Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 23 janvier 2009, présentée pour M. Patrick A, demeurant au ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre l'exécution de la décision de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers (AMF) du 4 novembre 2008 prononçant à son encontre un blâme et une sanction pécuniaire d'un million d'euros et ordonnant la publication de cette décision ;
2°) de mettre à la charge de l'AMF la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
il soutient que la condition d'urgence est satisfaite dès lors que ne disposant pas des liquidités nécessaires, l'exécution de la sanction pécuniaire compromettrait gravement sa situation financière et immobilière ; que la sanction relative à la publication porterait une atteinte grave à sa réputation et à son avenir professionnel ; qu'il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; qu'en effet la prescription des faits reprochés est acquise dès lors qu'aucun acte tendant à la recherche des faits, à leur constatation ou à leur sanction n'est intervenu entre la notification de griefs datée du 11 février 2004 et la reprise de la procédure en date du 11 décembre 2007, soit que les actes aient disparu en raison du caractère rétroactif de la décision d'annulation rendue le 26 juillet 2007 par le Conseil d'Etat, soit qu'ils n'étaient pas de nature à interrompre le délai de prescription légale ; qu'afin de reprendre la procédure diligentée à son encontre, l'AMF devait notifier à nouveau les griefs reprochés, dès lors que la notification initiale en date du 11 février 2004 était postérieure à la désignation du premier rapporteur le 5 février 2004 ; que la décision attaquée méconnaît le principe d'impartialité, les droits de la défense et les dispositions des articles R. 621-39 et R. 621-40 du code monétaire et financier dès lors que le nouveau rapporteur s'en est tenu aux rapports de son prédécesseur ; qu'elle porte atteinte au principe d'impartialité objective dès lors que le service de l'instruction et du contentieux des sanctions de l'Autorité des marchés financiers n'a pas distingué son activité d'instruction de l'activité contentieuse ; qu'elle est entachée de partialité objective dans la mesure où le chef du service a contribué aux observations en défense dans le précédent litige ; qu'elle viole les stipulations de l'article 6 § 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que le rapporteur nouvellement nommé n'a pas souhaité entendre M. Perrusseau dont l'audition à décharge était déterminante ; que la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article R. 621-7 du code monétaire et financier dès lors que la commission a siégé en nombre pair ; qu'elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le principe de primauté des intérêts du client est appréhendé différemment selon que le prestataire intervient pour le compte d'autrui ou pour son compte propre ; qu'elle est entachée d'une insuffisance de motivation dès lors que l'AMF n'a pas répondu aux exigences relatives à la charge de la preuve qui lui incombait en démontrant le caractère fictif des opérations de contrepartie et en affirmant le caractère excessif des rémunérations ; qu'elle est entachée d'une erreur de qualification juridique des faits dès lors que la CRPN savait que la société GLOBAL EQUITIES intervenait en qualité de contrepartie ; que c'est à tort que l'Autorité des marchés financiers affirme qu'un accord aurait été trouvé entre la CRPN et la société GLOBAL EQUITIES pour l'application d'une rémunération n'excédant pas 0,25 % du montant des transactions ; que l'AMF commet une insuffisance de motivation et inverse la charge de la preuve dès lors qu'il n'incombait pas à la société GLOBAL EQUITIES de rapporter la preuve de l'adéquation de sa rémunération aux prestations effectuées par la CRPN ; que la sanction pécuniaire est fondée sur des bases factuelles erronées relatives à l'évaluation des profits indus prétendument réalisés par l'intermédiaire de la SARL ASSET et assimile sans justification les rémunérations perçues par la SARL ASSET à des profits qu'il a personnellement réalisés ;
Vu la décision de l'Autorité des marchés financiers du 4 novembre 2008 ;
Vu la copie de la requête en annulation présentée à l'encontre de cette décision ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 février 2009, présenté pour l'Autorité des marchés financiers, qui conclut d'une part au rejet de la requête et d'autre part à ce que soit mise à la charge de M. A la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie au regard d'une part de l'absence d'éléments permettant d'éclairer la consistance réelle du patrimoine du requérant et d'autre part en l'absence de justificatifs permettant d'envisager une atteinte grave à sa réputation ou à son avenir professionnel ; qu'en outre, la gravité des manquements commis par M. A appelait la publication de la sanction eu égard aux missions imparties à l'AMF ; que le moyen tiré de la prescription des faits doit être rejeté dès lors qu'en vertu de l'article L. 621-15-I du code monétaire et financier la prescription ne s'applique qu'à la période antérieure à la saisine de la commission des sanctions ; qu'en tout état de cause plusieurs actes de nature à interrompre la prescription triennale sont intervenus dans le délai légal tels que la lettre du 17 février 2005, la convocation en date du 2 mars 2006 du président de la commission des sanctions, la décision du 6 avril 2006 de la commission, de même que la requête formée devant le Conseil d'Etat par le requérant le 30 mai 2006 et l'arrêt du Conseil d'Etat du 26 juillet 2007 ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la notification de griefs doit être écarté dès lors que l'annulation par le Conseil d'Etat de la sanction du 6 avril 2006 n'imposait pas à l'AMF de procéder à une nouvelle notification de griefs mais seulement de nommer un nouveau rapporteur ; que le moyen tiré de la violation du principe d'impartialité et des dispositions de l'article R. 621-39 du code monétaire et financier doit être rejeté dès lors qu'il est inopérant et qu'il n'est pas contestable que le rapporteur nouvellement nommé s'est livré à une appréciation personnelle des données du dossier ; que le moyen tiré d'une violation du principe d'impartialité objective est à écarter dès lors que l'article R. 621-39 du code monétaire et financier autorise le rapporteur à solliciter l'assistance des services de l'AMF ; qu'en outre la circonstance que des représentants de l'AMF aient pu être présents lors de l'audience en référé devant le Conseil d'Etat n'aura nullement constitué une violation dudit principe mais une garantie d'efficacité ; que le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être rejeté ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 621-7 du code monétaire et financier doit être écarté dès lors que ses dispositions n'édictent pas une règle d'imparité mais prévoient que la commission des sanctions ne peut siéger valablement si le quorum de trois personnes n'est pas atteint ; que les moyen tirés d'une erreur de droit, d'une dénaturation des faits et d'une insuffisance de motivation sont à écarter ; qu'en effet M. A, qui agissait en exécution des ordres donnés par la CRPN, devait respecter le principe de primauté de l'intérêt de son client ; que par ailleurs, l'AMF a démontré l'existence d'un dispositif visant à masquer le taux de courtage réellement prélevé sur le marché des actions ; que plusieurs documents confirment le souhait de la CRPN de réduire le taux de commission perçue par la société GLOBAL EQUITIES ; que la commission des sanctions n'a pas commis d'erreur en considérant que les taux de rémunérations pratiqués par la société GLOBAL EQUITIES étaient excessifs ; que le montant de l'amende n'est nullement disproportionné par rapport aux agissements incriminés ;
Après avoir convoqué en audience publique, d'une part, M. A, et d'autre part l'Autorité des marchés financiers ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 24 février 2009 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Blancpain, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. Patrick A ;
- Me Lyon-Caen, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'Autorité des marchés financiers ;
- les représentantes de l'Autorité des marchés financiers ;
et à l'issue de laquelle l'instruction a été prolongée ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 26 février 2009, présenté pour l'AMF, qui précise que la décision désignant le premier rapporteur est datée du 5 février 2004 au lieu du 5 mars 2004, en raison d'une erreur purement matérielle ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 3 mars 2009, présenté pour M. A, qui soutient que l'erreur matérielle n'est pas démontrée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code monétaire et financier ;
Vu le règlement général du Conseil des marchés financiers ;
Vu le règlement général de l'Autorité des marchés financiers ;
Vu le code de justice administrative ;
Considérant que, par la décision dont la suspension est demandée, l'Autorité des marchés financiers (AMF) a prononcé à l'encontre de M. A un blâme et une sanction pécuniaire d'un million d'euros et ordonné la publication de cette décision ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;
Considérant que l'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celle-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire ;
Considérant que si M. A produit la copie d'une déclaration de revenus souscrite, au titre des revenus de l'année 2007, auprès de l'administration fiscale belge, faisant apparaître des dividendes d'origine étrangère s'élevant à 107 648 euros, ainsi qu'un relevé de compte-titres auprès d'un établissement bancaire situé en Belgique s'élevant à 892 235 euros, il ne produit pas d'autres éléments alors notamment que le dossier fait apparaître l'existence d'autres comptes dans d'autres pays et n'a pas apporté de précisions complémentaires lors de l'audience publique ; que dans ces conditions il ne met pas le juge des référés en état d'apprécier la consistance globale de ses ressources et de son patrimoine ; qu'il ne précise pas quelle serait la nature de l'activité professionnelle à laquelle la publication de la décision contestée porterait atteinte ; qu'ainsi il ne justifie pas que la condition d'urgence serait remplie ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter sa requête, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à sa charge, sur le fondement de ces dispositions, la somme de 3 000 euros à verser à l'AMF au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. Patrick A est rejetée.
Article 2 : M. A versera à l'Autorité des marchés financiers la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Patrick A et à l'Autorité des marchés financiers.