La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/03/2008 | FRANCE | N°310794

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 31 mars 2008, 310794


Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Bernard A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret du Président de la République portant nomination de Mme Sylvie au poste de procureur général près la cour d'appel d'Agen ;

2°) d'annuler le décret du Président de la République le nommant dans l'emploi d'avocat général à la Cour de cassation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du cod

e de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n°58...

Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Bernard A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret du Président de la République portant nomination de Mme Sylvie au poste de procureur général près la cour d'appel d'Agen ;

2°) d'annuler le décret du Président de la République le nommant dans l'emploi d'avocat général à la Cour de cassation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 ;

Vu la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 ;

Vu la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 ;

Vu le décret n° 2007-1663 du 26 novembre 2007 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Aurélie Bretonneau, Auditeur,

- les observations de Me Odent, avocat de M. A et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du syndicat de la magistrature,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention du syndicat de la magistrature :

Considérant que le syndicat de la magistrature a intérêt à l'annulation des décrets attaqués ; qu'ainsi, son intervention est recevable ;

Sur la légalité de la nomination de Mme aux fonctions de procureur général près la cour d'appel d'Agen :

Considérant, en premier lieu, que le décret attaqué prononce la nomination de Mme aux fonctions de procureur général près la cour d'appel d'Agen à compter du 19 décembre 2007, en remplacement de M. A, lui-même nommé, aux termes du décret du 7 décembre 2007 également attaqué, avocat général à la Cour de cassation à compter de la même date ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la nomination de Mme aux fonctions de procureur général près la cour d'appel d'Agen serait intervenue sur un emploi non vacant manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition ni aucun principe général du droit n'interdit au Président de la République, chargé par l'article 28 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature de prendre les décrets portant nomination aux fonctions exercées par les magistrats, de muter d'office dans l'intérêt du service les magistrats qui ne bénéficient pas de l'inamovibilité ;

Considérant en troisième lieu qu'il ressort des pièces du dossier que Mme exerçait, à la date de la nomination attaquée, les fonctions de procureur de la République près le tribunal de grande instance du Havre ; qu'eu égard au déroulement de la carrière de l'intéressée, à son appartenance au parquet et à l'importance de ses fonctions antérieurement au décret contesté, M. A n'est pas fondé à soutenir que sa nomination serait entachée, faute d'expérience professionnelle suffisante, d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant enfin que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Sur la légalité de la nomination de M. A aux fonctions d'avocat général près la Cour de cassation :

Considérant, en premier lieu, que M. A ne saurait utilement invoquer la méconnaissance, par la nomination attaquée, des dispositions de l'article 1er du décret du 8 mars 2002 fixant les effectifs des magistrats près la Cour de cassation, dès lors que ces dispositions ont été abrogées par l'article 2 du décret du 26 novembre 2007 fixant les effectifs du service de documentation et d'études de la Cour de cassation, entré en vigueur à la date de sa nomination ; que les requérants ne sont en tout état de cause pas fondés à soutenir que l'abrogation du décret du 8 mars 2002 était illégale, dès lors que, contrairement à ce qu'ils soutiennent, aucune disposition législative n'impose que le nombre d'avocats généraux à la Cour de cassation soit fixé par décret ; que la seule circonstance alléguée que les crédits affectés au financement des emplois dans l'action dite « Cassation » du programme « Juridictions judiciaires » de la loi de finances auraient été insuffisants n'est, de même, en tout état de cause, pas de nature, en l'absence de prescriptions législatives fixant des plafonds d'emplois ou d'indices par action, à entacher d'illégalité le décret attaqué ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'article 39 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature dispose, en son quatrième aliéna, que : « Les emplois vacants de conseiller ou d'avocat général à la Cour de cassation sont pourvus, à raison d'un sur quatre, par la nomination d'un magistrat du premier grade ayant exercé les fonctions de conseiller référendaire ou d'avocat général référendaire pendant au moins huit ans » ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, la nomination attaquée n'a pas méconnu ces dispositions ;

Considérant en troisième lieu que la nomination de M. A au poste d'avocat général à la Cour de cassation, motivée par la longévité, estimée excessive, de ce magistrat aux fonctions de procureur général près la cour d'appel d'Agen, n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant enfin que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation des décrets attaqués ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et tendant à ce qu'il soit fait application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention du syndicat de la magistrature est admise.

Article 2 : La requête de M. A est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Bernard A, au syndicat de la magistrature, au Premier ministre et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Une copie sera adressée pour information au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique et à Mme Sylvie .


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 310794
Date de la décision : 31/03/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - SERVICE PUBLIC DE LA JUSTICE - ORGANISATION - ABROGATION DU DÉCRET DU 8 MARS 2002 FIXANT LES EFFECTIFS DES MAGISTRATS DE LA COUR DE LA CASSATION - LÉGALITÉ - DÈS LORS QU'AUCUNE DISPOSITION LÉGISLATIVE N'IMPOSE QUE LE NOMBRE D'AVOCATS GÉNÉRAUX À LA COUR DE CASSATION SOIT FIXÉ PAR DÉCRET - DÉCRET DE NOMINATION D'UN MAGISTRAT DANS LES FONCTIONS D'AVOCAT GÉNÉRAL À LA COUR DE CASSATION - LÉGALITÉ - CIRCONSTANCE QUE LES CRÉDITS AFFECTÉS EN LOI DE FINANCES AURAIENT ÉTÉ INSUFFISANTS - INCIDENCE - ABSENCE.

37-02-01 L'abrogation, par l'article 2 du décret n° 2007-1663 du 26 novembre 2007, du décret n° 2002-349 du 8 mars 2002 fixant les effectifs des magistrats de la Cour de cassation, n'est pas illégale dès lors qu'aucune disposition législative n'impose que le nombre d'avocats généraux à la Cour de cassation soit fixé par décret. La seule circonstance que les crédits affectés à l'action dite « Cassation » du programme « Juridictions judiciaires » de la loi de finances auraient été insuffisants n'est de même, en tout état de cause, en l'absence de prescriptions législatives fixant des plafonds d'emplois ou d'indices par action, pas de nature à entacher d'illégalité le décret de nomination d'un magistrat dans les fonctions d'avocat général à la Cour de cassation.

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - MAGISTRATS ET AUXILIAIRES DE LA JUSTICE - MAGISTRATS DE L'ORDRE JUDICIAIRE - NOMINATION - ABROGATION DU DÉCRET DU 8 MARS 2002 FIXANT LES EFFECTIFS DES MAGISTRATS DE LA COUR DE LA CASSATION - LÉGALITÉ - DÈS LORS QU'AUCUNE DISPOSITION LÉGISLATIVE N'IMPOSE QUE LE NOMBRE D'AVOCATS GÉNÉRAUX À LA COUR DE CASSATION SOIT FIXÉ PAR DÉCRET - DÉCRET DE NOMINATION D'UN MAGISTRAT DANS LES FONCTIONS D'AVOCAT GÉNÉRAL À LA COUR DE CASSATION - LÉGALITÉ - CIRCONSTANCE QUE LES CRÉDITS AFFECTÉS EN LOI DE FINANCES AURAIENT ÉTÉ INSUFFISANTS - INCIDENCE - ABSENCE.

37-04-02-005 L'abrogation, par l'article 2 du décret n° 2007-1663 du 26 novembre 2007, du décret n° 2002-349 du 8 mars 2002 fixant les effectifs des magistrats de la Cour de cassation, n'est pas illégale dès lors qu'aucune disposition législative n'impose que le nombre d'avocats généraux à la Cour de cassation soit fixé par décret. La seule circonstance que les crédits affectés à l'action dite « Cassation » du programme « Juridictions judiciaires » de la loi de finances auraient été insuffisants n'est de même, en tout état de cause, en l'absence de prescriptions législatives fixant des plafonds d'emplois ou d'indices par action, pas de nature à entacher d'illégalité le décret de nomination d'un magistrat dans les fonctions d'avocat général à la Cour de cassation.


Publications
Proposition de citation : CE, 31 mar. 2008, n° 310794
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: Mlle Aurélie Bretonneau
Rapporteur public ?: M. Guyomar Mattias
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; ODENT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:310794.20080331
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award