction de contrôle délivrée par l'organisme de contrôle de la circulation aérienne pour des motifs de sécurité des vols. (...). » ;

Considérant que la sanction de 12 000 euros contestée a été prononcée à l'encontre de la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO, sur le fondement des dispositions précitées, en raison d'une violation des règles de décollage commise par un de ses aéronefs à l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle le 21 août 2006 en déviant de la trajectoire qu'il devait suivre et en sortant ainsi du volume de protection environnementale ;

Sur la régularité de la procédure de sanction :

Considérant, d'une part, que l'AUTORITÉ DE CONTROLE DES NUISANCES SONORES AÉROPORTUAIRES justifie que les membres de la commission nationale de prévention des nuisances (CNPN), sur proposition de laquelle l'Autorité prend sa décision, avaient été régulièrement convoqués à la séance qui s'est tenue le 26 avril 2007 par lettres datées du 28 mars 2007, auxquelles étaient joints l'ordre du jour et les rapports concernés, reçues pour certaines dès le 2 avril 2007, pour d'autres les 4 et 5 avril 2007, soit plus de cinq jours auparavant conformément aux dispositions de l'article 11 du décret susvisé du 28 novembre 1983 ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que la commission nationale de prévention des nuisances, lors de sa séance du 26 avril 2007, et l'Autorité de contrôle des nuisances sonores et aéroportuaires, lors de sa réunion plénière du 11 septembre 2007, au cours desquelles la sanction envisagée à l'encontre de la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO a été examinée, étaient régulièrement composées et que le quorum était atteint ;

Considérant que si le procès-verbal de l'infraction mentionne que l'aéronef a décollé à partir de la piste 27 gauche alors qu'il a décollé de la piste 27 droite, cette inexactitude matérielle n'a pu ni vicier la régularité de la procédure suivie, ni d'ailleurs avoir d'incidence sur la réalité et la gravité de l'infraction, dès lors que le volume de protection environnementale à respecter est identique dans les deux cas ;

Sur le bien-fondé de la sanction prononcée :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'avion appartenant à la requérante a dévié de 90 degrés par rapport à la trajectoire qu'il devait suivre lors du décollage de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle le 21 août 2006 ;

Considérant que si la requérante invoque des perturbations météorologiques qui auraient rendu absolument nécessaire que le pilote dévie volontairement son aéronef pour des motifs de sécurité, comme l'y autorise le III de l'article 1er de l'arrêté du 18 février 2003, il résulte de l'instruction que ces motifs de sécurité ne sont pas établis dès lors notamment qu'aucun autre manquement de ce type par d'autres appareils n'a été relevé le 21 août 2006 au même moment et dans les mêmes lieux et que, d'ailleurs, la compagnie n'a pas fait d'observation auprès de l'ACNUSA dans le délai d'un mois après avoir reçu le procès-verbal d'infraction notifié le 1er décembre 2006, alors qu'elle y avait été invitée, et que le pilote n'a invoqué cette raison que par un rapport daté du 25 février 2007 ; qu'ainsi l'existence d'un motif d'absolue nécessité ne saurait, en l'espèce, être tenue pour établie ; que l'ACNUSA, en relevant, pour écarter la réalité du motif de sécurité allégué par la requérante, que le pilote n'a pas signalé au contrôle aérien la présence de cumulus et cumulo-nimbus, n'a pas entendu ajouter une condition non prévue par la réglementation et n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant que la circonstance que l'aéronef litigieux soit peu bruyant a été prise en considération par la CNPN lorsqu'elle a proposé une amende d'un montant de 12 000 euros à l'ACNUSA alors que la loi prévoit un montant maximum de 20 000 euros ; que l'Autorité a pu légalement prendre en compte le comportement général de la Compagnie, qui avait déjà commis un manquement similaire, dont la réalité n'a pas été infirmée par l'ordonnance de non-lieu du Conseil d'Etat du 10 septembre 2007, laquelle s'est bornée à tirer les conséquences du retrait par l'ACNUSA, pour un motif de procédure, de la sanction prononcée à raison de ce précédent manquement ; que la circonstance que deux participants à la réunion de la CNPN du 26 avril 2007 auraient souhaité une amende plus faible n'est pas de nature à établir que la sanction ait été disproportionnée ; qu'ainsi, en infligeant une amende de 12 000 euros à la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO, compte-tenu de l'atteinte portée à la tranquillité des riverains imputable à la déviation constatée de trajectoire de départ hors du volume de protection environnementale, nonobstant la circonstance que les faits se soient produits un jour ouvré en cours d'après-midi, l'autorité n'a pas pris une sanction disproportionnée à l' encontre de la requérante ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO la somme de 3 500 euros au titre des frais exposés par l'Etat et non compris dans les dépens que demande l'ACNUSA, qui ne produit à l'appui de sa demande qu'une copie d'une convention d'honoraires de mission juridique qui ne mentionne pas les tâches juridiques effectuées pour la présente affaire ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'ACNUSA tendant à l'application de l'article L. 761-1 sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMPAGNIE WDL AVIATION GMBH et CO et à l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires.


Synthèse
Formation : 2ème et 7ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 311045
Date de la décision : 30/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 mar. 2009, n° 311045
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Yves Doutriaux
Rapporteur public ?: Mme Prada Bordenave Emmanuelle
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:311045.20090330
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