Vu le recours, enregistré le 11 juillet 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 18 février 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement du 11 juin 2003 du tribunal administratif de Rennes et la décision du 11 octobre 2000 par laquelle le directeur régional des douanes et des droits indirects de Bretagne a attribué la gérance du débit de tabac de Lopérec à Mme A ;
2°) de rejeter la requête de la commune de Lopérec et de confirmer le jugement du 11 juin 2003 du tribunal administratif de Rennes ;
3°) de mettre à la charge de ladite commune, le versement de la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jacky Richard, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Foussard, avocat du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'EMPLOI et de la direction générale des douanes et des droits indirects et de la SCP Vincent, Ohl, avocat de la commune de Lopérec,
- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du recours ;
Considérant qu'aux termes de l'article 568 du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse du directeur régional des douanes et des droits indirects de Bretagne : « Le monopole de vente au détail est confié à l'administration qui l'exerce par l'intermédiaire de débitants désignés comme ses préposés et tenus à redevance(...) » ;
Considérant qu'aux termes des dispositions du chapitre 1 de la section III -réouverture- de l'instruction n° 97-038 du 22 janvier 1997, relative aux modalités de création et de fermeture des débits de tabac ordinaires en milieu urbain et rural, publiée au bulletin officiel des douanes du 30 janvier 1997 : « Un débit de tabac qui est fermé provisoirement, par suite de la cessation d'activité de son précédent gérant (sans présentation de son successeur), peut être rouvert sur l'initiative de l'administration ou à la suite de la demande de toute personne intéressée par la reprise de sa gérance. /La demande d'une personne souhaitant reprendre l'exploitation d'un point de vente maintenu en situation de fermeture provisoire au delà du délai réglementaire (voir section IV), ne s'analyse pas comme une réouverture, mais comme une demande de création, dont l'instruction est soumise aux critères d'implantation des débits de tabacs. (...) » ; qu'aux termes des dispositions de la section IV précédemment mentionnée : « Les débits de tabac doivent être fermés définitivement le 31 décembre de l'année suivant l'année de leur fermeture provisoire (...) » ; que ces dispositions ne subordonnent pas la réouverture d'un bureau de tabac, dès lors que celle-ci est demandée dans le délai qu'elles prévoient, à l'exigence du maintien du bureau dans les locaux précédemment exploités ; que, par suite, en jugeant que la procédure engagée par la direction régionale des douanes et des droits indirects de Bretagne pour la réouverture du débit de tabac de la commune de Lopérec avant l'expiration du délai conférant un caractère définitif à la fermeture de ce débit devait être regardée comme ayant trait à la création d'un nouveau débit dès lors que la réouverture ne se faisait pas au même lieu, la cour administrative d'appel de Nantes a commis une erreur de droit; qu'ainsi, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'il résulte des termes précités de l'article 568 du code général des impôts que la gérance d'un débit de tabac par un préposé de l'administration, qui est un agent public, ne saurait être regardée comme une délégation de service public ; que le choix du préposé ne peut, dans ces conditions, porter atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le précédent gérant du débit de tabac de la commune de Lopérec a cessé son activité le 31 mai 1999 ; que le délai pendant lequel la fermeture du débit de tabac demeurait provisoire expirait le 31 décembre 2000 ; qu'avant cette date, l'administration pouvait, à bon droit, retenir la procédure de « réouverture » du débit de tabac et non celle de la « création » d'un nouveau débit, conformément aux dispositions de l'instruction du 22 janvier 1997 précitée, prise par le ministre de l'économie et des finances au titre de l'organisation et du bon fonctionnement de l'administration placée sous son autorité ; qu'aucun principe ni aucune disposition législative ou réglementaire n'oblige que la réouverture se fasse dans le même local ni même dans le même lieu au sein de la commune, la nouvelle localisation du débit de tabac devant seulement se trouver dans le périmètre défini par le cahier des charges de l'adjudication ; que par suite la commune de Lopérec n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 11 octobre 2000 par laquelle le directeur régional des douanes et droits indirects a attribué la gérance du débit de tabac de Lopérec à Mme A ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que le rejet des conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'attribution de la gérance du débit de tabac de la commune de Lopérec à Mme A n'appelle aucune mesure d'exécution ; que par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction de la commune de Lopérec doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune de Lopérec la somme que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au titre des frais exposés par l'Etat et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 18 février 2005 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la commune de Lopérec devant la cour administrative d'appel de Nantes et le surplus des conclusions de sa requête devant le Conseil d'Etat sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'EMPLOI, à Mme A, à Mme B et à la commune de Lopérec.