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25/07/2007 | FRANCE | N°279528

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 25 juillet 2007, 279528


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 avril et 11 août 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Marc A et Mme Greta A, demeurant ..., agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants légaux de leur fils M. Nathanel A, demeurant à la même adresse ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 19 janvier 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, réformant le jugement du tribunal administratif de Paris du 3 avril 2001, a ramené à 8000 euros chacun la somme qu

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 avril et 11 août 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Marc A et Mme Greta A, demeurant ..., agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants légaux de leur fils M. Nathanel A, demeurant à la même adresse ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 19 janvier 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, réformant le jugement du tribunal administratif de Paris du 3 avril 2001, a ramené à 8000 euros chacun la somme que l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris a été condamnée à verser à M. Marc A et à Mme Greta A en réparation des préjudices qu'ils ont subis du fait du décès de leur fils Avihaï et rejeté le surplus de leurs conclusions ;

2°) de mettre à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris une somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Damien Botteghi, Auditeur,

- les observations de la SCP Choucroy, Gadiou, Chevallier, avocat de M. et Mme Marc A et de M. Nathanel A et de la SCP Parmentier, Didier, avocat de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris,

- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par l'arrêt attaqué du 19 janvier 2005, la cour administrative d'appel de Paris a condamné pour faute l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris à verser diverses indemnités à M. Marc A, à son épouse Mme Greta A et à leur enfant Nathanel A, en réparation des préjudices résultant pour eux de la naissance le 29 juillet 1994 à l'hôpital Lariboisière à Paris, d'un enfant sans vie, Avihaï A, frère jumeau du jeune Nathanel ;

Considérant, en premier lieu, que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que la cour administrative d'appel n'aurait pas répondu à leur demande de prise en compte de leur problème de stérilité et de perte de chance d'avoir un autre enfant dans l'évaluation de leur préjudice dès lors qu'il ressort des mentions de l'arrêt attaqué que la cour a tenu compte de cet élément pour évaluer les troubles dans leurs conditions d'existence que leur a causé le décès de l'enfant ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en jugeant, par une motivation suffisante, qu'il n'était pas démontré que les troubles psychologiques dont souffrait le jeune Nathanel A étaient imputables au décès de son frère jumeau lors de sa naissance, la cour administrative d'appel n'a pas dénaturé les pièces du dossier ;

Considérant, enfin, que la personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur et que ses prétentions demeurent dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement, sous réserve des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit en jugeant que M. et Mme A n'étaient pas recevables à demander pour la première fois en appel la condamnation de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris à leur verser le montant des frais d'obsèques de l'enfant ainsi que celui des frais de procréation médicalement assistée exposés pour tenter d'avoir un nouvel enfant, alors que ces demandes, qu'ils rattachaient aux conséquences dommageables du même fait générateur que celui invoqué dans la demande de première instance, relevaient de la même cause juridique et demeuraient dans la limite du montant de l'indemnité globale demandée et chiffrée en première instance ; que M. et Mme A sont dès lors fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il rejette leurs conclusions tendant à l'indemnisation de ces deux chefs de préjudice ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond dans la mesure de la cassation prononcée ;

Considérant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. et Mme A sont recevables à demander pour la première fois en appel la condamnation de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris à leur verser le montant des frais d'obsèques de l'enfant ainsi que le montant de frais de procréation médicalement assistée exposés après le décès de celui-ci ; qu'ils justifient avoir déboursé au premier titre une somme de 820 euros (5 452 F) dont le remboursement doit être mis à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris ; qu'en revanche, ils ne justifient pas, en tout état de cause, de l'existence des frais qu'ils soutiennent avoir exposés au second titre ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la somme totale que le tribunal administratif de Paris a condamné l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris à verser à M. et Mme A doit être augmentée d'une somme de 820 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. et Mme A, qui ne sont pas la partie perdante ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris le paiement d'une somme de 500 euros à M. A ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP CHOUCROY, GADIOU, CHEVALIER, avocat de Mme A qui a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de faire application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de mettre à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris le paiement d'une somme de 500 euros à cette SCP ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 19 janvier 2005 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. et Mme A tendant à l'indemnisation des préjudices tenant aux frais d'obsèques de l'enfant Avihaï A et aux frais de procréation médicalement assistée exposés après le décès de celui-ci.

Article 2 : Les sommes que l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris a été condamnée à verser à M. et Mme A par le jugement du tribunal administratif de Paris du 3 avril 2001 sont augmentées d'une somme de 820 euros.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 3 avril 2001 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : L'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris versera à M. A la somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code justice administrative et à la SCP CHOUCROY, GADIOU, CHEVALIER, avocat de Mme A, la somme de 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de M. et Mme A présentées devant la cour administrative d'appel de Paris et le Conseil d'Etat est rejeté.

Article 6 : Les conclusions de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : La présente décision sera notifiée à M. Marc A, à Mme Greta A, et à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris.

Copie en sera adressée pour information au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 279528
Date de la décision : 25/07/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 25 jui. 2007, n° 279528
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Damien Botteghi
Rapporteur public ?: M. Chauvaux
Avocat(s) : SCP PARMENTIER, DIDIER ; SCP CHOUCROY, GADIOU, CHEVALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:279528.20070725
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