Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mai et 6 septembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE AGOSTINI N. et CIE, dont le siège est stade François Monti Casatorra, à Biguglia (20620) ; la SOCIETE AGOSTINI N. et CIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 26 février 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du 27 juin 2002 du tribunal administratif de Bastia la déchargeant de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice 1991 et des pénalités correspondantes ;
2°) statuant au fond, de rejeter le recours formé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie devant la cour administrative d'appel de Marseille ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Yves Salesse, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Balat, avocat de la SOCIETE AGOSTINI N. et CIE,
- les conclusions de Mlle Célia Verot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SARL AGOSTINI N. et Cie a fait l'objet en 1996 d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 1993 et en 1994 ; que l'administration fiscale a relevé, dans le bilan de clôture du premier exercice vérifié, l'inscription au passif de plusieurs sommes au titre des « dettes fiscales et sociales » ; qu'estimant que cette inscription valait reconnaissance de dette au sens de l'article L. 189 du livre des procédures fiscales, elle a mis en recouvrement l'imposition correspondante pour 1991 à hauteur de 371 164 F de droits et 37 116 F de pénalités ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'appel du ministre a été communiqué à la société requérante qui a été mise en mesure de produire ses observations en défense ; que le mémoire en défense de la société a été visé et analysé par la cour administrative d'appel qui en a donc pris connaissance ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure devant la cour doit être écarté ;
Considérant que le délai spécial ouvert par l'article R. 200-18 du livre des procédures fiscales au ministre pour faire appel en matière fiscale n'est pas contraire au principe d'égalité dès lors qu'il tient compte des nécessités particulières de l'administration fiscale qui la placent dans une situation différente de celle des autres justiciables ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est nouveau en cassation et dès lors, n'étant pas d'ordre public, est irrecevable ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 189 du livre des procédures fiscales : « La prescription est interrompue (...) par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables (...) » ; que pour l'application de cette disposition, l'effet interruptif de prescription ne peut résulter que d'un acte ou d'une démarche par lesquels le redevable se réfère clairement à une créance définie par sa nature, son montant et l'identité de son créancier ;
Considérant que la cour a relevé, par une appréciation souveraine des faits qui lui étaient soumis, que les inscriptions comptables figurant au passif du bilan de clôture de l'exercice 1993, sous la rubrique « impôt sur les bénéfices » et précisées à un compte de tiers sous la désignation « impôt sur les sociétés 1991 », sur lesquelles s'est fondée l'administration, déterminent à la fois le bénéficiaire, l'objet, l'année de rattachement et le montant de la créance en cause et définissent ainsi la dette fiscale avec une précision suffisante ; qu'en déduisant de ces constatations exemptes de dénaturation que ces inscriptions doivent être regardées comme constituant un acte portant reconnaissance au sens de l'article L. 189 du livre des procédures fiscales, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué, qui est suffisamment motivé; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la SOCIETE AGOSTINI N. et CIE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE AGOSTINI N. et CIE et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.