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17/10/2007 | FRANCE | N°290009

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 17 octobre 2007, 290009


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 février 2006 et 8 juin 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES LANDES, représentée par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DES LANDES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté interministériel du 18 novembre 2005 pris pour application du IV de l'article 104 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et relatif à la mise à sa disposition de services du ministère de l'

ducation nationale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la so...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 février 2006 et 8 juin 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES LANDES, représentée par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DES LANDES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté interministériel du 18 novembre 2005 pris pour application du IV de l'article 104 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et relatif à la mise à sa disposition de services du ministère de l'éducation nationale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré présentée le 19 septembre 2007 pour le DEPARTEMENT DES LANDES ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cabrera, Auditeur,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du DEPARTEMENT DES LANDES,

- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du III de l'article 104 de la loi du 13 août 2004 : Dans un délai de trois mois à compter de la publication du décret approuvant une convention type, une ou plusieurs conventions, conclues entre le représentant de l'Etat et (…) le président du conseil général (…) constatent la liste des services ou parties de services qui sont, pour l'exercice de leurs missions, mis à disposition de la collectivité ou du groupement de collectivités bénéficiaires du transfert de compétences en application de la présente loi. Ces services ou parties de services sont placés sous l'autorité (…) du président du conseil général (…) sous réserve des dispositions de l'article L. 421-23 du code de l'éducation et des cas où un partage de l'autorité est organisé, par la convention, à titre temporaire. / Cette convention peut adapter les clauses de la convention type en fonction de situations particulières. / Pour les compétences de l'Etat transférées aux collectivités territoriales ou à leurs groupements postérieurement à la publication du décret approuvant une convention type, le délai de trois mois court à compter de la date du transfert de la compétence. ; qu'aux termes du IV du même article : A défaut de convention passée dans le délai de trois mois précité, la liste des services ou parties de services mis à disposition est établie par arrêté conjoint du ministre chargé des collectivités territoriales et du ministre intéressé, après avis motivé d'une commission nationale de conciliation, placée auprès du ministre chargé des collectivités territoriales et comprenant un nombre égal de représentants de l'Etat et de représentants de chaque catégorie de collectivités territoriales et de leurs groupements ; que le DEPARTEMENT DES LANDES demande l'annulation de l'arrêté du 18 novembre 2005 pris pour l'application des dispositions précitées et relatif à la mise à disposition de ce département de services de l'Etat au titre des compétences transférées dans le domaine de l'éducation ;

Sur la compétence au sein de la juridiction administrative :

Considérant que l'arrêté interministériel du 18 novembre 2005, pris pour l'application du IV de l'article 104 de la loi du 13 août 2004, est relatif à l'organisation du service public de l'éducation dans le DEPARTEMENT DES LANDES pendant la période transitoire précédant le transfert définitif organisé par cette loi et présente par suite, dans son ensemble, un caractère réglementaire ; que, dès lors, le Conseil d'Etat est compétent, en application du 2° de l'article R. 311-1 du code de justice administrative, pour connaître en premier et dernier ressort des conclusions de la requête du DEPARTEMENT DES LANDES ;

Sur les conclusions du DEPARTEMENT DES LANDES tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 novembre 2005 :

En ce qui concerne la procédure :

Considérant que si le DEPARTEMENT DES LANDES soutient que l'avis de la commission nationale de conciliation, exigé par le IV de l'article 104 de la loi du 13 août 2004, n'avait pas été formalisé à la date de l'arrêté attaqué, cette seule circonstance n'est pas susceptible d'entacher celui-ci d'illégalité dès lors qu'il n'est pas contesté que la commission s'est réunie le 21 septembre 2005 et que les ministres auteurs de l'arrêté ont eu connaissance de la teneur de son avis avant de prendre l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 114 de la loi du 13 août 2004 : Les conventions prévues au III de l'article 104 ou, à défaut, les arrêtés pris en application du IV du même article sont soumis aux avis des seuls comités techniques paritaires locaux intéressés ; que les comités paritaires locaux dont la consultation est ainsi prévue sont ceux où siègent des représentants des personnels de l'Etat concernés par la mise à disposition, c'est-à-dire les personnels des services académiques qui devaient être mis à disposition du département ; que seule la consultation du comité paritaire de l'académie de Bordeaux, et non celle du comité technique paritaire compétent pour les agents du DEPARTEMENT DES LANDES, était donc requise ; qu'il ressort des pièces du dossier que le comité technique paritaire académique de Bordeaux s'est réuni et a rendu son avis le 17 octobre 2005 dans des conditions régulières ; que si, par ailleurs, le DEPARTEMENT DES LANDES soutient que la commission nationale de conciliation aurait été irrégulièrement composée, il n'apporte pas d'éléments de nature à apprécier le bien-fondé d'un tel moyen ;

En ce qui concerne l'article 1er :

Considérant que le III et le IV de l'article 104 de la loi du 13 août 2004 prévoient la mise à disposition du département des services ou parties de services de l'Etat qui participent à l'exercice des compétences transférées ; que cette mise à disposition doit être suivie, en vertu du VII de l'article 104, du transfert définitif des services ou parties de services ; qu'en disposant que les services ou parties de services sont mis à disposition du DEPARTEMENT DES LANDES dans l'attente de la publication du décret de transfert des services prévu au VII de l'article 104 de la loi du 13 août 2004, les auteurs de l'arrêté attaqué n'ont fait que rappeler les dispositions de l'article 104 de ladite loi ; que cette mention est sans incidence sur la date à laquelle les agents relevant de ces services exerceront l'option qui leur est personnellement ouverte entre intégration dans la fonction publique territoriale et détachement ;

En ce qui concerne l'article 3 :

Considérant que le troisième alinéa de l'article 3 de l'arrêté attaqué donne au président du conseil général la faculté de déléguer sa signature aux chefs des services de l'Etat mis à la disposition du département pour l'exercice des compétences transférées en vertu de l'article 82 de la loi du 13 août 2004 ; que cette faculté ne peut légalement, eu égard à sa généralité, trouver son fondement ni à l'article L. 3221-1 du code général des collectivités territoriales, qui n'autorise le président du conseil général à déléguer sa signature qu'aux responsables des services de la collectivité qu'il préside, ni à l'article L. 3141-1 du même code, qui ne l'autorise à déléguer sa signature aux chefs des services de l'Etat que pour la préparation et l'exécution des délibérations du conseil général ; qu'ainsi le troisième alinéa de l'article 3 de l'arrêté du 18 novembre 2005 est illégal ;

En ce qui concerne l'annexe à l'arrêté :

Considérant, en premier lieu, que les personnes employées sur un contrat-emploi-solidarité ou un contrat-emploi-consolidé ne sont pas des agents de l'Etat mais sont employés par les établissements publics locaux d'enseignement ; qu'ils ne relèvent pas des dispositions des articles 109 et 110 de la loi du 13 août 2004 relatives à la situation des fonctionnaires et agents non titulaires de droit public exerçant leurs fonctions dans des services ou parties de services transférés, de sorte qu'il est justifié, ainsi que le fait l'arrêté attaqué, de ne pas additionner les effectifs leur correspondant à ceux de ces fonctionnaires et agents non titulaires de droit public ; qu'en tout état de cause, la mention à titre indicatif de ces contractuels de droit privé dans l'annexe, qui a pour seul objet de déterminer le périmètre des moyens de l'Etat provisoirement mis à disposition du département au titre des compétences transférées et ne régit pas la situation ni les droits des catégories d'agents et personnes dont elle constate l'effectif, n'est pas de nature à entacher d'illégalité l'arrêté attaqué ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'article L. 216-4 du code de l'éducation prévoit, lorsqu'un même ensemble immobilier comporte à la fois un collège et un lycée, l'intervention d'une convention entre le département et la région pour déterminer celle des deux collectivités qui assure le recrutement et la gestion des personnels, les grosses réparations, l'équipement et le fonctionnement de l'ensemble, et, en cas d'absence de signature de cette convention à la date du transfert de compétences, la désignation par le préfet de la collectivité chargée d'assurer ces missions jusqu'à l'intervention de la convention ; que l'absence de désignation de cette collectivité et le renvoi à la future convention n'est pas de nature à entacher d'illégalité l'arrêté attaqué, qui se borne à constater la mise à disposition provisoire de services, dont les personnels restent, à ce stade, recrutés et gérés par l'Etat ;

Considérant, en troisième lieu, que si l'arrêté attaqué constate le nombre de recrutements prévus en vue de la rentrée 2005, alors qu'à la date de son édiction, le 18 novembre 2005, la plupart de ces recrutements avaient déjà été réalisés, cette présentation, pour maladroite qu'elle soit, n'est pas de nature à l'entacher d'illégalité au regard des dispositions de l'article 83 et du III de l'article 104 de la loi du 13 août 2004 ;

Considérant, en quatrième lieu, que si l'annexe a inclus, au titre des agents en position interruptive d'activité, des agents placés en congé de longue maladie, qui sont statutairement en position d'activité, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué compte tenu de son objet, dès lors qu'il est constant que ces agents ne participaient effectivement pas, à la date de cet arrêté, à l'exercice des compétences transférées ;

Considérant, enfin, que le DEPARTEMENT DES LANDES conteste sur plusieurs points le décompte des effectifs correspondant aux services mis à sa disposition auquel procède l'annexe à l'arrêté du 18 novembre 2005 ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que le décompte auquel ont procédé les ministres serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation; qu'en particulier, le décompte des effectifs employés dans les cités scolaires ne pouvait être apprécié qu'en tenant compte du partage à réaliser entre région et départements ; que l'effectif correspondant aux services mutualisés et aux services de gestion du personnel tient compte des compétences assurées par ces services qui restent attribuées à l'Etat et n'est pas entaché d'une sous évaluation manifeste ;

Considérant, en revanche, qu'en se fondant sur la circonstance que certains agents contractuels de droit public n'étaient pas rémunérés sur des emplois budgétaires mais sur des crédits de fonctionnement pour ne pas les inclure dans le constat des effectifs relevant des services ou parties de services mis à disposition du DEPARTEMENT DES LANDES pour l'exercice des compétences transférées, alors que ces agents contribuaient à l'exercice de ces compétences, les auteurs de l'arrêté attaqué ont commis une erreur de droit ; que, par suite, il y a lieu d'annuler l'annexe à l'arrêté en tant qu'elle n'inclut pas quatorze agents non titulaires de droit public rémunérés sur des crédits de fonctionnement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le DEPARTEMENT DES LANDES n'est fondé à demander l'annulation que du troisième alinéa de l'article 3 de l'arrêté du 18 novembre 2005 et de l'annexe à l'arrêté, en tant qu'elle n'inclut pas les quatorze agents non titulaires de droit public rémunérés sur des crédits de fonctionnement participant à l'exercice des compétences transférées ; que le surplus des conclusions du DEPARTEMENT DES LANDES doit, par les moyens qu'il invoque, être rejeté ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'accorder au DEPARTEMENT DES LANDES la somme qu'il demande en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



D E C I D E :
--------------
Article 1er : Sont annulés le troisième alinéa de l'article 3 de l'arrêté interministériel du 18 novembre 2005 ainsi que l'annexe à cet arrêté en tant qu'elle n'inclut pas quatorze agents non titulaires de droit public rémunérés sur des crédits de fonctionnement.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DES LANDES, au ministre de l'éducation nationale, au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 290009
Date de la décision : 17/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE. POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE. CONTRÔLE DU JUGE DE L'EXCÈS DE POUVOIR. APPRÉCIATIONS SOUMISES À UN CONTRÔLE RESTREINT. - AGENTS PUBLICS - SERVICES DE L'ETAT MIS À DISPOSITION D'UN DÉPARTEMENT AU TITRE DE COMPÉTENCES TRANSFÉRÉES (ART. 104 DE LA LOI DU 13 AOÛT 2004 ET ARRÊTÉ INTERMINISTÉRIEL DU 18 NOVEMBRE 2005 PRIS POUR SON APPLICATION) - DÉCOMPTE DES EFFECTIFS [RJ1].

Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation sur le décompte des effectifs correspondant aux services de l'Etat mis à la disposition d'un département auquel procède l'annexe de l'arrêté interministériel du 18 novembre 2005 pris pour l'application des dispositions du IV de l'article 104 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 en l'absence de convention conclue à cet effet entre le représentant de l'Etat et le président du conseil général dans le délai prescrit par la loi.


Publications
Proposition de citation : CE, 17 oct. 2007, n° 290009
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Laurent Cabrera
Rapporteur public ?: M. Séners
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:290009.20071017
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