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08/10/2007 | FRANCE | N°298766

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 08 octobre 2007, 298766


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 novembre 2006 et 13 février 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Jacqueline A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 11 septembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, annulé le jugement du 18 janvier 2005 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 15 octobre 2002 du préfet des Bouches-du-Rhône refusant de lui délivrer un titre de séjour, d'autre part r

ejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

2°) stat...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 novembre 2006 et 13 février 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Jacqueline A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 11 septembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, annulé le jugement du 18 janvier 2005 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 15 octobre 2002 du préfet des Bouches-du-Rhône refusant de lui délivrer un titre de séjour, d'autre part rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

2°) statuant au fond, d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 15 octobre 2002 et d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, sous astreinte, de lui délivrer une carte de résident ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Rémi Decout-Paolini, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, rapporteur ;

- les observations de la SCP Gatineau, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un jugement du 18 janvier 2005, le tribunal administratif de Marseille a, à la demande de Mme A, ressortissante mauricienne, annulé la décision du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 15 octobre 2002 refusant de lui délivrer un titre de séjour ; que le préfet des Bouches-du-Rhône a fait appel de ce jugement ; que par un arrêt en date du 11 septembre 2006, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement ; que Mme A se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens du pourvoi :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumises au juge du fond que la cour administrative d'appel de Marseille n'a ni visé, ni analysé le mémoire en défense présenté par Mme A le 21 avril 2006, et n'a pas répondu, dans les motifs de son arrêt, aux moyens, qui n'étaient pas inopérants, développés dans ce mémoire ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué ne satisfait pas aux prescriptions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ; que, par suite, Mme A est fondée à demander son annulation ;

Considérant qu'il y a lieu de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par Mme A à la requête présentée par le préfet des Bouches-du-Rhône devant la cour administrative d'appel de Marseille :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. ; qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement du 18 janvier 2005 du tribunal administratif de Marseille a été notifié au préfet des Bouches-du-Rhône le 3 mars 2005 ; qu'ainsi la requête d'appel, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 5 avril 2005, n'était pas tardive ;

Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce que soutient Mme A, la requête présentée par le préfet des Bouches-du-Rhône devant la cour administrative d'appel ne constitue pas la seule reproduction de son mémoire de première instance ; que, par suite, elle satisfait aux prescriptions de l'article R. 411-1 précité du code de justice administrative ;

Considérant, enfin, que le mémoire présenté en appel par le préfet des Bouches-du-Rhône a été signé par Mme Sabine C, secrétaire générale adjointe de la préfecture des Bouches-du-Rhône, qui a reçu délégation de signature par arrêté préfectoral en date du 30 août 2004 régulièrement publié au recueil des actes administratifs ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient Mme A, elle était compétente pour signer le mémoire du 5 avril 2005 ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Gérard B, alors secrétaire général adjoint de la préfecture des Bouches-du-Rhône, signataire de la décision de refus de titre de séjour du 15 octobre 2002, avait reçu délégation de signature à cet effet par arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 2 juillet 2002, régulièrement publié au recueil des actes administratifs ; que le préfet des Bouches-du-Rhône est, dès lors, fondé à soutenir que c'est à tort que, par un jugement en date du 18 janvier 2005, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision attaquée au motif qu'elle avait été signée par une autorité incompétente ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés devant le tribunal administratif de Marseille ;

Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de titre de séjour prise par le préfet des Bouches-du-Rhône à l'encontre de Mme A, comporte l'indication des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 alors en vigueur : Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge ; qu'il ressort des pièces du dossier que si Mme A fait valoir qu'elle est à la charge de sa fille et de son gendre, ressortissant français, elle ne fournit aucun élément justificatif à l'appui de cette allégation, et qu'elle dispose en outre de ressources propres sous la forme d'un salaire d'un montant mensuel de 638 euros ; que Mme A ne peut donc être regardée comme ascendante à charge d'un ressortissant français au sens des dispositions précitées ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A, qui a déjà séjourné en France en 1997 avant de retourner à l'Ile Maurice où elle est demeurée jusqu'en 2000, serait dépourvue d'attaches dans son pays d'origine ; que la requérante n'établit pas davantage que sa présence en France serait nécessaire pour aider sa fille, mère d'une enfant née en 1999, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que cette dernière réside avec le père de l'enfant ; que, dans ces conditions, et alors qu'elle ne résidait en France que depuis un peu plus de deux ans, Mme A n'est pas fondée à soutenir que la décision par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour a porté à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels la mesure a été prise ; qu'ainsi, celui-ci n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, et n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ; qu'il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 11 septembre 2006 et le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 janvier 2005 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Marseille et le surplus de ses conclusions devant le Conseil d'Etat sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Jacqueline A, au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 298766
Date de la décision : 08/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 oct. 2007, n° 298766
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Olivier Schrameck
Rapporteur ?: M. Rémi Decout-Paolini
Rapporteur public ?: M. Yann Aguila
Avocat(s) : SCP GATINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:298766.20071008
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